Les 6 critiques de nemOrtel sur Bd Paradisio...

Trait de craie par nemOrtel
Je vais faire plus long que Coacho (!!!!!!) pour une fois, et tenter de donner un avis rationnel sur un album qui, à mon humble avis, ne l'est pas. Mais l'amour l'est-il ? Ca tombe mal, j'aime cet album. Prado nous emmène, telle la craie sur le tableau bleu de l'océan, vers cette île inconnue, ce caillou blanc oublié par un poucet. Et nous y voilà, sur cette île étrange où rien ne se passe, où rien ne semble devoir, pouvoir se passer. Et pourtant, ici on tue. Le temps surtout. Ici on aime. Ici on oublie la raison, les raisons, on oublie pourquoi on est venu, on oublie... quoi? Les pages se tournent seules, comme une mécanique d'horloge. Tic-tac, tic-tac, tic-tac, ticaticatoucaticaticatoc, le temps se débloque, et le monde devient fou. Un jour on méprise, une nuit on appelle au secours. Et puis, tout ça est emporté par le vent, comme la craie sur un tableau noir. Peut-être n'y a t'il rien à comprendre, au fond. Peut-être Trait de craie n'est-il qu'un poème graphique, mélancolique, sur le décalage toujours plus grand entre la nostalgie d'un moment blessant, et le temps qui s'en écoule. Qui s'écoule, jusqu'à l'océan. Mélancolie d'un moment précis, où tout peut changer, où tout change parfois, parfois jamais. Mais toujours, les regrets. Blancs comme la craie. Et pour trouver la bonne lumière sur cette île qui fait tourner les têtes, mieux vaut monter en haut de son phare éteint. Et de là, embrasser l'océan du regard, en se demandant si ce n'est pas là, le seul endroit clair de l'aiguille qui ne bouge pas. "Inutile phare de la nuit..." Comme cette inscription à la craie, sur le mur jetée : "between the sky and the sea". Je reviendrai l'année dernière, sauf si j'oublie.
Mouais, pas mal. Voilà ce que j'ai pensé en mon for intérieur en refermant cette bédé. Alors ouiiiiii, l'ambiance est chaleureuse, on entendrait les cigales en tendant l'oreille. Mais non. Je ne sais pas, il me manque quelque chose, un souffle de sincérité pure, une corde vibrante, une note d'absolue vérité qui résonnerait à chaque page. Or elle ne résonne pas, cette note. Pas comme dans le Combat ordinaire, par exemple. Eh oui, si l'album était sorti en 99 ou 2000, je ne dis pas, mais après le chef d'oeuvre de Larcenet, toute tentative de bédé sincère est impitoyablement triée. La barre est très haut, les gars! Nous verrons avec le 2e album, qui ne devrait pas tarder, si les divers indices semés par le scénariste écloreront telles les perce-neige dans le dégel printannier. Ceci dit, c'est vrai qu'elles sont belles ces couleurs, elles sont chaudes. Mais le dessin! Non, ça ne suffit pas. Ou peut-être là où le regard n'importe pas.
Qu'en penser? Ouais, bof, pas plus que ça en fait. Je trouvais le Troisième testament intéressant et magnifiquement illustré, malgré un côté racoleur agaçant (voir la quatrième de couv' du premier tome), mais on est bientôt plongé dans des abysses de facilité. Le premier tome était sombre et inquiétant, un poil trop théatral même. Je pense à la crypte secrète, un peu trop fantasmée. Passons, bon album, bon rythme. Le 2e est le plus beau, Tolède y est magnifique et la bibliothèque est une pure merveille graphique. Et puis quelle aventure! Le troisième tombe déjà dans l'Indiana Jones, avec un scriptorium limite sataniste et les explications du mystère par un jeune moine prodige, qui m'ont passionné à peu près autant que les cours de math de mon adolescence. Et je ne parle pas du pont des Templiers, véritable ratage scénaristique, on n'y croit pas une seconde. Même la fin est plus crédible. Enfin ça reste une bonne bd. Mais ce quatrième tome! Non, vraiment, seul le dessin sauve le tout. Encore que la couverture est ratée à mon goût. Mention spéciale à la fresque de la bataille de Jerusalem par contre. Non, je ne sais pas, comment montent-ils tous sur le glacier? On ne sait... Pour finir, l'astuce scénaristique de ne pas révèler ce qu'est le 3e testament est bien trouvée, mais comme on ne nous donne pas d'indice sur son propos (Nahik?), tout cela sent un peu l'arnaque gentille. On est frustré (une suite?)! Allez, c'est pas mal quand même, soyons chrétiens.
