Les 1231 critiques de Thierry Bellefroid sur Bd Paradisio...

Psybombe (L'histoire de Siloë) par Thierry Bellefroid
« Psybombe », tome 1 de « L'histoire de Siloë ». Par Le Tendre et Servain. Chez Delcourt.

Difficile de parler de cet album sans donner l'impression d'appuyer l'opération en cours sur ce site, en collaboration avec Delcourt. Mais voici tout de même mon sentiment après la deuxième lecture de ce premier tome. « L'histoire de Siloë » est incontestablement une bonne histoire. Que Serge Le tendre ait été en chercher des morceaux dans ses propres lectures ne fait guère de doute (lire l'interview des auteurs sur ce site pour en savoir plus), mais cela n'en fait pas une mauvaise BD. Après tout, tout le monde sait que Jean Van Hamme a intégralement repris les idées de départ de « La mémoire dans la peau » de Robert Ludlum pour créer XIII... ça n'en fait pas -loin de là- une mauvaise BD (je parle ici des premiers volumes... la suite me laisse plus sceptique, mais passons) Passé ce préliminaire, ce Siloë offre un monde cohérent et une histoire passionnante mêlant habilement les destinées de quelques personnages principaux à la fois consistants et très humains. Qu'il s'agisse de Norman, le journaliste, ou de Sid, le père de Siloë, ces personnages sont bien développés et font avancer l'intrigue sans jamais se faire oublier pour eux mêmes. Leur épaisseur est ce qui tient le scénario et l'empêche de tomber dans de la « résolution de problème donné ». Le Tendre réussit bien son entrée dans l'anticipation ; ses inventions et son univers sont crédibles, bien intégrés à l'histoire elle-même. Il faut dire que Servain sert efficacement le récit. Son dessin est fidèle à lui-même, ses découpages intelligents et surtout, ses couleurs très réussies. Pour quelqu'un qui réalise ses couleurs pour la première fois, Stéphane Servain propose en effet un résultat étonnant de maîtrise qui s'exprime jusque sur la couverture, très réussie. Vous l'aurez compris, je n'ai objectivement pas grand chose à reprocher à ce premier Siloë. Même sa longueur -exceptionnelle pour un album Delcourt- ne m'a pas semblé excessive.
« La loi du Grand Nord », tome 1 de la série Franck Lincoln. Par Marc Bourgne. Dans la collection « Bulle Noire » des éditions Glénat.

Derrière une couverture particulièrement laide et tapageuse (un profil de flic simiesque, arme à la main et une fille à moitié nue devant un âtre, ça devrait doper les ventes, non ?), le dernier né de la collection Bulle Noire laisse sur un sentiment peu flatteur. Franck Lincoln (on se croirait revenu à l'âge d'or de Tintin/Spirou, quand les héros s'appelaient Marc Jaguar ou Marc Dacier, Alain Chevalier, Bernard Prince et j'en passe...) réserve quelques bons moments à ses lecteurs. Mais ils sont finalement rares en regard des défauts de l'entreprise. D'abord, quand on chasse sur les terres de J-Ch Kraehn, la moindre des choses est de prendre clairement ses distances. Un type dont la femme a disparu cinq ans auparavant et qui est devenu détective pour reprendre l'enquête à son compte, ça sonne quand même très « Gil Saint André ». Heureusement, Bourgne arrête là la ressemblance avec la série phare de la collection. Heureusement aussi, il n'a pas oublié sa passion pour l'Alaska. Sujet de son mémoire de fin d'études (l'Histoire à la Sorbonne, s'il vous plaît), l'Alaska avait déjà servi de cadre à la BD « Etre Libre » qu'il avait publiée il y a trois ans chez Dargaud, avant de reprendre Barbe-Rouge. Et c'est vrai qu'on sent qu'il connaît son sujet. C'est même peut-être ce qui sauve cet album qui réunit pas mal d'ingrédients connus et qui a bien besoin de ce dépaysement géographique pour se mettre à exister. Jugez plutôt : la fille qui réclame la protection d'un détective parce que son ex lui court après... fille qui s'avère être toxicomane et avoir piqué de la dope à l'ex en question (sorry de dévoiler une part de l'insoutenable suspense), c'est pas ce qu'on a vu de plus original... Les fausses surprises se succèdent, les ficelles sont connues et pourtant, je dirais que ce Franck Lincoln se laisse consommer comme un film de série B. Il y a de la place pour tout le monde, tant dans le cinéma que dans la BD. Dès lors, il n'y a aucune raison de crier au scandale. Franck Lincoln est un détective de plus, mais ce n'est certainement pas le plus mauvais de tous. On regrette juste qu'il soit si prévisible. Quant au dessin, pas de quoi crier au génie (à de rares exceptions près, ce n'est pas le fort de Bulle Noire !) mais surtout, on regrettera que le coloriste Bruno Wesel, pourtant assez au point sur les séries d'André Taymans, ait raté cet album avec tant de talent ! Un tel manque de nuance et de goût donne la nausée. Des exemples ? Les planches 7 et 8, avec leur ciel orange comme vous n'êtes pas prêt d'en voir. La planche 16, sans autre commentaire. Et il y en a d'autres. Dommage, ça ne fait que souligner le côté racoleur de l'entreprise...
Vox dei (Alban) par Thierry Bellefroid
« Vox dei », le tome 4 de la série « Alban », par Dieter, Fourquemin et Voillat. Chez Soleil.

