Les 11 critiques de b1p sur Bd Paradisio...

Hurlevent par b1p
Cela faisait bien longtemps que je n'avais plus lu une bédé qui provoquait une telle réaction de rejet chez moi. Le "Hurlevent" de Deleers et Leclercq a pour lui un parti-pris graphique bien étrange, et à priori intéressant: une utilisation très monotone des couleurs et le réalisme du trait qui donnent l'impression assez nette de lire un roman-photo. Les paysages et les visages donnent l'impression d'être un copié-collé de la réalité. Ce n'est pas forcément synonyme de médiocrité, que du contraire. Mais ici, le traitement donne un résultat figé comme on en a rarement vu. Passons sur le scénario-alibi intello auquel on a bien le droit de ne pas adhérer et terminons par le traitement des personnages à la psychologie de pacotille et au rélexions cérébrales sur le rapport entre oeuvre et passion. De la passion, dans ce livre, il n'y en a pas (et ce n'est pas l'épisode lesbien qui nous fera changer d'avis), sinon celle du dessinateur pour sa technique. Casterman l'a bien compris qui en rajoute une couche dans la description du processus de conception graphique. Mais vu le résultat, on s'en serait bien passé. Comme on se passe assez facilement de la bédé d'ailleurs.
Voilà un album qui vient enrichir de belle manière la désormais grande tradition Delcourt. Des meurtres sanglants, du surnaturel, un dessin extrêmement soigné, un scénario qui se tient sans être renversant d'originalité. Le plus marquant dans cet album étant sans doute la langue utilisée qui nous ramène au début du siècle passé. C'est peut-être aussi le parti-pris le plus discutable de l'album : ces expressions d'un autre temps rendent la progression un peu difficile alors qu'on aurait peut-être eu besoin de plus de fluidité pour adhérer à une histoire un peu tirée par les cheveux. Mais ne boudons pas notre plaisir : voir des planches aussi bien dessinées n'est pas donné tous les jours. Et il faudra sans doute donner à l'histoire le temps de se développer pour qu'elle révèle sa vraie profondeur. Un bien bel album, donc.
Première constatation : le dessin n'est pas banal. C'est lui qui m'a fait m'arrêter devant l'album alors qu'à priori la SF et l'anticipation, c'est pas mon trip du tout. Mais peut-on résister quand le dessin est tellement personnel et abouti ? NON ! Gajic fait partie de la cours des grands. Le trait est précis et assuré, les personnages expressifs, et l'impression de mouvement, le rendu de la vitesse est époustouflant (superbe utilisation de l'ordinateur, bravo !) Quant au contenu, ça doit être de la SF standard (je sais pas je suis pas un fan du genre comme je l'ai déjà dit), mais ce qui fait le charme du truc, c'est que c'est suffisamment dense pour ne pas se donner tout de suite. D'ailleurs, à la fin, on n'a toujours pas tout compris, et on attend le tome suivant avec beaucoup d'impatience (apparemment, c'est ce même manque de clarté que d'autres lecteurs détestent, comme quoi ceux qui aiment et ceux qui détestent sont d'accord sur la raison).
Eh ben ! Depuis le temps qu'on l'attendait cette suite ! Plus de 5 ans, en fait ! C'est dire si on appréhendait ça avec angoisse. Autant d'années d'attente et on aurait été déçus ? Pas du tout ! Le 2e tome se hisse haut la main à la hauteur du 1er. Peut-on dire quelque chose du dessin de Cassegrain ? Tout ce qu'on pourrait dire ne serait que dérisoire. Il est magnifique, et je pèse mes mots. Même si la technique a évolué, le trait est là, totalement ébourriffant, au service d'une histoire mélangeant toujours aussi abilement aventure, humour, dépaysement et opposition un brin salace entre les deux sexes. La réelle question est ailleurs : pourquoi avoir casé ce chef-d'oeuvre dans la collection "Série B". C'est un peu comme mettre au même niveau les Indiana Jones de Spielberg avec les Aventures d'Alan Quatermain. Or, Tao Bang n'a rien à voir avec une pâle copie mais servirait plutôt de référence à laquelle toute bd d'aventure fantastique et vaguement orientalisante ferait bien de se raccrocher. Vivement la suite des aventures de Norden, Tao Bang, le Chauve, la Marée Galante et les autres... Et j'espère ce fois qu'il faudra attendre un peu moins longtemps.
