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« Journal d'un défaitiste », par Joe Sacco. Chez Rackham.
Un album de Joe Sacco n'est jamais un livre anodin. Ou une BD de plus dans le paysage. Avec Crumb (le père des undergroud US !), Adrian Tomine, Joe Matt ou Chester Brown, il incarne les auteurs de la scène « off » Outre-Atlantique. Mais il y a quelque chose d'unique chez Sacco, qui le rapproche peut-être davantage de Spiegelman que des précédents : sa vision politique du monde. Dans « Journal d'un défaitiste », le reporter BD qui s'est rendu célèbre à travers ses journaux dessinés en reportage à Gorazde et en Palestine passe au second plan. Mais pas autant que dans « Le rock et moi », son précédent ouvrage traduit en français chez Rackham. Ici, on est presque constamment dans la sphère de l'engagement politique, très à gauche, pour ne pas dire radical, de l'auteur. Avec un ton sardonique, volontiers second degré, plein d'ironie sur lui-même et sur le monde, ces petites histoires glanées au fil des ans constituent en quelque sorte la vision de Sacco sur ses contemporains. On est surpris par l'humour qu'il met dans le désespoir, par l'émotion qu'il peut distiller parfois (comme dans « Plus de femmes, plus d'enfants, plus vite », un long récit inspiré des souvenirs de sa mère, à Malte, durant la deuxième guerre) et par le côté fouillis, voire fourre-tout de ses histoires. Bavard, parfois jusqu'à l'écoeurement, le reporter dessinant est ici davantage un artiste engagé, tourmenté et en continuel questionnement graphique. On conseillera plutôt « Gorazde » ou « Palestine » pour pénétrer son univers et ce « Journal d'un défaitiste » à l'humour souvent noir pour aller plus loin.
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