Exit les éditions « Le Téméraire », Soleil reprend donc la série Alban en cours de route et réédite en passant les trois premiers volumes. Ceux qui découvriraient ce petit moinillon et son cochon Orphéon grâce à cette réédition liront donc ce quatrième album tout juste après avoir avalé les trois premiers d'un coup... et seront fort surpris ! Il faut avouer que la série prend un tournant inattendu avec ce « Vox dei » à l'humour beaucoup moins présent. Plus adulte, plus grave surtout, cet épisode néglige le choc humoristique entre le gamin naïf et pur qu'est Alban et le reste du monde -forcément hostile- qui l'entoure. Cette fois, non seulement la violence est crue et parfois tragique (même si la rencontre avec le frère Emeric transformé en garou est teintée d'humour) mais en plus, c'est cette violence qui vient à bout du méchant de service ! Alban est ballotté au gré des événements et expérimente la défaite et l'impuissance. Mais rassurez-vous, il retrouve aussi quelques-uns de ces comportements qui font toute la saveur du personnage et de la série. Ainsi, il garde un calme olympien quand la moitié de ses assaillants se fait mettre en pièces par la malebête. Malebête à qui il se contente de dire : « je n'ai pas peur, j'ai déjà vaincu des centaures... » Le petit Alban ne nous avait pas habitués, en revanche, aux crises de doute métaphysique devant la violence humaine qui déconcerteront sans doute les lecteurs habitués de la série. Dieter aime surprendre, on ne peut pas lui en faire le reproche. Et ici, il y parvient.
Engrenages (Sillage) par Thierry Bellefroid
« Engrenages », tome 3 de la série « Sillage », par Morvan, Buchet et Color Twins. Collection Néopolis, chez Delcourt.

Un magnifique album. Une magnifique série aussi, d'ailleurs. Dans ce troisième tome, Jean-David Morvan arrive une fois de plus à nous étonner. Nävis, l'héroïne, surgit là où on ne l'attendait pas. Chacune de ses aventures est à la fois une suite logique des précédentes et un « one-shot », ce qui est malheureusement trop rare dans les séries actuelles. Quel plaisir de lire à chaque fois une histoire complète placée dans un univers dont les éléments s'emboîtent, d'album en album. Cette fois, Nävis passe à proximité de la « vérité », ou du moins, de « sa » vérité. Au milieu de mutants à l'apparence très humaine, elle va non seulement emmener le lecteur dans un tout nouvel univers, mais en plus découvrir l'amour. La petite fille fruste du premier album, la gamine un rien capricieuse du deuxième ont fait place à la jeune femme du troisième. Sans y toucher, Morvan mûrit son héroïne, et permet au lecteur de la suivre dans une nouvelle quête, la quête du bonheur qui passe par la découverte de son identité. On ne peut qu'apprécier cette transformation de Nävis d'un album sur l'autre. On ne peut que s'attacher à elle, aussi. Avec l'aide parfois précieuse de quelques personnages secondaires, Morvan et Buchet parviennent à nous emporter dans cet univers de caravane de l'espace à la transhumance sans fin. Dans cet album, ils s'offrent en plus le luxe de livrer leur vision de l'évolution et de pasticher les révoltes sociales du 19ème siècle qui ont émaillé quelques autres albums de BD -et non des moindres. Tout cela avec retenue, intelligence et humour.
« Le dieu des chacals », tome deux de la série Niklos Koda, par Olivier Grenson et Jean Dufaux, dans la collection Troisième Vague du Lombard.

