Comme cadeau de fin d’année, avec près de 90 pages, Joann Sfar nous livre un cinquième tome du "Le chat du rabbin" plus épais que les précédents. L’aventure étant au centre de ce nouveau récit, l’on va suivre l’extraordinaire périple d’un peintre russe exilé, qui, accompagné du Rabbin, du Chat, du Cheikh Mohammed Sfar et d’un vieil aristocrate russe, va tenter le voyage d’Alger jusqu’en Éthiopie en autochenille Citroën. En redonnant la parole au Chat, une belle présence au Cheikh Mohammed Sfar et en s’octroyant plus de planches pour s’exprimer, Joann Sfar met clairement tous les atouts de son côté dans ce nouvel album et tente ainsi d’insuffler un nouvel élan à la série. L’auteur ira même jusqu’à incorporer une rencontre entre nos aventuriers et le plus connu des reporters belges, n’hésitant pas, au passage, à parodier se dernier et son chien Milou (mais que fait Moulinsart?). Et comme toute aventure de Sfar au sein de cette série n’est finalement qu’une excuse pour s’adonner à une réflexion subtile, après avoir abordé la vieillesse et la mort dans le tome précédent, Sfar va ici s’attaquer à l’exil, aux réfugiés, au racisme, au fanatisme et au cloisonnement des peuples, toujours de manière non moralisante et très humaine. Bref, en baladant habilement un russe, un rabbin et un arabe au milieu de peuples africains pas toujours accueillants et en y incorporant une belle histoire d’amour entre le peintre russe et une jeune femme noire, Sfar parvient à nous livrer une habile plaidoirie contre le racisme. Et pourtant, même si cet album est à nouveau d’un niveau excellent, j’ai l’impression que cette série (récemment couronnée de l’Eisner Award du meilleur album étranger), s’essouffle un peu et que, même si Sfar parvient à garder la même profondeur et légèreté dans les sujets qu’il aborde, la recette bien connue a de plus en plus de mal à me surprendre.