Jolies ténèbres

Les 10 commentaires sont triés des plus récents aux plus anciens .



10. larry underwood - 12/12/09 16:41
mon avis posté sur bdgest lors de la sortie du livre :

On peut interpréter ça comme un pur conte de fée selon Betteilhem (orth ?) avec une approche psychanalytique : tous les personnages sont les centaines de caractères d'une fillette soudain libérés à sa mort accidentelle en forêt. Les plus faibles, les plus enfantins, les moins dominants sont rapidement évacués, et vont s'affronter les personnalités majeures : le "moi" (Aurore... elle dit elle-même en lisant le nom sur le cahier "eh ben Aurore, c'est moi") est le caractère dominant, c'est l'enfant brave et dévouée, empathique et douce, qui rêve du prince charmant tout en veillant à agir pour le bien du plus grand nombre, elle est à la fois maman, soeur et amoureuse (pas amante) mais de façon idyllique, comme une fillette se représente sa propre mère. La sexualité est absente (la rouquine adulte, qui incarne selon moi la femme libre fantasmée par la fillette, est vite évacuée pour venir plus tard au secours de Aurore lors de son exil). Au milieu de ce bouillonement, tous les défauts et qualités s'opposent et s'éliminent sans penser à mal : Pim notamment, personnage d'abord très positif (le petit sidekick rigolo façon Disney), devient finalement l'égoïste fainéant et lâche ultime, machiavélique et opportuniste comme un enfant peut l'être, indépendamment de toute notion de morale propre à l'univers des adultes. La princesse-peste, qui ricane avec ses copines-servantes sur le dos des plus faibles, est le côté garce/centre de l'univers de tout individu (ça marche aussi pour les garçons, remplacez "garce" par "petite brute") : elle attend patiemment son heure pour régner sur un royaume désert (le vide se crée autour d'elle à mesure qu'elle envahit des lieux plus confortables), indifférente à la souffrance, à la détresse et à la pitié : elle est celle que la fillette aurait pu devenir. La morale de l'histoire, très dure et très réaliste, nous enseigne que pour grandir, accepter d'entrer dans le cycle du temps qui s'écoule, il faut faire des sacrifices terribles, renoncer à la naïveté sans devenir insensible, vaincre son égoïsme et ses fantasmes de domination, pour finalement trouver un équilibre serein au sein d'un lieu paisible où l'on est en paix avec soi-même (cela implique de savoir abandonner en arrière les personnes qui nous freinent ou nous corrompent, parfois blesser sans le vouloir d'autres qui comptaient sur nous (la fille aux lunettes de la fin, qui me semble clairement être l'archétype de la copine d'enfance que l'on jure d'aimer toujours et que l'on oublie une fois au lycée...), et surmonter la solitude en s'entourant de ceux que l'on a choisis.)

Mais tout cela n'est qu'une interprétation : le livre, lui, n'est que poésie.


ps : pour la souillon à demi-folle qui vit dans le crâne, je la vois comme la peur primitive de grandir... elle est sale, se nourrit de larves (comme un enfant veut goûter les vers de terre ou un bébé qui porte à sa bouche tout ce qu'il trouve), ne parle pas, agit de façon incohérente et rêve de l'enfant qu'elle était. Elle est l'Angoisse de vieillir, le désir de rester pour toujours un bébé insouciant qui mange/dort/rêve.

9. longshot - 12/12/09 16:29
On dirait qu'il y a autant d'interprétations que de lecteurs...

Je viens de le relire, sans pouvoir parvenir à une conclusion cette fois encore.

Dans les références, en plus de peau d'âne et du Prince charmant, il y a sans doute les garçon perdus de Peter Pan dans la petite troupe qui suit le Prince.

Pour le reste, je ne suis pas du tout d'accord avec lien sur la gentillesse qui ne serait qu'un vernis et sur le comportement d'Aurore. (Attention SPOLIER) Même si elle en vient à tuer, elle ne le fait que pour se défendre (Fin du SPOILER.) Je doute fort qu'il faille y voir une critique de la société et encore moins de la blogosphère, ce serait vraiment tiré par les cheveux.

Quant à l'interprétation, je suis un peu entre la deuxième et la troisième explication données par Ro : je ne peux pas m'empêcher d'y voir une sorte de conte initiatique sur le passage à l'âge adulte, ce qui est je le reconnais très paradoxal puisque la fillette est morte. (Attention SPOLIER) Le fait que l'histoire se termine sur Aurore, à présent seule mais dans l'attente de son nouveau Prince charmant est peut-être lié à ça, puisque Aurore - la fillette - ne grandira vraiment jamais. (Fin du SPOILER.)

À ce propos, je pense effectivement que le personnage d'Aurore représente bien le "moi", comme dit Ro, d'Aurore, le fait qu'elle se nomme ainsi, et qu'elle soit sortie du corps par la pupille me paraît assez clair.