Si le premier tome des aventures de Niklos Koda laissait le lecteur sur une impression positive, il le laissait aussi en plein brouillard. Il y a deux sortes d'histoires, chez Jean Dufaux, celles qui se lisent de haut en bas et de gauche à droite -c'est le cas de Jessica Blandy ou de Giacomo C, par exemple- et celles qui se lisent entre les cases. Koda fait partie de la seconde catégorie. Ce deuxième album vient le confirmer. S'il offre une fin provisoire à l'histoire, il conserve néanmoins une large part de mystère, de non-dit, d'irrationnel. Et c'est ce qui fait tout le charme de cette jeune série, sans cesse en train de flirter avec les genres opposés. On est dans l'espionnage et le thriller politique, mais on est aussi dans le vaudou jusqu'au cou. Dufaux s'amuse à brouiller les pistes et à mélanger les codes, faisant de Koda un personnage à la fois très « Troisième Vague » et à la fois inattendu. C'est réussi. On regrettera juste un côté un peu trop préparé dans ce deuxième album, qui fait du « planting » très gros sabots pour amener le ou les suivant(s). Les allusions assez lourdes au passé de Koda et à son père, par exemple, eussent été plus discrètes en arrivant dès le premier album.
Quant au dessin d'Olivier Grenson, au risque de me répéter, il a trouvé en cette nouvelle collaboration un véritable dopant. Il suffit de rouvrir un Carland Cross pour voir tout le chemin parcouru. Et même si Olivier ne révolutionne pas le genre, on se prend déjà à rêver du jour où il se lâchera vraiment, voire du jour où il se décidera à faire de la couleur directe. En attendant, il s'amuse à truffer ses décors d'allusions à ses amis ou à ses lectures du moment. Une façon de récompenser les lecteurs attentifs qui lui avaient fait part de petites erreurs de distraction dans le précédent album ? Peut-être. Une petite réserve, quand même. On regrette qu'il y ait encore quelques attitudes figées et certains visages qui semblent être davantage de cire que de chair. Mais Olivier se rattrape avec ses femmes plus séduisantes les unes que les autres. On aimerait croiser certains de ses modèles...
« L'affaire est dans le lac », tome trois des « Ailes de plomb », par Gibelin et Barral. Collection Sang-Froid, Delcourt.

Premier coup de chapeau aux auteurs : ils ont respecté le contrat ; leur histoire tient en trois albums. Et elle tient foutrement bien. Evidemment, comme souvent, le dernier tome est celui de toutes les explications et surtout, de tous les dénouements. Il manque de mystère, de suspense même, car on sent que l'aspect « résolution du problème donné » prime sur l'imagination et la fantaisie. N'empêche, la fin est inattendue, ce qui constitue déjà un bon point (même si elle en perturbera plus d'un...) La dernière page tournée, quand on repense à l'histoire, on reste sur le sentiment d'avoir accompagné des personnages attachants, y compris parmi les « mauvais » -à commencer par Antoine Courpatas, l'homme à la gueule de Gabin. On croirait presque aussi qu'on vient de lire une page d'histoire méconnue de la France. Un complot visant à éliminer De Gaulle en faisant dévier une prototype d'avion ultramoderne sur une base militaire visitée par le général, pourquoi pas ? D'autant que le contexte historique est par ailleurs bien exploité (protagonistes de retour d'Indochine, guerre d'Algérie qui se prépare en filigrane...) et que le souci d'authenticité est poussé à l'extrême, tant dans les décors que dans les actes posés par les différents personnages. Le dessin de Barral a beaucoup évolué entre le premier et le troisième album. Celui de Gibelin, qui a assuré les avions et surtout les couleurs, est resté fidèle à lui-même, mais en affirmant une maîtrise de plus en plus évidente dans la mise en couleur. Et puis il y a cette ambiance générale, dont on a déjà beaucoup parlé, et qui fait tout le charme de ce triptyque. Une ambiance de film français des années soixante qui se traduit notamment par d'excellents dialogues. Bref, une BD solide, au scénario charpenté. Un futur classique, dont une éventuelle édition intégrale pourrait habilement relancer la carrière dans trois ou quatre ans, en proposant à un public moins averti un excellent récit de fiction historique d'un peu plus de cent cinquante pages.
Kursk, Tourmente d'acier par Thierry Bellefroid
« Kursk, tourmente d'acier », par Dimitri. Dans la collection « Caractère » des éditions Glénat.

L'occasion est trop belle de saluer le travail de nos amis de Bodoï. Comme beaucoup, je connais Dimitri depuis de nombreuses années et l'ai découvert à travers le « Goulag ». Comme beaucoup, je me suis rendu compte au fil des albums « sérieux » de cet auteur qu'il s'attachait principalement à la seconde Guerre Mondiale. Et qu'il ne dédaignait pas raconter les histoires en adoptant la position de « l'ennemi ». Comme beaucoup j'ai lu « Kursk » à la manière d'une « Histoire de l'Oncle Paul ». Son côté presque désuet m'avait touché, son aspect journal de bord m'avait étonné, de même que l'authenticité qui s'en dégageait, mais je n'avais pas eu le coup de foudre. Surprise, à la lecture du dossier paru dans le Bodoï de juillet ! Dimitri sort de l'ombre, accepte de parler d'une période de sa vie jusque là tenue secrète et de faire le parallèle avec le livre « Le soldat oublié » (400.000 exemplaires, chez Robert Laffont, écrit sous le pseudo de Guy Sajer en 1967), un livre dans lequel un jeune soldat français racontait « sa » guerre sous l'uniforme...allemand ! Et cet éclairage stupéfiant vient comme une gifle réveiller le lecteur de « Kursk ». Si Dimitri raconte l'horreur, la guerre, la mort et l'honneur perdu depuis tant d'années, c'est parce qu'il a vécu la guerre dans le mauvais camp et s'est retrouvé enrôlé dans l'armée allemande de 1942 à 1945. Le jeune Alsacien qu'il était est revenu vivant par miracle, mais après avoir côtoyé l'horreur absolue, les pires combats que des hommes se soient livrés. Et après avoir perdu à la fois ses illusions et son honneur. Le dossier de Bodoï n'est pas seulement remarquable. Il est presque indispensable pour qui veut lire « Kursk ». A tel point que Glénat eût été inspiré en livrant cet album avec le mode d'emploi. Car c'est tout de même la première fois que Dimitri s'y livre à la première personne. A 73 ans, il a jugé qu'il pouvait laisser tomber le masque. On ne peut que saluer son courage.
Virage dangereux par Thierry Bellefroid
« Virage dangereux », par Bruno Heitz. Au Seuil.

