Pourquoi j'ai tué Pierre de AlfredOlivier Ka - 6 critiques

Edition : Delcourt
Collection : Mirages
Pages : 112 pages en couleurs
Parution : septembre 06
Auteurs : AlfredDessinateurOlivier KaScénariste

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Par : Coacho Voir les critiques de Coacho (30 sept. 2007)

Un sujet particulièrement difficile abordé ici par, une fois n’est pas coutume, un homme.
Olivier Ka se délivre d’un poids, d’un démon, celui de l’acte de pédophilie dont il a été victime… L’odieux, l’indicible, l’inacceptable, raconté par un duo brillant.
A la première personne, et avec une voix off lancinante, on est captivé rapidement par l’ambiance de ce récit autobiographique au point de ne plus pouvoir lâcher le livre avant de l’avoir fini. J’ai parfois eu peur que cette fascination ne soit qu’un voyeurisme mal placé mais non, c’est bien l’inquiétude, la compassion, l’empathie, la révolte, et le désir de voir comment Olivier arrive à supporter tout ça qui nous étreint…
Le tout est magnifiquement mis en image par Alfred. Magnifiquement au sens de la puissance, non pas de la facilité et de l’esbroufe.
L’extrême complicité des deux auteurs a sûrement grandement contribué à cette osmose frissonnante mais il y a aussi ce mélange de pudeur, de pardon, de résignation et d’amour qui prend aux tripes.
Ceci étant, il manque un petit truc pour que ce soit la grande baffe. Et peut-être est-ce dû au fait d’avoir confié son histoire à Alfred qui est responsable de ce sentiment ?
Là où Neaud révolte, ou Raphaël Terrier ((A)mère) percute, où Corbeyran et Amélie Sam (Elle ne pleure pas elle chante) envoûtent, Olivier Ka et Alfred arrive à toucher mais sans nous bousculer. Mais que cela ne vous empêche pas de lire un des plus touchants albums de l’année.

Par : yannick Voir les critiques de yannick (06 janv. 2007)

Cet album-là, je le guettais depuis un bon moment… je me méfiais un peu des avis très favorables des lecteurs disséminés ça et là sur les foras et le sujet de cette BD ne m’attirait pas plus que ça.
Et puis, voilà, au bout de quelques pages, entraîné par le dessin tout en rondeur de Alfred et la bonne narration de ce récit autobiographique, j’ai finalement été capté par cette bd.
L’histoire tourne autour des années 68, Olivier Ka est l’enfant unique d’une famille baba-cool aux mœurs très « libertins » et a des grands parents fortement imprégnés par le catholicisme. Le rapport religieux entre ses parents et ses grands-parents ne sont pas donc au top, Olivier Ka n’aura pas de cesse de se poser des questions sur Dieu et sur sa façon de se comporter ainsi que sur celle de ses parents dont il admire leur « simplicité » de vivre.
Et puis, un jour débarque un curé au nom de « Pierre » dont l’allure correspond aux goût de ses parents et dont la pratique religieuse satisfait ses grands-parents, il sera finalement le trait d’union de la famille.
Pour moi, il y a deux thématiques majeures dans ce récit.
La première correspond à la période post-adolescente de Olivier où le lecteur découvre l’époque soixante-huitarde avec ses interrogations sur à la religion, la nature, la liberté et l’épanouissement sexuel. Ce n’est pas la partie la plus important du récit mais elle est très riche en réflexions. Cette partie m’a posé beaucoup de questions sur l’éducation des enfants, la pratique religieuse, etc…
La deuxième correspond à la vie de Olivier de son adolescence jusqu’à nos jours, une vie marquée par sa « relation » avec ce curé et dont il ne s’en remettra jamais… Cette partie est sans contexte la base du récit, elle est pleine d’émotions et le lecteur ne peut qu’être touché par « la détresse » d’Olivier. Certaines séquences sont très dures à supporter (je pense au dénouement dont j’ai eu le sentiment que mon cœur se resserrer) malgré la douceur du trait d’Alfred.
Le choix de ce dessin pour cette histoire est assez étonnant. Je me mets à la place du lecteur qui n’a jamais entendu parler de ce récit et qui le découvre pour la première fois, imaginez un peu sa surprise lorsque sa lecture arrivera sur des séquences difficiles alors que la douceur du trait d’Alfred ne présageait pas cela !
Finalement, j’applaudis ce choix graphique car cela m’a permis d’entrer plus facilement dans ce récit. Je pense qu’un style plus réaliste pour cette histoire m’aurait rebuté jusqu’à l’écoeurement cette lecture alors que ce dessin « sympathique » me donne envie de relire cette bd… peut-être pas de sitôt mais je sais que je la relirai !
A mon avis, il est clair que cette bd ne donnera pas sitôt l’envie aux lecteurs de la relire tant le sujet est grave et plein de noirceurs. Cependant, le récit est ponctué par une partie sur la jeunesse d’Olivier Ka qui me semble très riche en questionnement, c’est ce passage qui me donne cette envie de relecture. Le dessin d’Alfred, au premier abord d’un style assez bizarre pour ce genre de récit, m’est finalement apparu intelligemment adapté à cette BD.

