Avec «Les mauvaises gens», Etienne Davodeau nous refait le coup du reportage en BD, qui lui avait si bien réussi dans «Rural !». Le sujet traite cette fois de l’histoire du syndicalisme social-chrétien et du socialisme dans les Mauges. De plus, loin de s’intéresser à des gens qu’il ne connaissait pas au départ (comme dans « rural »), Davodeau se penche ici sur l’histoire de ses propres parents, et donc en partie sur sa propre enfance. L’album se retrouve donc entre deux genres, le reportage (un genre dans lequel l’auteur est un pionnier et auquel il est en train de donner ses lettres de noblesses) et l’autobiographie. Mais l’autobiographie étant ici mise au service d’un sujet historique, Davodeau évite facilement plusieurs écueils du genre. De plus, en étant centré sur la famille, l’album prend une dimension supplémentaire et devient presque un hommage critique mais plein de tendresse de l’auteur à ses parents. On est habitué à ce genre de thème au cinéma, mais il reste relativement inédit en BD. Une fois de plus, Davodeau défriche des terrains inexplorés, et le fait d’une manière très convaincante et très intéressante. Cerise sur le gâteau, Davodeau reste un auteur engagé, qui a des convictions politiques et qui ne peut rester muet face à l'injustice sociale. On est donc très loin des BD dont le but n'est que de divertir son audience, en passant sous silence les problémes de la société. Bref, il faut absolument lire « les mauvaises gens », pas seulement pour en savoir plus sur le syndicalisme en milieu rural et catholique, mais aussi pour découvrir un nouveau ton et de nouveaux sujets en bande dessinée, un média qu’Etienne Davodeau contribue à faire grandir et à rapprocher de sa maturité. Un livre indispensable dans la bibliothèque de tout bédéphile!