Ca sent la cave, chez Bruno Heitz. C'est pas moi qui le dis, c'est lui. Et il insiste. A tel point que les trois pages d'introduction de cette nouvelle histoire sont presque en odorama ! Heitz a un talent fou de narrateur. Ses petits récits campagnards sont autant de perle. Et son détective, Hubert, accessoirement livreur et souffre-douleur de l'épicière de Beaulieu-sur-Morne vaut bien la plupart de ses confrères de bande dessinée. Malheureusement, son dessin un rien naïf épuré à l'extrême qui rappelle les débuts d'Hergé (période « Totor, C.P. des Hannetons »/ « Tintin au pays des Soviets ») ne fera jamais de ses BD des succès de librairie. Et c'est bien dommage. Car le privé de Beaulieu-sur-Morne n'a rien à envier au Canardo de Sokal, par exemple, même s'il chasse sur un autre terrain. Il y a le même ton désabusé, le même humour décalé, la même approche de personnages montrés sous leur plus mauvais jour. J'adore cet aspect résigné, cette narration sans artifice, ce langage presque parlé mais si savoureux en même temps. Heitz mérite une lecture attentive. Avec « Un privé à la cambrousse » et « Une magouille pas ordinaire », ce « Virage dangereux » est sans doute un de ses meilleurs récits. Pas tant pour l'enquête elle-même que pour la galerie de portraits délicieux qu'il charrie à longueur de page.
Chaos (Lone Sloane) par Thierry Bellefroid
"Chaos", dans la série "Lone Sloane", par Druillet. Chez Albin Michel.

Trente-quatre ans après son premier album (Le mystère des abîmes, initialement paru chez Losfeld), Lone Sloane retrouve les présentoirs des libraires. Et on jurerait qu'il n'a pas changé d'un pouce. Pourtant, depuis que Druillet nous l'a « tué », il y a quatorze ans, on n'avait guère eu d'occasions de croire à son retour. Tournant le dos à la BD, le peintre, sculpteur, scénographe et concepteur multi-média s'était lancé à corps perdu dans d'autres activités. Il avoue aujourd'hui que la BD est de toutes, la discipline la plus exigeante. Il faut dire que Druillet ne ménage pas ses efforts. Et c'est justement pour ça que chacun de ses albums est un événement. On retrouve une histoire confuse, aride, sulfureuse, qui commence par le cortège d'enterrement de Sloane. Le héros gît dans un gigantesque sarcophage d'or. Shaan veille dans l'ombre et savoure sa victoire. Mais une femme nommée Légende va ressusciter Lone Sloane en insufflant la vie à son sexe mort. La mise en page unique de Druillet réserve toujours autant de surprises, ses cadrages « de la mort », ses couleurs hyper-trash, ses pleines pages horizontales, ses textes taillés au burin, tout cela constitue une véritable signature inimitable. Les amateurs crieront au génie. Les autres diront qu'ils n'ont pas davantage compris qu'il y a quatorze ans. Druillet s'en fout. Lui, il dessine. Et de mieux en mieux !
« Le contrat Jessica », N°18 de la série Jessica Blandy âr Jean Dufaux et Renaud, dans la collection Repérages des éditions Dupuis.