Mais plus que des concepts psychanalytiques (le moi, le ça, le surmoi et je ne sais quoi), je crois que beaucoup des petits personnages représentent soit des facettes de la personalité de la fillette (en particulier, en lien avec les âges de la vie), soit ses souvenirs/perceptions d'autres enfants ou de personages plus ou moins rêvés comme ce fameux Prince. Dans cette interprétation, Jane serait l'adolescence (indépendante, un peu rebelle, et manifestement plus âgée), la fillette qui se cache dans le corps, le bébé ou la toute petite enfance qui ne veut/peut pas quiter le sein maternel, la géante qui resemble à une poupée de porceleine la petite enfance...

Le Prince, c'est tous les amoureux qu'on peut avoir, mais il est complètement inconsistant, il conte fleurette à toutes les filles, il pourrait être un souvenir d'Aurore.

Après, il y a des persos plus difficiles à cerner.

Plim, peut-être un jouet / ami imaginaire ? Il resemble à un playmobile, je trouve. C'est aussi un des personnages les plus dérangeants. C'est un garçon, donc il peut difficilement passer pour une facette de la personalité d'Aurore, pourtant c'est un personnage complexe, qui évolue au fil des pages, là où les autres se résument souvent à un trait de personnalité. Peut-être un petit frère ?

Le personnage de Zélie semble incarner tous les mauvais penchants (cruauté, égoïsme, duperie, hypocrisie...). Le côté sombre d'Aurore ? Ou sa meilleure amie, avec qui elle se serait disputée ? Sa mère, ou une image d'elle-même adulte ?

Le personnage du "géant" reste pour moi très mystérieux - je doute qu'il s'agisse de son père ou d'un proche. Il vit trop près de l'endroit ou gît le corps pour celà. J'aurais plutôt tendance à y voir l'assassin, mais il n'aurait quand même pas abandonné le corps, sans même chercher à le dissimuler, donc cette explication ne me convainc pas non plus. Et puis je n'arrive pas à comprendre ce qu'il fait à son bureau, ça a l'air d'un travail de précision (fabrication de mouches pour la pêche ?), qui me paraît un peu bizarre dans ce décor de cabanne perdue. Je me demande en fait s'il est réel, et si ce ne serait pas l'image mentale du père de la fillette, lui aussi sorti de son corps.

Enfin, sinon, oui, morbide, noir, qui met mal à l'aise... Le rêve en particulier au millieu de l'album est assez glaçant. Je n'arrive décidément pas à arrêter mon opinion sur cet album.

8. Ro - 12/12/09 13:11
J'ai été subjugué par cette BD lorsque je l'ai lue à sa sortie. Terriblement déstabilisé, j'ai adoré et en même temps je me suis senti mal pendant plus de 24h après l'avoir terminée. Senti mal, mais en même temps émerveillé. Bref, je l'ai très rapidement cataloguée comme oeuvre culte de mon petit panthéon personnel.

Comme je l'ai écrit par ailleurs, je crois surtout qu'il y a plusieurs explications possibles au contenu de cette BD.

Première explication, la plus simple :
Imaginez de petits personnages de contes de fées et d'imaginaire enfantin lâchés dans la vraie nature. Imaginez-les avec un état d'esprit qui n'arrive pas à se décoller du simple jeu, du monde où rien n'est grave dans lequel vivent les enfants. Ce sera alors un vrai massacre quand ils seront confrontés à la dureté du monde réel, mais ce sera aussi très instructif sur la révélation des tares et des vilénies que cachent certains esprits et certains comportements enfantins ou imaginaires.

Deuxième explication :
Ces personnages qui disparaissent au fur et à mesure représentent les parts de l'esprit et de l'imaginaire de la fillette qui disparaissent au fur et à mesure après sa mort. L'âme de la fillette s'efface tandis que son souvenir disparait de la surface de la Terre.

Troisième explication approfondissant la deuxième :
l'ordre de disparition de ces parts de l'esprit de la fillette suit une logique (Freudienne ou non), ça, surmoi et à la fin ne reste que le moi. Avec une notion spirituelle d'âme/moi qui survit et reste vivre auprès de l'homme solitaire qui est peut-être finalement le père de la fille (ou simplement un proche) à qui elle manque et qui pense encore à elle.

Je suis sûr qu'il y a encore d'autres façons d'interpréter le récit.

7. Lien Rag - 11/12/09 22:30 - (en réponse à : pas mal de spoilers)
Heu Crabouf tu connais le proverbe (censé être chinois) qui dit que "si tu cognes ta tête contre un pot, et que ça sonne creux, ce n'est pas forcément le pot qui est vide"?
Parce que autant Dufaux comme scénariste surestimé, complaisant à lui-même, et spécialiste de la création d'ambiances souvent creuses (malgré quelques réussites - j'aime beaucoup le tome 3 de Jessica Blandy par exemple) est habillé pour l'hiver, autant dire de Jolies Ténèbres que c'est une BD vide dénote un sacré manque de jugement...