Janus est un de ces albums qui surprennent son monde. On se le fait conseiller, on le voit sur un rayon, on l'attrape mollement, on l'ouvre (CRAC!), on jette un oeil désabusé, et puis...bling ! Tiens ? Mais il sympa ce dessin, elle est marrante cette réplique, qu'il sont rigolos les deux avec leur duel à l'épée là. Et puis on finit par louper son arrêt de bus, ou le feu rouge si on est un gros pollueur qui pue (ceci était un message écologique subliminal). On rentre chez soi en faisant des bruits bizarres avec la bouche : "mmmmtiens, m'attendais pas à ça mmmmmmmmmbrbbrrrrmmmmm c'est pas mal leur truc là mmmmrmmmrmbmmm vais le finir en mangeant des pistache smmgmtmrgmrmgrm". Après, on comprend. On comprend qu'une bonne bd c'est pas juste des effets (de manche), c'est d'abord une bonne histoire, bien racontée, avec de l'humour intelligent (trop?), un rythme branché sur celui du coeur, et des bouilles qui parlent à l'histoire. Avec un grand V.
L'angoisse. Y'a-t'il une chose pire qui puisse arriver à un individu normalement constitué, avec une histoire des plus banales, dont la vie est comme la surface tranquille d'un étang, que d'avoir des crises d'angoisse? C'est pourtant ce qui arrive à Marco. Solitaire, morbide, sa vie est d'un ennui dans lequel il se complait, interrompue métronomiquement par des consultations chez son psy. On se dit : voilà encore un album intimiste qui se veux sensible, mais où on finit déprimé, tellement on y retrouve les "angoisses" que l'on connait chacun. Mais non, Larcenet réussit là un tour de faiblesse magnifique. Dès le départ, chez le frangin, avec un humour tout en contrastes fait onduler notre coeur du malaise à la joie, sans jamais s'attarder indécemment ni sur l'un, ni sur l'autre. La maîtrise est totale, les personnages attachants, même Adolf, ce con de chat, finit par me faire rigoler avec son foutu caractère. Car chaque pion de Larcenet à sa place dans ce microcosme. Et finalement, tout s'emboîte dans une harmonie. Une vraie sagesse, qui donnerait presque envie de vieillir avec une Emilie. Et là je m'adresse aux mecs : quand on découvre Marco, on commence par le plaindre, puis on le comprend, et enfin on se reconnait un peu en lui. Et on se rend compte qu'on l'aime bien finalement, ce pauvre type. Tiens? Je n'ai pas dit que le dessin était génial en plus. Bah... GeoooOOOooorges! Frchhh! DES GROS PETARDS!
J'adorais la SF de Jodo depuis l'Incal. J'écris à l'imparfait car depuis le 5e tome des Méta-barons et Megalex, je suis devenu très frileux. Jodorowski a pris cette détestable habitude de détruire consciencieusement des scénarios qui commençaient très fort, et où sa narration était passionnante. Janjetov, je connais depuis Avant l'Incal, première édition. Et j'aime bien ce dessin original et sincère. Les Technopères est un spin-off de l'Incal. Bien. Mais le niveau en est bien en-deçà. Pas bien. La destinée d'Albino est intéressante en soi, mais Jodo use de ficelles narratives usées jusqu'à la corde, et c'est dommage. Quant à l'intrigue parallèle de sa mère, Panepha, elle est devenue au fil des albums un bouche-trou que je trouve un peu lourdingue. Le niveau y était tombé au plus bas au troisième album, on nous parlait d'amazones préhistoriques qui envoient des bulles dans l'espace pour capturer des vaisseaux spacieux, et combattent des lasers à la massue. Pathétique. Cette fois, le cycle de la vengeance de Panepha est achevé, et c'est tant mieux. Il semble hélas qu'un autre commencera au cinquième album. Nous verrons bien. Le destin d'Albino rebondit bien. On entre enfin dans le vif du sujet avec son accession à la caste Techno dominante. Jodo abuse toutefois toujours d'Ex-machina excessifs, mais de manière plus pondérée que dans l'album précédent. Le suspense est (un peu) revenu, du moins sur son passé. Son présent est toujours d'une platitude navrante, avec un voyage spatial d'un ennui aux dimensions cosmiques. Pour ce qui est du dessin, Janjetov est toujours excellent, et a enfin réussi à imposer à ses personnages une dynamique gestuelle convaincante. En revanche, et c'est là un critère de goût j'imagine, je suis navré du mélange de sa technique d'encrage "à l'ancienne", en points et traits, avec les couleurs informatiques de Beltran. Pour moi, sur certaines cases en particulier, les résultat est catastophique. On peut y trouver un charme, moi pas. Mention spéciale à Beltran pour la couv', qui est superbe, on dirait une pochette version dark des Pet Shop Boys meilleure cuvée. Et jettez un coup d'oeil à la quatrième! Il a reprit presque trait pour trait l'Etoile de guerre de Moebius dans l'Incal, mais en synthèse. C'est digne d'une affiche! Conclusion : un album qui ôte pour moi le pied que cette série avait mis dans la tombe où croupissent les Métabarons et Megalex. La tombe des oeuvres inachevables achevées. R.I.P.

 
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