Jessica Blandy renoue avec les personnages et les ambiances de ses deux meilleurs albums, « Peau d'enfer » et « Au loin, la fille d'Ipanema ». Mais Jean Dufaux parvient à éviter le remake dans ce dix-huitième tome où la belle Jessica se livre à l'ultime bras de fer contre Robby le ripou. Une fois de plus, c'est son corps que notre héroïne devra vendre pour en sortir. Mais la surprise vient du fait que le marché ne se passe absolument pas comme prévu. Tant mieux pour le lecteur qui a pu craindre un instant qu'on jouait avec ses pieds. Jessica, elle, ressort de cette histoire avec quelques blessures secrètes de plus... et un amant de moins. Bref, la machine est bien huilée et Dufaux connaît la musique sur le bout des doigts. Cet album est donc un bon cru. Seule réserve : le dessin ou plutôt, la mise en couleurs de Renaud. Privilégiant volontiers un mauve d'assez mauvais goût, le dessinateur utilise un peu trop la couleur pour modeler les visages et les corps ; au point que ceux-ci reflètent trop souvent la lumière comme une carrosserie de voiture, ce qui n'est guère réaliste. Pas plus réaliste, l'absence presque totale des ombres, alors que les personnages se trouvent parfois en plein soleil. La planche 22, entre autres, constitue un bel exemple avec à la fois l'absence des ombres et des couleurs trop criardes. Mais ne boudons pas notre plaisir : Renaud a fait d'énormes progrès. En quelques années, il a réglé les trois problèmes principaux de ses personnages : les bouches, les cheveux et les yeux. Il a aussi fluidifié ses lignes et rendu la plume plus discrète (un peu trop, peut-être, sur les barbes de ses personnages qui ne sont plus désormais dessinées qu'à la couleur, mais n'ergotons pas...) Et il suffit de voir le succès des expositions de dessins reprenant ses « créatures » féminines pour voir que Renaud est apprécié du public. Sa volonté de traiter lui-même les couleurs depuis deux albums vient sûrement d'une envie de se dépasser et de se mettre face à de nouveaux défis. Laissons-lui le temps d'y répondre...
Au revoir Jimmy (Jimmy Tousseul) par Thierry Bellefroid
« Au revoir Jimmy », tome 12 de la série Jimmy Tousseul, par Daniel Desorgher et Stephen Desberg.

Et voilà, c'est fini. Une sacrée saga, qui nous aura valu de suivre un héros attachant pendant douze albums et de le voir mûrir avec beaucoup de bonheur. Sans en avoir l'air, cette série s'est installée dans le paysage de la BD en digne héritière des récits qui ont fait l'âge d'or du magazine de Spirou. Ce n'est pas par hasard que Tousseul est apparu chez Dupuis. Pétri d'influences (trop, parfois ?), Daniel Desorgher privilégie une ligne claire qui doit autant à Franquin qu'à Tillieux, à Vandersteen qu'à Will (et bien sûr à Peyo, avec qui il a travaillé). L'école belge dans toute sa splendeur. Quant à cette ultime aventure, riche de rebondissements, elle s'achève par un happy end intelligent, une sorte de fin ouverte qui ne devrait décevoir personne. Que dire d'autre sinon que, forcément adaptée à son public, cette BD pêche parfois par un petit excès de simplisme ? Mais la fraîcheur et l'authenticité des auteurs reste toujours aussi désarmante, même au bout de douze albums. C'est suffisamment rare pour être signalé. Desberg est un scénariste rare. Il est capable de nous livrer aussi bien les épisodes déjantés de La Vache que L'étoile du désert, ou le futur Scorpion. Sans oublier les perles dessinées par Will (« La vingt-septième lettre » et « Le jardin des désirs », ainsi que « L'appel de l'enfer », un peu moins abouti, celui-là). Et à côté de ça, il nous gratifie de séries « enfantines » comme Jimmy Tousseul et Billy the Cat. On attend la suite...
« Anticyclone » d'Etienne Davodeau. Dans la collection Sang-Froid, chez Delcourt.

« Anticyclone » est un des meilleurs albums d'Etienne Davodeau, qui en a pourtant déjà commis quelques-uns. A la hauteur d'un « Réflexe de survie » ou de « Quelques jours avec un menteur ». Après un opus un rien premier degré (« La gloire d'Albert »), revoilà le Davodeau tout en finesse, en dialogues et en impressions. Etienne est un formidable observateur de la vie et des gens. Il les croque sans tricher, avec une sincérité qui rend chaque dialogue authentique, chaque personnage proche de quelqu'un que nous avons croisé. Nina la grande gueule et Castor le mal-aimé vont se livrer une lutte sans merci pour conserver leur job. Dans leur course au bonheur -ou plutôt, à la survie !-, tout est permis. Et personne d'autre ne compte que ceux qu'ils doivent nourrir. La main tendue d'une femme pétrie d'ennui et entraînée malgré elle dans cette ronde infernale n'émeut même pas Nina, aveuglée par son égocentrisme. C'est d'une cruauté et d'une froideur exemplaires. Mais à prendre comme un constat (tiens, c'est le titre d'un album de Davodeau, ça, le constat... quel hasard), comme un reportage pris sur le vif, par un scénariste-dessinateur qui ne s'épanche jamais gratuitement dans ses BD. C'est dur, sans concession, mais c'est comme du Ken Loach en BD, on ressort avec quelque chose en plus. Ajoutons que la maîtrise des couleurs et de l'ambiance pluvieuse qui « baigne » (c'est le cas de le dire) cet album d'un bout à l'autre prouve que Davodeau est aussi doué comme scénariste que comme dessinateur. Dans ces deux activités, il privilégie la même approche, une façon d'aller à l'essentiel qui pourrait s'appeler le dépouillement. Et en plus, cette fois, il a superbement réussi la couverture !
Wade Mantle (Quarterback) par Thierry Bellefroid
« Quarterback 1 : Wade Mantle », par David Chauvel et Malo Kerfriden. Dans la collection Sang-Froid des éditions Delcourt.

