Les 185 critiques de Quentin sur Bd Paradisio...

Un cadavre noyé. Quelques familles ou couples se retrouvant coincés dans une crique et commencant à vieillir de manière accélérée. Un huis clos abscons, aux personnages peu crédibles, et au final assez pénible à lire. Peeters semble avoir une prédilection pour les scénaristes qui lui fournissent des récits loufoques, mais je le trouve généralement bien meilleur quand il est seul aux commandes.
Elmer par Quentin
Si vous voulez lire une BD de facture classique mais qui réserve une grosse surprise, ne ratez pas Elmer! Du jour au lendemain, tous les poulets du monde sont soudainement dotés d'une conscience humaine et peuvent communiquer avec les hommes sur un pied d'égalité. Les poulets se révoltent sur le sort qui leur est réservé et qui s'apparente à un génocide. On débat aux Nations Unies pour savoir quel sort leur réserver. Faut-il tous les exterminer ou au contraire les protéger par les conventions sur les droits de l'homme? Faut-il permettre les mariages mixtes entre humains et poulets? Doit-on leur ouvrir l'accès aux écoles, au marché du travail, etc.? Ce livre, dessiné et scénarisé par un auteur Philippin (qui travaille aussi pour Marvel et d'autres éditeurs Américains) part d'une idée toute simple et saugrenue, mais aux conséquences incalculables, mais bien développées et maîtrisées dans l'album. Le résultat est tout à fait surprenant: une fable semi-animalière développant une réflection sur la discrimination, le génocide, les droits des animaux, ou même le terrorisme, qui peut soit se lire de manière superficielle sur le ton léger d'une farce grotesque (des poulets qui parlent et qui se marient avec des humains? Hahaha), soit d'une manière très profonde qui n'est pas sans rappeler Maus, de Spiegelman (on y retrouve le même thème du rapport conflictuel entre père et fils à propos de l'interprétation de l'histoire et de la définition des valeurs humaines). L'album repose constamment sur des situations tellement aberrantes qu'on ne peut pas les prendre au sérieux, mais qu'on est pourtant obligé de prendre au sérieux vu la gravité du sujet. Je ne sais pas si tout cela a été planifié et voulu comme tel par l'auteur, mais le résultat est inédit, déroutant, et donne matière à réflection.
Dérives par Quentin
Le thème de "Dérives" est le combat entre les petits pêcheurs et la grande industrie de pêche internationale, un drame pour des dizaine de milliers de personnes aujourd'hui, de par le monde. Mais loin de tout misérabilisme, Piero Macola met en scène un petit pêcheur nommé Bouba Boro qui, sachant pertinemment bien que les dés sont pipés et que son combat est perdu d'avance, ne baisse toutefois pas les bras et tente de s'en sortir par tous les moyens. Une BD rafraichissante qui dénonce les méfaits de la globalisation tout en gardant foi en l'homme.
Renée (Lucille) par Quentin
La lecture de "Lucille" m'avait profondément bouleversé. La suite, "Renée", m'a fait le même effet, tout aussi fort. Un album plein d'angoisses, de détresses, de misère affective, avec pourtant, malgré tout, l'esquisse d'une lueur là bas, au bout de la nuit. Ludovic Debeurme continue de développer un univers très personnel, à la fois au niveau du dessin et du récit, ainsi que dans son recours aux dessins oniriques comme échappatoir à la détresse ou pour représenter l'indicible. Certaines pages, accompagnées de très beaux monologues aux mots soigneusement choisis, sont de véritables poèmes graphiques. Ludovic Debeurme confirme ainsi qu'il est l'un des auteurs les plus importants de notre époque. J'ai lu à plusieurs reprises qu'on le comparait à Clowes ou Burns mais je suis d'avis que ces derniers ne lui arrivent pas à la cheville.
Omni-visibilis par Quentin
Du jour au lendemain, chaque personne sur terre peut, en fermant les yeux, voir ce que voit Hervé Boileau et, en se bouchant les oreilles, entendre ce qu'il entend. Cela empoisonne la vie de milliards de gens qui ne peuvent se mettre à l'abri de ces visions, ainsi que celle d'Hervé qui se trouve transformé à son corps défendant en outil de publicité ou de propagande ultime et pourchassé par l'humanité entière. L'énorme potentiel que l'on aurait pu trouver dans cette excellente idée de départ, servi par le dessin très efficace de Mathieu Bonhomme, est malheureusement laissé en friche. La majeure partie de l'album consiste en une longue course poursuite qui s'étale sur plus de 100 pages. C'est assez gag, mais ca aurait pu être beaucoup mieux.
