Louis Riel : l'insurgé de Chester Brown - 5 critiques

Edition : Casterman
Collection : Ecritures
Pages : 280 pages en noir & blanc
Parution : septembre 04
Auteurs : Chester BrownScénaristeDessinateur

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Par : Quentin Voir les critiques de Quentin (05 févr. 2006)

Le sujet est très intéressant (la formation du Canada, l'équilibre entre Francophones et Anglophones, le rôle de quelques individus déterminants dans ce processus, etc.). L'approche est historique, rigoureuse, et semble très bien documentée. Le tout aurait pu donner quelque chose de vraiment génial. Hélas, Chester Brown a choisi un style froid, distant, qui ne sert pas bien à son propos. Le choix systématique du gauffrier pour agencer les cases est des plus malheureux car des personnages qui se parlent l'un à l'autre en arrivent à se tourner le dos et à s'addresser à l'extérieur de la page. La copie à l'identique de certaines cases répétée plusieurs fois d'affilée rend certains passages assez lourds. Reste un sujet passionnant, traité de manière intéressante, qui vaut amplement qu'on se donne la peine de passer outre ces quelques aspects irrritants.

Par : Coacho Voir les critiques de Coacho (22 avr. 2005)

Epique ! Ca va vite, c'est fort, quelques fois confus, mais un sacré bon bouquin de Chester Brown.
J'avais lu ci ou là que le format du livre n'était pas adapté, que Brown écrivait son histoire avec un dessin "distant" pour montrer qu'il n'est que conteur, scrutateur, etc... C'est possible. Je dois avouer que j'aurai préféré lire cet album en format cinémascope pour mieux plonger dans son univers graphique mais je me suis contenté de ce morceau d'histoire canadienne qui est un récit saisissant et emballé.

Par : Vieto Voir les critiques de Vieto (02 janv. 2005)

Cet ouvrage retrace une page de l'histoire du Canada peu connue du lecteur français : la révolte d'une colonie francophone contre le pouvoir central anglophone, à la fin du XIX° siècle. Menée par Louis Riel, choisi comme porte-parole en tant que rare représentant des francophones à parler Anglais, cette rébellion, d'abord pacifique, tournera rapidement, à la suite d'un mauvais concours de circonstances, à l'affrontement armé.
Ce livre est intéressant par la rigueur de la recherche historique qu'il a nécessitée, et par la volonté de l'auteur d'éviter tout manichéisme.
Il montre comment des hommes qui veulent au départ simplement faire respecter leur dignité se retrouvent pris dans un conflit qu'ils ne maitrisent plus, alimenté par les ambitions politiques des uns, et les intérêts financiers des autres. Il relate les faits de façon la plus neutre possible, mais sans occulter le contexte souvent raciste : la plupart des "Français" sont des métis d'Indiens, considérés par les "Anglais" comme des sauvages. A cet antagonisme ethnique et linguistique s'ajoute la différence de religion (les francophones sont catholiques, les anglophones protestants).
Louis Riel est donc une oeuvre rigoureuse sur le fond, mais aussi de par sa forme : on serait même tenté de parler d'austérité.
Outre le noir et blanc (qui n'empêche pas les grandes épopées, Pratt, pour ne citer que lui, l'a bien démontré), et un graphisme relativement dépouillé, Chester Brown utilise un "gaufrier" de six cases par page, dans lesquelles il se rapproche très rarement de ses personnages : on ne trouve quasiment pas de gros plans, Brown utilisant une majorité de plans larges ou de plans américains.
Cet éloignement de la "caméra" empèche, à mon sens, les personnages de prendre vie : ils restent des archétypes.
Même Louis Riel lui-même reste largement un inconnu. On assiste à une crise mystique qui le conduit à l'asile, mais le livre refermé, cet homme reste largement un inconnu.
Il s'agit en fait d'un part-pris de l'auteur :
Brown justifie ce parti-pris dans son avant-propos, en exprimant sa volonté de centrer son récit sur l'antagonisme entre Riel et le gouvernement canadien sans faire une biographie (pour laquelle il nous renvoie vers d'autres ouvrages).
Ces limites volontaires qui ne sont pas sans rappeler le "dogme" cher à Lars Von Trier, m'empèchent pas certains auteurs de donner une puissance à leur récit par la richesse de la mise en scène ou les émotions : je pense en particulier à Jason.
Ici rien de tel : Chester Brown fait un ouvrage d'histoire, dans lequel l'émotion apparait peu.
Point amusant, l'auteur a préféré remplacer les injures racistes par des "XXXXX", plus politiquement corrects (ce qui ne l'empèche pas de monter un homme fusillé à qui on donne le coup de grace).
Je le répète, ce livre est suffisamment riche pour rendre sa lecture intéressante. Une aridité quasi monacale en rend toutefois l'accès assez difficile.
J'ai également déploré, étant donné que l'ouvrage a une vocation documentaire, le manque d'informations sur ce qu'est devenue la communauté en question, point d'autant plus important que les tensions entre francophones et anglophones sont encore d'actualité.