On finirait par avoir l'impression de se répéter, à force... Nouvelle série chez Delcourt, avec Chauvel au scénario... et un illustre inconnu au dessin. Cette fois, on plonge dans une enquête du FBI qui s'annonce passionnante d'emblée, mais qui laisse, comme de bien entendu, le lecteur sur sa faim. Car ce premier tome de Quarterback est une mise en place, rien de plus. Une très bonne mise en place, qui vous tient tout de suite en haleine et vous plonge dans l'ambiance de bons thrillers à l'américaine, mais qui s'achève sans avoir levé le plus petit coin du voile. Dur pour le moral, mais c'est la loi du genre. Le ton choisi par Chauvel est assez neutre, détaché. On sent tout de suite que le vrai héros de l'histoire est le cadavre de Wade Mantle. C'est bien joué. C'est bien raconté. En clair, j'ai aimé. Mais que c'est mal dessiné ! Ce n'est pas le premier dessinateur débutant qui fait ses dents à l'écurie Delcourt, loin de là, mais cette fois, il y a de véritables lacunes, presque dans tous les domaines : visages, proportions, corps, voitures, perspectives...
Sur le papier, on peut trouver assez sympathique de donner leur chance aux jeunes dessinateurs. Mais par égard pour le public qui paye tout de même pas loin de 80FF cet album, on devrait se fixer des limites et ne jamais perdre de vue que le lecteur, lui, n'investit pas dans un fonds de développement aux futurs dessinateurs : il achète parce qu'il veut lire une bonne histoire. Alors, cette fois, c'est Malo Kerfriden qui paye pour tous les autres, qu'il me pardonne (ce qu'il ne fera sans doute pas et c'est son droit le plus strict...) mais la coupe est pleine. La collection « Sang-Froid » est une excellente collection, je la recommande généralement à tous les amateurs de bons polars. Il serait dommage qu'elle perde une part de son crédit à force de jouer les bancs d'essai !
Catharzie (Ether Glister) par Thierry Bellefroid
"Ether Glister N°1 : Catharzie", par Yoann et Ferlut. Colection Néopolis des éditions Delcourt.

Nouvelle série, une de plus, pour Yoann Chivard, le dessinateur surdoué de Toto l'ornithorynque. Première série, en revanche, pour Nathalie Ferlut qui évolue pourtant depuis plusieurs années dans le petit monde de la BD et celui de l'animation. Leur rencontre débouche sur cette histoire de science-fiction où une femme, Ether Glister, vole bien vite la vedette aux hommes que l'on croit être les protagonistes principaux au début de l'album. Le scénario est bien mené, même si la plupart de ses ingrédients ont un petit côté déjà-vu (planète séparée en deux par une guerre fratricide, atmosphère irrespirable après un conflit, complot gouvernemental contre un savant jugé gênant, etc...). Le personnage central -Ether Glister, donc- n'a pas livré tous ses secrets, loin de là. Le lecteur s'en aperçoit vite, cette jolie brune a encore plus d'un tour dans son sac. Elle se tire peut-être un rien trop facilement des embûches que sa scénariste met sur sa route, mais jusque-là, sans compromettre la crédibilité de l'histoire. Son faire-valoir, l'officiant La Corneille, oscille entre le rôle d'empêcheur de tourner en rond et celui d'empoté. Il vient renforcer par opposition la position dominante et attrayante d'Ether. Quant au dessin de Yoann, il me semble plus abouti que jamais. Le mélange des techniques amène une mise en couleur stupéfiante, d'une originalité certaine, qui peut se permettre -à l'instar d'un de Crécy- de faire fi de toute notion de fidélité à la réalité. Chez Yoann, la couleur est un mode d'expression en soi, elle raconte les ambiances et les états d'âme des personnages et de l'auteur à la fois. Elle vit sa vie propre, loin des codes habituels. Chaque case est surprenante d'audace. Et à lire cet album, on mesure à quel point le traitement plus réaliste de Ninie Rézergoude, la série que dessine Yoann sur le scénario de son complice Eric Omond, manque cruellement de fantaisie dans les couleurs !
« Les poupées de Jérusalem », tome 2 des aventures du Professeur Bell. Par Joann Sfar. Chez Delcourt.