Cela commence à faire quelques années que J.-C. Denis nous sert des albums moyens, au scénario peu abouti. "Tous à Matha" est le dernier de la série. On suit cette fois une bande de copains partant en vacance en été 1967, et on voit bien, avec le recul, tout ce qui a changé depuis mai 1968. Mais l'intérêt de l'album, pour moi, s'arrête là. Le reste, c'est baston entre gars de la ville et du village, discussion entre potes, soirées guitares sur la plage, beuveries, petites révoltes contre les parents coincés, le tout développé au premier degré et sans grande subtilité. Je suppose que cela parlera au gens qui sont nés dans les années 1950, mais j'appartiens à la génération post-soixantehuitarde et le sujet m'a laissé relativement indifférent.
Page noire par Quentin
Un bon polar, solidement construit et dessiné par des auteurs qui ont déjà fait leurs preuves, qui procure un bon moment de détente.
Le tandem Pellejero/Lapiere, auteur d'un de mes albums favoris (Le tour de valse) est pour moi une valeur sûre, gage de grande qualité. Cela se confirme avec "L'impertinence d'un été", dont l'histoire se penche sur le milieu d'artistes dans le Mexique révolutionnaire. On y retrouve ce mélange d'amour, de passion, de mélancolie, de choix existentiels sur fond de fresque historique et politique, qui font la vie et les grandes BD.
Voilà un album qui, sans être un chef d'oeuvre, m'a tenu en haleine jusqu'au bout. L'histoire est efficace, avec des retournements de situations inattendus, et est bien servie par un très beau dessin.
Ce premier album de Julie Maroh, racontant une histoire d'amour lesbien entre 2 adolescentes, avec tous les problèmes d'acceptation de soi et des autres qui s'ensuivent, interpelle mais souffre de beaucoup de défauts. A force d'insister sur la passion et le drame, ca tourne assez vite au pathos et aux clichés, ce qui affaiblit la crédibilité des personnages et du récit.
Fille perdue par Quentin
Voici un album dont le scénario, bien que fort dépouillé, se révèle un peu plus profond qu'il n'en a l'air. On finit par se demander qui est la fille perdue dont l'album tire son titre, entre l'adolescente faussement naïve, son amie qui essaye de se faire plus adulte qu'elle n'est, une fillette disparue et la jeune femme sulfureuse qui fascine et fait fantasmer la première. Tout cela m'a un peu fait penser au thème du film "La piscine" (avec Charlotte Rampling). Mais c'est bien là le seul attrait de l'album qui n'est pas très convaincant dans sa manière de présenter l'histoire et dont les dessins sont assez maladroit (tous les visages se ressemblent tant qu'ils seraient impossible à différentier si les personnages n'avaient pas des coiffures différentes, par exemple). Bref, cet album est fort moyen mais possède néanmoins un petit quelque chose qui retient l'attention.
Hurlevent par Quentin
Petite déception pour cet album dont j'avais lu tant de critiques positives. Les dessins sont certes forts réussis, surtout l'ambiance de Bruges la morte qui m'a rappelée les tableaux de Khnopff. Mais ils énervent aussi, tant ils font penser à un roman photo (visages et corps figés dans des poses carcatéristiques des prises sur le vif, bâtiments dont l'image semble être déformée par la lentille d'un appareil photographique, etc). L'histoire, quand à elle, manque de punch. Beaucoup de silences, entrecoupés de textes parfois percutants, mais manquant de continuité. Le récit semble hésiter entre souci du détail historique et passion romantique. Ce dernier aspect n'est pas développé comme il l'aurait dû, et souffre du rythme haché et de détails historiques relativement insignifiants. La fin est tout à fait invraissemblable (surtout le coup du cadavre de 5 ans d'âge qui a l'air tellement frais qu'on croirait qu'il date de la veille!). Bref, une histoire qui avait beaucoup d'atouts pour me plaire, mais dans laquelle je n'ai vraiment pas réussi à entrer.
Betty Blues par Quentin
J'ai décidé d'acheter cette BD en lisant les commentaires élogieux sur ce site internet et j'ai été énormément décu. Pas par le dessin, qui est bien sympathique, mais par le scénario qui est très mal construit. L'histoire se base sur une série de tournants plus improbables les uns que les autres, avec plein d'ouvertures qui ne sont jamais refermées, qui culminent inévitablement en une fin des plus décevantes. Le tout ressemble à la fuite en avant d'un aveugle, qui change de direction chaque fois qu'il se cogne à un obstacle. Ca sent l'amateurisme et l'improvisation à plein nez. Je suppose que c'est normal pour un premier album, mais j'ai trouvé ca tellement mauvais que je n'acheterai plus d'album scénarisé par cet auteur avant longtemps.
Voies off par Quentin
Voies off présente une série de courtes histoires dont le point commun est que le texte et le dessin amènent le lecteur à se faire une fausse idée de ce qui est en train de se passer. L’histoire bascule dans les 2 dernières pages et renverse toutes les présomptions bâties au fil des pages précédentes. Ca ressemble à un plaisant exercice de style, humoristique, assez efficace, mais dont on finit par se lasser. Surtout que le dessin, fait sur ordinateur, n’est pas de ceux auxquels on s’attache.