Cela dit je voulais justement demander aux lecteurs plus sagaces que moi de quoi parle cette BD.
Certes, c'est un conte, la référence à Peau d'Âne au moins (sur laquelle la dernière image insiste) et au Prince charmant le montrent bien. Quelqu'un parlait d'un "conte à l'envers" puisque commençant par la mort, je trouve l'idée intéressante mais ai du mal à aller plus loin.
C'est aussi une claque magistrale adressée à Pénélope Bagieu et à ses lectrices, à toute la prétention actuellement dominante à une "gentillesse" dont JT démontre qu'elle n'est rien de plus qu'un vernis.
La décomposition du corps social accompagne la décomposition du corps physique, c'est très réussi mais je ne suis pas sûr d'en comprendre la signification.
Le rapport avec les animaux est trés important, et la scène du banquet est le pivot du livre, et trés bien mise en scène. Mais quelle est sa signification?
Les divers commentaires parlent tous de "la nécessité d'organiser la survie" pour la petite communauté, mais cela montre surtout que les lecteurs ont forcé la lecture avec leurs propres préjugés plus qu'ils n'ont lus l'oeuvre. Ce qui frappe en effet est le quasi-total désintérêt des héros de Jolies Ténèbres pour la survie au-delà de l'instant immédiat. Même Aurore fait surtout semblant pour être en accord avec l'image qu'elle veut avoir d'elle-même, et qui est son principal (voir exclusif) centre d'intérêt, ce qui me faisait justement renvoyer à Pénélope Bagieu plus haut. Description des couches dominantes occidentales dansant au bord du gouffre (vieux thème de la peinture de la Renaissance)?

6. longshot - 11/12/09 19:16
Hmm, c'est un bouquin qui m'avait laissé un peu perplexe, mais il faudrait que je le relise pour en dire plus.

5. herve - 10/12/09 22:21 - (en réponse à : O.)
Pour moi, c'est UNE des bd incontournables de cette année. Un must donc.

Voici ce que j'avais rédigé à la sortie de l'album:

Voici une bande dessinée que j'ai lue et relue trois fois depuis son achat, et sur laquelle j'ai du mal à m'exprimer tant le sujet est fort.

C'est en effet une véritable claque, une bombe évidement à ne pas mettre entre toutes les mains.

L'objet éditorial en lui-même est superbe : une belle jaquette représentant une scène champêtre voire bucolique : une petite fille dort dans l'herbe !
Que nenni, Fabien Velhmann et Marie Pommepuy nous ont concocté un conte macabre, cruel, parfois gore, sordide et..., bon j'arrête là les adjectifs tant on sort dégouté de cette histoire, même complètement retourné tant le décalage est fort entre le dessin (presque de l'illustration de livre d'enfant) et la cruauté du récit.

Le scénario n'explique pas tout, et c'est d'ailleurs une volonté des auteurs. Qu'est-il arrivé à cette fillette, qui est l'homme habitant la forêt (son père, son assassin, un quidam ?), qui sont ces étranges créatures sorties du corps d'Aurore (pour ma part, je pense qu'il s'agit de la production de son cerveau, de ces histoires que se racontent les petites filles... mais cela n'engage que moi) ? Mais c'est au lecteur d'imaginer le passé et la suite de cette aventure.

Un récit qui, au fil des saisons et de la décomposition du corps (tiens cela me fait songer au poème de Baudelaire intitulé Une charogne, lisez-le, vous verrez) nous met mal à l'aise, voire nous répugne mais bon sang que c'est réussi !

Une excellente bande dessinée,
L'évènement de ce trimestre.


j'avais mis la note maximum.



4. Odrade - 10/12/09 21:29
Crabouf... Je ne sais pas. Ca m'a quand même disturbée. C'est suffisamment étrange et décalé pour justement pas être un livre à oublier vite.
En tout cas pour moi.
C'est à la fois bizarre et profondément morbide. J'aimerais bien savoir ce que les auteurs ont voulu dire/ressenti en le faisant.

Et c'est pour ça que je demande vos avis.


O.

3. PierreCédric - 10/12/09 20:28
Il faut absolument que je me souvienne de lire ceci, je vais d'ailleurs le noté voilà!

2. Crabouf - 10/12/09 18:33
J'en pense "beaucoup de bruit pour rien". Un peu ennuyeux à lire, ça veut faire croire que c'est profond, mais c'est surtout vide.

1. Odrade - 10/12/09 18:24
Je viens de lire.

Sentiments très mélangés. Dans le genre mélange d'horreur, mais quand même envie de continuer à lire. C'est enfantin et épouvantable.

Drôle d'histoire.
Un rêve ?

Vous en avez pensé quoi ?


O.



 


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