Par : Laurent Fabri Voir les critiques de Laurent Fabri (07 déc. 2004)

Louis Riel L'insurgé, de Chester Brown, chez Casterman - Collection Ecritures.

Mentionné dans la sélection officielle du prochain festival d'Angoulême, et pour le prix prestigieux du meilleur album de l'année s'il vous plaît, Chester Brown prouve si besoin était que le média bande dessinée se prête aussi au travail d'historien. Chester Brown ne fait rien d'autre en retraçant les aventures et la vie de Louis Riel, rebelle métisse francophone dans les prémices de la création du Canada. Le travail est fouillé, regorge de références et d'explications, qui rendent les événements accessibles pour le commun des mortels européens.
Brown se contente visiblement des faits le plus simplement possible, en tentant de ne pas prendre parti. Mais il ne faut pas s'y tromper. Les protagonistes en prennent pour leur grade. Que ce soit Riel lui-même de plus en plus aveuglé par le mysticisme ou le Premier ministre canadien McDonald, roublard et fin politique. L'apparente simplicité du récit est portée par un graphisme d'une grande pureté, avare de détails dans les plans rapprochés mais d'une précision qui confine à la miniature dans les plans larges.
Volumineux, le livre, découpé au cordeau dans des planches invariablement construites sur la base de 6 cases carrées par planche, n'est cependant pas très facile à lire. Mais il mérite que l'on s'y attarde à petites doses. Pour mieux y goûter.

Par : david t Voir les critiques de david t (05 oct. 2004)

Voici un livre qui est certainement un chef-d'oeuvre de la BD canadienne. Louis Riel était le chef de l'insurrection métis, aux temps où le Canada n'était qu'une lointaine colonie britannique dont la moitié des terres appartenait en fait à l'omniprésente Compagnie de la Baie d'Hudson. C'est au cours de ce conflit ethnique et linguistique que se noua l'un des plus anciens drames de ce pays naissant.
L'approche de Chester Brown est assez unique. Sa rigueur biographique (avec index des noms propres et notes de fin de volume) dépasse le "From Hell" de Alan Moore, modèle du genre. Son trait minimaliste, lui, est redevable, l'influence est étonnante mais évidente, à Harold Gray, créateur du strip Little Orphan Annie.
Résultat, plutôt que d'aborder son histoire sur un angle sentimental (le cliché "Vécu"), Chester Brown synthétise le drame de Red River, il le schématise et le rend compréhensible. Ce faisant, il montre comment de petits incidents, exploités plus ou moins habilement dans diverses malversations politico-corporatistes, ont pu miner la relation entre Métis et Anglophones... Et c'est sans parler des Autochtones qui continueront à être massacrés sans grand ménagement.
Chester Brown, qui aurait pu choisir d'enjoliver, de romancer, offre plutôt au lecteur un magistral (c'est le mot!) livre d'histoire. Ses personnages sont humains, ses situations réalistes. Il nous dessine un Louis Riel complexe, contradictoire, ancré jusqu'à sa mort dans ses convictions très personelles. Brown nous joue les dessous de la politique canadienne, ses profondes racines assimilationnistes (la communauté Métis fut mise au pas entre autre car le Canada ne voulait pas d'un "autre Québec"; lire: d'une autre province francophone), et son rôle dans ce qui deviendra un conflit ethnique dont les traces sont toujours présentes aujourd'hui.
Pour toutes ces raisons, mais aussi parce que c'est une lecture passionnante, on peut dire que Chester Brown a commis là un livre majeur et on ne peut que saluer sa sortie en français.
PS: Cette critique a été écrite à partir de la version originale anglaise, parue chez Drawn & Quarterly. Je ne peux malheureusement pas commenter la traduction de Casterman.


 


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