Nathalie (Gus) par Quentin
Des bandits machos traitent les femmes comme des objets en public. En privé, cependant, ils se révèlent être de grands romantiques et se font à chaque fois mener en bateau par des pimbèches… Le far-west de Blain joue sur les clichés avec humour. L’auteur renouvelle son dessin et sa mise en couleurs, mais le résultat qui ne me plait guère (gros pifs et couleurs criardes). La narration a un rythme tout à fait spécial, trépidant, avec d’énormes ellipses. Ca tient le lecteur en haleine, mais on sent que le filon exploité (les histoires de cœur d’une bande de cons et de salauds) est mince et s’épuise assez vite.
Alors que le premier tome était véritablement original et dépeignait des femmes fortes, à la fois physiquement et psychologiquement, dont le caractère sortait renforcé d'années de moqueries et d'humiliations et leur permettait de remettre à leur place hommes vaniteux et fausses amies, le deuxième tome a totalement lâché ce filon et se contente de raconter des histoires banales, avec des femmes qui auraient tout aussi bien pu être minces. Bien qu'amusants, les différents épisodes sont relativement quelconques car ils n'ont plus rien à voir avec ce qui faisait l'intérêt de la série.
Il est des albums qui réservent des surprises, et « la sirène des pompiers » fait partie de ceux là. Avec un scénario intelligent, cocasse et très bien construit, ainsi que des dessins agréables, « la sirène des pompiers » exploite à merveille toutes les possibilités découlant de la rencontre d’une sirène en quête de beauté et d’amour et d’un peintre pompier en quête d’inspiration. La forte personnalité des personnages rend leur rencontre encore plus intéressante. Les auteurs auraient difficilement pu faire mieux – sauf peut être à la fin de l’album, qui en rajoute une couche de trop. Un album à déguster pour se laisser mener en bateau et découvrir de nouvelles saveurs.
Leçon de choses par Quentin
"Lecon de choses" dresse un portrait sans fard d'une certaine période de l'enfance. La cruauté envers les animaux, le manque de confiance en soi, les conneries ayant des conséquences plus ou moins graves, la découverte progressive de l'hypocrisie des adultes, les premières cigarettes, les premières déceptions amoureuses, les premiers émois sexuels, les histoires qu'on exagère, celles qu'on invente par orgeuil, celles qu'on s'invente pour s'échaper dans un monde imaginaire, etc. Le tout est très finement observé et presenté sans concession mais avec une bonne dose d'humour - qui fait souvent rire jaune. J'aime beaucoup ces albums qui se penchent sur l'enfance (comme dans la série "Marzi", par exemple, bien que cette dernière soit beaucoup plus édulcorée), malgré la difficulté d'en maîtriser la narration (plus basée sur une collection de souvenirs de jeunesse présentés en désordre que sur une histoire bien construite). Je regrette cependant les dessins auxquel Mardon m'avait habitué (ce n'est pas parce qu'on raconte des histoires d'enfants que les dessins doivent nécessairement devenir naïfs et "enfantins"), ainsi que les couleurs crues.
Deux frères s'égarent dans une vieille masure et y rencontrent une bande d'enfants qui occupe les lieux et y vit des aventures de pirates, des farandoles de carnaval et des moments magiques à la belle étoile. Cela survira-t-il à la destruction annoncée de la maison? On trouve dans cet album une série de personnages mignons, sympathiques et fort attachants, mais la trame de l'histoire est des plus mince et ne mène vraiment pas bien loin.
L'intérêt du premier tome tenait dans la confrontation entre Ingmar, un petit Viking peureux et son frère représentant le prototype du Viking fort, courageux et bête. Dans ce deuxième tome, Ingmar s'égare avec une donzelle qui assassine sa duègne sans raison ni aucun remord. Les deux tourterelles s'égarent dans un village terrorisé par un marabout Africain qui a eu un parcours à la mord-moi-le-noeud. Sur le point d'être lynché, celui-ci sauve le village avec les rites vaudun qu'il a apris dans le désert (après avoir été vendu comme esclave à Bassora et avoir égorgé son maître, et avant d'être vendu comme esclave à Verdun et de tuer son maître Romain). L'humour (sur la religion, l'homosexualité, l'ignorance des paysans) devient lourd. L'histoire est rocambolesque, tirée par les cheveux, et malgré tout sans surprise. Séparé de ses frères Viking, le personnage d'Ingmar perd tout intérêt. Les dessins n'arrivent pas à faire oublier la pauvreté du scénario ni à empêcher le naufrage de l'album. Je n'achèterai pas la suite.
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