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« La voix de son maître », tome 1 de « Fats Waller », par Igort et Sampayo. Chez Casterman.
Beaucoup de bonnes surprises, ces derniers temps, dans la collection « Un monde ». Et celle-ci n'est pas la moins agréable. Il peut y avoir chez le lecteur une sorte de réflexe pavlovien à la lecture de signatures connues. Un peu comme le chien qui se met à saliver, on fantasme à la simple idée de voir deux noms s'associer. J'avoue que ce fut mon cas ici. Igort, c'est un trait magistral et une mise en page toujours novatrice que l'on a heureusement redécouvert en France grâce au « Sinatra » des éditions Amok, avant le superbe « 5 est le numéro parfait » de Casterman. On avait presque oublié à quel point ce dessinateur italien très présent dans les années 80 était élégant et essentiel. Quant à Sampayo, son nom évoque inévitablement les albums qu'il a réalisés en compagnie du génial José Munoz. Bref, cette association momentanée a tout pour séduire. Et Casterman ne s'y est pas trompé, couchant cette histoire sur un papier ivoire, avec un luxe d'impression qui en fait d'emblée un objet magistral. Sampayo joue avec la musique, avec le temps, avec l'espace tout au long de ce premier volume. Igort le suit. Tantôt il propose un dessin proche de celui que Mattotti adopte dans ses projets noir et blanc (on pense à « Stigmates »), tantôt il apure les lignes jusqu'à la stylisation la plus parfaite. Certaines trouvailles visuelles valent à elles seules la lecture de ce livre, comme l'idée du labyrinthe en fondu enchaîné avec la croix gammée. Bref, tout cela tient parfaitement ses promesses. Ce livre est une symphonie, il parvient à vous faire oublier qu'il lui manque la bande-son et vous emporte sur ses portées musicales dans un univers qui échappe à la logique narrative habituelle. C'est désarçonnant. Pas toujours aisé. Mais Sampayo ne nous a jamais habitué à autre chose.
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