Plus mystique que jamais, Sfar se fait plaisir en nous livrant cet album étrange, personnel, ovniesque, pourrait-on dire. Dans des décors en partie existants, ceux de Jérusalem, le chassé-croisé des religions, des esprits et de la mauvaise foi satanique fait des ravages. Belzébuth version Sfar, ça vaut le détour. Et ce qui vaut tout autant le détour, c'est cet imaginaire sans contrainte qui peut nous emmener d'un seul coup aux frontières de nos propres croyances comme au pays de la fantaisie la plus pure. Très sombres, comme toujours chez Sfar, les cases recèlent une ombre obsédante, qui pourrait bien être celle de l'auteur lui-même, penché sur sa feuille. La plume a dû chauffer, parfois, à voir certains dessins. D'autres ont une lisibilité plus rare, plus classique, à laquelle Joann ne nous avait pas habitués. C'est de ce mélange que naît la magie. Une magie indicible, que personne d'autre ne manie comme lui. Faite de références (une constante chez lui, même dans des BD pour enfants comme le Petit Vampire) mais aussi de poésie, d'imaginaire et de théâtres de marionnettes invisibles. Bref, du Sfar de chez Sfar, mais en très réussi, qui confirme que Professeur Bell -salué par toute la critique lors de la sortie du premier album- est bien plus qu'un nouveau détective dans le monde de la BD. C'est un personnage à part, qui doit beaucoup à la littérature fantastique et qui doit encore plus à l'imagination unique de son créateur. Le genre d'album qui renouvelle tout un pan de la BD à lui tout seul !
Critical Mass (Némésis) par Thierry Bellefroid
« Critical mass », le tome 3 de la série Nemesis. Par Ange, Janolle et Van den Abeele. Chez Soleil.

Soleil réédite les deux premiers tomes de cette excellente saga et y ajoute un tome trois qui vient conclure un premier cycle passionnant d'un bout à l'autre. « Nemesis » n'a pas grand chose à envier au « Chant des Stryges ». Chassant sur les mêmes terres, les scénaristes (ils sont deux à se cacher sous le pseudo « Ange ») sont des enfants d'X-Files et nous proposent de plonger dans une histoire qui mêle éléments fantastiques, historiques, policier. Après un deuxième tome un peu tiré en longueur, ce troisième volume arrive à point nommé pour relancer l'intérêt de la série (d'où la réédition des deux premiers albums). En deux mots, deux inspecteurs du FBI enquêtent sur les expériences d'un marchand d'armes qui tente de permettre la fusion du corps humain et d'entités extérieures en détournant l'énergie d'explosions atomiques. Coups tordus, CIA mouillée, débiles mentaux transformés en créatures démoniaques, personnages principaux qui ont le bon goût de ne pas être parfaits -loin de là-, on ne s'ennuie pas à la lecture de Nemesis. On s'ennuie d'autant moins que la mise en page est nerveuse et le découpage intelligent. Le duo de flics -auquel s'ajoute une sympathique alliée de la CIA qui fait chavirer le coeur d'un des deux inspecteurs en question- est aussi attachant que crédible. L'histoire, que l'on croit deviner à ses débuts, comporte suffisamment de rebondissements et de développements pour rester captivante pendant plus de 150 pages. Côté dessin, Alain Janolle oscille entre un traitement classique, assez proche du trait de Christian Durieux et des accents plus mangas (notamment, dans les yeux de ses personnages). Ses « monstres », des humains robotisés et équipés de lames au bout des bras, sont très convaincants. Bref, le résultat est franchement à la hauteur. Il confirme la forme des scénaristes de Bloodline et Tower.
Fichtre ! par Thierry Bellefroid
« Fichtre ! » de Steven Weissman, chez Amok.

Un coup de poing dans l'oeil. C'est la première impression que vous fera cet album, lorsque vous l'ouvrirez. Qui, sinon nos bons amis d'Amok, pouvait prendre le risque d'adopter une telle mise en couleur ? La bichromie de ce « Fichtre », c'est du jamais vu, une véritable agression que l'on ne peut, a priori, trouver esthétique. Noir, blanc et fluo rouge orange, le résultat est absolument garanti. Et avec un peu de chance, c'est tout ce que vous verrez de cet album avant de le refermer d'un coup sec. Vous manqueriez ce qu'il y a à l'intérieur.

« Fichtre », c'est un ensemble d'histoires courtes qui revisite à sa façon quelques personnages mythiques en les cachant sous l'apparence banale de petits garçons. Ainsi, on suit les aventures d'une bande de gamins américains qui ont un petit côté Peanuts avant de se rendre compte qu'il y a des choses un peu étranges qui se passent dans ce groupe. Mordikus ne possède qu'une canine, c'est un vampire en courtes culottes. Robby Chouchou Rondouille, c'est Docteur Jekyll/Mister Hyde. Macchab boy est un zombie, et son chien Clebsette Bidoche est lui aussi revenu de la mort. Quant à Patchwork Boy, son père l'a cousu avec des cadavres d'enfants. Que dites-vous de ça ? Que Weissman a un sacré problème et qu'il le règle en faisant de la BD ! Je ne dirai pas que c'est désopilant. Certaines histoires n'ont d'ailleurs ni queue ni tête. Mais c'est pour le moins original. Et il y a de bons moments. Ca a un côté trash-MTV qui plaira aux accros de Beavis & Butt-Head. L'idéal est quand même d'être daltonien...
« Les souris ont parfois du mal à gravir la montagne », par Vincent Ravalec, illustré par Dupuy et Berberian. Aux éditions du Seuil.