Voilà une bd excessivement étrange, à tel point qu'on peut se demander si "bd" est le mot qui convient. Au terme de la lecture, ce qui me vient à l'esprit serait plutôt la notion de "poème", un long chant mythologico-maladif, un récit fait de contemplation et de douleur de la psyche, un peu comme ce qu'a pu écrire Fernando Pessoa (toute proportion gardée). C'est clair, cette bd ne pourra pas être lue par tout le monde, seuls les lecteurs prêts à se laisser emporter par les dimensions oniriques de l'histoire se laisseront prendre. Personnellement, j'étais prêt au voyage, et je n'ai pas été déçu, que du contraire. Une bd qui figurera en bonne place dans ma bédéthèque..
Une adaptation de Jules Verne au dessin absolument somptueux. Je m'empresse d'écrire ce mot pour éviter que cette bd reste confidentielle. Elle sort chez un éditeur discret mais elle surpasse de beaucoup par sa beauté plastique ce qui sort d'habitude en bandes dessinées. Pour donner une comparaison qui dira (malheureusement) peu de chose à la majorité des bédéphiles, le dessin me fait penser au Pontarolo de "Naciré et les Machines". Quant à l'histoire, disons qu'elle est menée tambour battant et qu'à un rythme pareil elle a peu de temps pour installer son athmosphère. Mais peu importe. La beauté plastique du dessin suffit à faire de cette bd un objet exceptionnel.
Bon. Tout d'abord, une mise au point : je ne suis pas du style à reculer devant la lecture d'une bd à haute densité. C'est donc confiant que j'ai entamé la lecture des "Témoins Muets". En matière de densité, je dois dire que cette bd atteint de hauts sommets et qu'il est bien difficile de suivre le cours de l'histoire tant les digressions ainsi que les noms fusent. Pourtant, le sujet est extrèmement intéressant : le devenir de la Pologne et de son peuple, coincés entre le National-Socialisme de Hitler et le communisme (voire le stalinisme) russe, les purges, les massacres, les charniers, la quête d'une identité au delà de toutes les horreurs subies. Au fil de l'histoire d'une famille polonaise, c'est bien l'Histoire qu'on apprend à connaître. J'aurai juste un doute sur la forme qu'il fallait donner à l'essai pour tenter d'évoquer la noirceur de l'Histoire. Les textes sont trop éclatés à mon goût pour qu'on puisse suivre, et les dessins sont, je trouve, trop esthétiques (tendance art nouveau morbide ?) et trop statiques pour émouvoir comme il le faudrait.
Y a pas à dire : Pontarolo a une patte qui n'appartient qu'à lui (à ma connaissance). Néanmoins, il y aurait un petit bémol du côté du scénar : sans vouloir dévoiler le pot aux roses, il me semble tout de même que le dénouement ressemble pas mal (voire plus) à la fin de Naciré et le Machines. De plus, ce tome s'essaye à un romantisme un peu trop appuyé à mon goût, mais peut-être ne suis-je pas assez fleur bleue...