Par : herve Voir les critiques de herve (21 nov. 2006)

Voici une bande dessinée, qui, pour une raison encore mystérieuse, faisait partie de ma pile "bd en attente". Peut-être que devant le flot d'éloges innondant ce récit (certains le voient comme prix possible au prochain festival d'Angoulême), j'avais peur, soit d'être déçu, soit frustré de n'avoir pas su dénicher plus tôt cette fabuleuse pépite.
Ayant eu pourtant connaissance de la trame du livre, j'ai été littéralement bluffé par la maîtrise du sujet. Une approche calme, méthodique presque chirurgicale de la pédophilie. Il est des livres qui nous prennent à la gorge, "pourquoi, j'ai tué Pierre" en fait évidemment partie.
Le récit d'Olivier Ka est poignant, et encore plus que l'acte lui-même, répugnant, ce sont les dernières pages du récit qui m'ont bouleversé (en fait, les 30 dernières pages). A l'image d'Alfred, dans le récit, on reste sans voix. Cette voix off, tout au long de ces dernières superbes pages de paysage, raisonne encore dans ma tête tant le drame est y à la fois présent et pesant.
Dans le film "Adèle H." de François Truffault, la dernière phrase était (si ma mémoire est bonne) : "je n'ai plus de haine, non, j'ai dépassé la haine". Je pense que l'on peut appliquer cette phrase à la conclusion de ce bouleversant livre. L'illustration d'Alfred est à la hauteur du récit, et je ne peux que saluer cette association d'auteurs.
Un livre à mettre à la portée de tous et qui, je l'espère, trouvera sa juste place dans les bibliothèques.

Par : yvan Voir les critiques de yvan (04 oct. 2006)

En fait, le plus facile serait de juste mettre la note maximale, sans mettre de commentaires, tellement il est difficile de trouver les mots justes pour décrire les sentiments que libère ce petit chef oeuvre. Mais ce n’est pas le but de ce site, et si Olivier Ka a réussi à trouver les mots justes pour exprimer ses sentiments dans ce récit 100% autobiographique, la moindre des choses, c’est d’essayer de le faire également.

Le récit débute à l’âge de 7 ans : l’ambiance est baba-cool, le ton est joyeux, Pierre est notre ami et Olivier baigne dans ce qu’il interprète comme le meilleur des mondes. On va dès lors suivre les pensées de cet enfant et vivre avec lui ce traumatisme qui vient cueillir son innocence dans un monde qui va lentement se noircir dans le regard d’Olivier. Cette trahison de la part d’un ami sera d’abord enfuie, pour ensuite être exorcisée au-delà de ce qui devait être la fin d’un récit honnête et plein de pudeur, mais qui s’avèrera finalement être l’arme d’un crime salvateur : Pierre est mort !

Le sujet est sensible, le traumatisme est celui d’un enfant de douze ans qui est victime d’abus sexuel lors d’une colonie de vacances, le récit est une forme de psychothérapie, et si le crime est fictif, le lecteur est complice consentant de ce meurtre.

La narration à la première personne est prenante. La pureté d’un enfant a été marquée au fer rouge par un acte de pédophilie, et même si le rouge n’était pas vif, la marque est bien présente dans l’esprit de l’adulte qu’il est devenu. La narration sort des tripes de l’auteur et règles les comptes avec un passé difficile à effacer, avec une éducation partagée entre des valeurs libertines et religieuses et avec un curé à l’esprit ouvert qui incarnait parfaitement ces valeurs inculquées.