Une fois n'est pas coutume, ce n'est pas une BD dont je vous parle aujourd'hui. « Les souris ont parfois du mal à gravir la montagne » est un de ces livres inclassables, ni roman ni essai. Plus proche du récit autobiographique, il raconte l'expérience de Vincent Ravalec en tant que réalisateur de cinéma. Un métier que cet écrivain aborde avec autant de distance que d'humour et qu'il raconte, chapitre après chapitre, de manière désopilante. Il faut dire que la vie de réalisateur de cinéma en France n'est pas de tout repos. On y croise une faune peu banale, à commencer par des acteurs (-trices, surtout, puisqu'elles semblent souvent plus névrosées que leurs collègues masculins), des producteurs et toute une meute de professionnels du restaurant ou de la finance pour qui l'art est un bizness avant tout. Sans concession, sans tendresse exagérée pour ce monde qu'il a fréquenté presque à son corps défendant, Ravalec règle ses comptes. Mais il n'est jamais ni vulgaire ni aigri. Cette pointe d'humour, on la retrouve dans les dessins que Dupuy et Berberian ont faits pour illustrer le récit de l'auteur. Dans le plus pur esprit du dessin d'illustration, ils ont pour une fois délaissé l'encre. Le crayon leur permet une finesse inattendue, qui m'a parfois rappelé le ton d'un Sempé. En tout cas, ils apportent un regard frais et original sur un texte qui n'avait pas besoin d'illustration pour exister mais qui semble leur faire de la place avec beaucoup de plaisir. Du plaisir, vous en aurez, vous aussi, à la lecture de ce livre caustique dont la première qualité est de ne pas se prendre au sérieux !
Demy (Amenophis IV) par Thierry Bellefroid
« Demy », tome 1 de la série Aménophis IV, par Dieter, Le Roux, Manchu et Hubert. Dans la collection Néopolis des éditions Delcourt.

Dieter s'aventure en SF après avoir exploré la plupart des autres genres de BD. Et ma foi, le résultat est loin d'être mauvais. Même s'il est toujours difficile de se faire une idée d'une série sur le seul premier album, « Demy » est une bonne histoire, parce qu'elle transpose le roman policier dans une univers utopique intéressant. La colonie terrienne établie sur Mars est en effet à la recherche de la société idéale, fondée sur une exacte répartition des tâches et des individus et sur un contrôle psychologique permanent de la population. Même la religion y est rigoureusement planifiée (et on le verra, transgresser les règles en la matière, peut mener loin). Le personnage principal, l'officiant Barhile, est par ailleurs très réussi. Il campe à merveille ce rôle de « curé » du futur, pas trop à cheval sur les principes et très réaliste face aux événements. Les événements, en l'occurrence, pourraient renvoyer à une simple histoire de serial killer, puisqu'il s'agit de meurtres en série. Mais il y a les messages qu'envoie le tueur au prêtre et leur signification ésotérique, qui rendent la chose beaucoup plus mystérieuse et justifient pleinement le choix d'un cadre science-fictionnel. Manchu ajoute à l'ensemble une touche personnelle qui s'exprime à travers des décors très réussis et un design général tout à fait crédible. Créateur d'univers, il donne du souffle à l'ensemble et fait parfois oublier les faiblesses du dessin d'Etienne Le Roux. Sa plus belle réussite, ce sont incontestablement ces primates clonés pour servir les terriens, les « Anthros », qui rappellent la Planète des Singes et qui seront sans doute des personnages-clés dans la suite de l'histoire.
Notes mésopotamiennes par Thierry Bellefroid
« Notes mésopotamiennes », par François Ayrolles, à L'Association.

Un petit livre de la collection Mimolette qui ne paie pas de mine mais qui ravira plus d'un lecteur. Sur chaque page, François Ayrolles (à ne pas confondre avec le scénariste de Garulfo, Alain Ayrolles) développe une idée, une petite idée de rien du tout, le genre de réflexion qu'on se fait en tombant sur un papier par terre ou en ouvrant un bouquin dans une bibliothèque. A chaque fois, tout est dit en six cases, sous lesquelles Ayrolles ramasse sa pensée en voix-off. L'écriture est soignée, elle révèle un regard pointu sur les choses et sur le monde, un regard qui trahit une curiosité jamais satisfaite. Tout cela est léger mais pas inutile, souvent à la frange de l'absurde, parfois drôle parfois plus poétique. Et la plume de François Ayrolles raconte, elle aussi, avec beaucoup de justesse, ce que la caméra de ses yeux a vu ou imaginé. Certaines cases foisonnent de détail, c'est parce qu'ils sont nécessaires. Dans les autres, le dépouillement de bon aloi offre un dessin d'une belle simplicité. Ces notes mésopotamiennes, c'est le carnet de bord d'un passant qui ne cesse de regarder le monde autour de lui, d'interroger ses bizarreries, de relever ses clins d'oeil. Et quand on referme ce petit livre, on se dit qu'il n'y avait rien en trop, ni un mot, ni un trait. C'est souvent à cela que l'on reconnaît les vrais auteurs de BD.
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