Pour le néophyte qui n'a aucune idée de l'existence de Stryges et compagnie, le dessin de Charlet était déjà un excellent argument d'achat pour Le Maître de Jeu. Il l'est encore plus ici. Le dessin a acquis une réelle homogénéité, une élégance, une unité dans les couleurs qui tire un trait sur l'aspect parfois visuellement décousu du Maître. Mais l'essentiel de la réussite n'est pas là. Charlet a eu le nez fin en ancrant son récit dans un monde certes futuriste, mais qui ressemble furieusement au nôtre, avec son érosion des libertés individuelles au profit des campagnes sécuritaires. La sortie de cet album en pleine question Sarkozi en France et en pleine polémique Duquesne/Flahaut en Belgique tombe à pic. En plus, l'ombre menaçante de deux tours mystérieuses plâne sur l'histoire dès la couverture, et on se demande dès le départ quelle folie destructrice s'y cristallisera, comme s'est cristallisée dans les mémoires la date funeste du 11 septembre. C'est que l'album prend d'emblée une couleur inquiétante. Certes, les héros ressemblent aux jeunes middle-class standards (dont je fais partie), inquiets de l'avenir, et qui cultivent leur petite bulle sécurisée au milieu de la folie du monde, en se réfugiant dans leur imaginaire et le divertissement, avec leur dose de désinvolture, et pour tout dire de fragilité. Mais à l'intérieur du héros principal semble dormir une force incontrôlable au moins aussi menaçante que la violence à laquelle elle entend s'opposer. Et à la fin du premier tome, on n'est guère rassuré. On se demande avec anxiété si la force qui couve n'est pas un remède pire que la maladie, et si Gaël conservera pour nous son capital sympathie ou se transformera en être sanguinaire. Le tome deux devrait en tout cas être sacrément crucial. On verra si Charlet arrive à conserver son ambiance de conte pour adulte, où l'on suit Gaël et Carole alors que l'Ogre les guette dans la jungle urbaine, ou si la sauce retombera en prenant la forme d'un manifeste très premier degré (du style Gaël le Sauveur contre la Dictature). En attendant, une chose est certaine : le tome un est une réussite riche de promesses.
Warramunga par b1p
Je ne saurais dire ce qui me plaît exactement dans les albums de Toppi. Ca doit être l'espèce de charme naturaliste qui s'en dégage, le sempiternel affrontement entre l'homme vil et vénal, et le pouvoir surnaturel des grands espaces. De ces histoires sur le fil, à fort contenu poétique, se dégage une atmosphère apaisante empreinte de simplicité. Le trait de Toppi y est aussi pour quelque chose, bien sûr, quoique je me demande parfois pourquoi ces traits noirs sur fond blanc me font un tel effet. Ce n'est certainement pas pour leur académisme : avec Toppi, pas ou peu de considération pour les pleins et les creux, pas de soucis de rendu de volume. Et, pourtant, ces hachures aléatoires, ces membres jamais totalement dessinés ajoutent à la poésie de l'ensemble, délaissant les considérations tridimensionnelles pour en revenir au remplissage plane et naturel du papier. Et Warramunga n'échappe pas à la règle.
Il faut que je le confesse, j'adore l'univers de Daniel Hulet, peuplé de créatures cauchemardesques et de chairs en décomposition. "L'Etat Mordide" incarne pour moi la quintescence de la BD, l'endroit où la BD touche à la perfection. Je me suis donc jeté dans la lecture de sa nouvelle trilogie avec exaltation. Et il faut bien dire que j'ai été déçu dès le second album. Le dessin atteint ici des sommets de beauté morbide, c'est indéniable, mais il me semble que le scénario n'est pas à la hauteur. Trop proche de "l'Etat Morbide" par moment, il n'a pas son intensité cauchemardesque, dérangeante et dérangée. La faute sans doute à un humour trop présent. Il me semble ici que l'histoire n'est qu'un prétexte aux expérimentations graphiques les plus échevelées. C'est peut-être la faute au format carré, peut-être la faute aux nouvelles collections de BD 'graphiques', en tout cas, la pirouette finale a un goût amer (ce n'est peut-être pas la première fois qu'on voit ce genre de fin, mais ici j'ai trouvé que ça déforçait l'ensemble des albums). De plus, l'ambition affichée de toucher à l'inconscient, à la peur de la mort, au repli foetal m'aura semblé particulièrement pédante et déplacée tant, à la fin, on a l'impression de n'avoir rien vécu d'essentiel, contrairement à ce qu'on nous aura sériné tout au long des trois albums.

 
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