Le graphisme est celui d’un ami intime et talentueux du narrateur et cela se ressent. Une complicité et une harmonie entre le dessin et le scénario des plus abouties. De nombreuses trouvailles graphiques qui contribuent à exprimer les sentiments enfuis d’Olivier de façon adéquate et sensible. Un petit chef d’œuvre où les deux auteurs ne font plus qu’un, le temps d’un album magistral.

On sait maintenant pourquoi et comment Pierre devait mourir, peut-être même que Pierre mourra plus d’une fois ou que plusieurs Pierres mourront. Quoi qu’il en soit, je n’ai qu’un seul conseil : achetez l’arme du crime et tuer Pierre !

Par : Nico R Voir les critiques de Nico R (28 sept. 2006)

C'est un peu une claque qu'on reçoit en lisant cette BD. Je l'ai lu sur conseil de mon libraire (merci à lui) sans connaître le fond de l'histoire, et quant le moment arrive, j'ai été littéralement pris.
Je dis chapeau aux auteurs d'avoir su prendre sur eux pour raconter cette histoire. Il n'a pas du être simple d'écrire ces pages.
Pour moi, je range cet album dans le club très fermé des quelques BD à mettre dans les mains de ceux qui pensent que la BD ne peut parler que de frivolité.
En bref, un fameux exemple de ce que la BD peut apporter à la littérature française.

Par : Philippe Belhache Voir les critiques de Philippe Belhache (26 sept. 2006)

"Pourquoi j'ai tué Pierre", par Alfred et Olivier Ka. Delcourt, collection Mirages.

Comment peut-on en arriver là ? Olivier Ka essaye de comprendre. Et pour sortir Pierre de sa vie, il écrit. "Pourquoi j'ai tué Pierre" est un récit "100 % autobiographique", écrit avec ses tripes par un auteur en pleine possession de ses moyens, qui a décidé de liquider ses comptes avec le passé. A l'âge de 12 ans, le jeune Olivier a été victime d'attouchements de la part d'un prêtre ouvrier avec qui il allait en colonie de vacances. "Je n'ai pas été violé, précise-t-il. Je n'ai pas fait non plus l'objet de violences..." Pourtant, l'homme qu'il est devenu réalise aujourd'hui à quel point l'incident l'a marqué, jusqu'à façonner pour partie sa personnalité.

Olivier Ka, auteur d'ouvrages pour enfants, a choisi d'écrire cette histoire, son histoire. En la mettant en perspective de sa propre existence de fils d'artistes, de ses questionnements d'enfant élevé dans un milieu libertaire et plutôt permissif, de sa relation avec celui qu'il appelait son ami. Avec un homme qu'il n'est pas arrivé à haïr après les faits, allant jusqu'à respecter longtemps sa promesse de ne rien révéler. L'adulte qu'il est devenu est allé jusqu'au bout. Jusqu'au mot "fin". Et même au-delà. Le voyage effectué sur les lieux de la colonie de vacances avec Alfred a eu de fait des conséquences inattendues...

"Pourquoi j'ai tué Pierre" est remarquable à plusieurs points de vue. Par le ton adopté, mais également par ce parti pris d'autobiographie à quatre mains. Olivier Ka confesse volontiers que sans Alfred, il n'y aurait pas eu d'album. Et Alfred d'accompagner la démarche jusqu'au bout, parce que "c'est mon pote, et que nous avons énormément de choses en commun." Le dessinateur aujourd'hui bordelais offre toute la poésie de son graphisme volontiers surréaliste au texte de Ka, épousant le regard de celui qui n'était encore qu'un enfant, explorant sa relation à Pierre, pour mieux l'accompagner ensuite dans sa vie adulte. Les deux hommes avaient déjà éprouvé leur complicité sur "Monsieur Rouge" (Petit à Petit). Ils ont réussi à rendre unique leur point de vue. "Pourquoi j'ai tué Pierre" est un album sur la libération de la parole, servi par un graphisme lui-même conçu comme un langage, les couleurs comme une grammaire. Un album sensible, sans conteste l'un des plus touchants de cette rentrée 2006.


 


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