Les 1231 critiques de Thierry Bellefroid sur Bd Paradisio...

« Luc ou le souffle du Taureau », 3ème tome de la série « Le Troisième Testament », par Dorison et Alice. Chez Glénat.

Faut-il encore dire que Xavier Dorison et Alex Alice sont des maîtres absolus dans l'art du découpage ? Non, sans doute, tant cela semble évident. Faut-il encore insister sur la qualité de cette série qui allie à merveille ésotérisme, Histoire et aventure ? Non plus, car le « Troisième Testament » connaît un véritable succès de librairie... et le mérite. Alors, juste pour les distraits ou les nouveaux lecteurs de BD qui chercheraient à aborder une série intelligente autant que palpitante, je conseillerais de lire ces trois premiers livres sans traîner. D'autant qu'à mesure que le rébus paraît se résoudre, d'autres éléments viennent obscurcir l'ensemble, rendant toujours la lecture aussi passionnante. On avance d'un pas dans la connaissance, en effet, dans cet album. Mais on recule de deux dans la résolution finale. Sans tirer en longueur, sans compliquer à outrance, les deux jeunes complices que sont Dorison et Alice nous proposent un récit à la fois dans l'air du temps et à la fois à nul autre pareil. Quand il sera terminé, on s'apercevra sans doute que c'était un chef d'oeuvre. Spielberg devrait s'empresser de racheter les droits de cette histoire...
Golden Gate (Largo Winch) par Thierry Bellefroid
« Golden Gate », tome 11 de la série Largo Winch. Par Jean Van Hamme et Philippe Francq. Chez Dupuis.

Après XIII, Largo est de retour. A quelques mois du lancement de la série télé, inutile de dire que ce nouvel épisode est un bon thermomètre. Et que le malade se porte bien, merci. Largo Winch est en forme. Le scénario de ce nouveau diptyque renoue avec les bons côtés de la série. Et même si l'on se doute, rien qu'à regarder la tête du héros, qu'il va encore se prendre une bonne conjuration dans la gueule, on se laisse faire avec beaucoup de bonne volonté par un Van Hamme efficace jusque dans les recettes qu'il a déjà appliquées. La grosse différence avec le XIII sorti récemment, c'est qu'il n'y a pas une moitié d'album inutile. Ce Largo Winch pourrait sans doute être raconté de manière plus brève, mais il est difficile pour autant de dire s'il pourrait tenir en un seul album car nous ne connaissons évidemment pas la teneur du suivant. Il m'a en tout cas semblé musclé, bien charpenté et pour tout avouer, je ne me suis pas ennuyé une minute. Je reste très perplexe devant des couleurs d'un mauvais goût certain, mais ce n'est pas une nouveauté. Quant à l'auteur si souvent maltraité par la critique depuis quelque temps, il a décidé de se faire justice lui-même, en citant cette petite phrase de Jonathan Swift en guise de prologue : « on reconnaît qu'un talent est né au fait qu'il se forme spontanément une conjuration de crétins autour de lui ». De quoi énerver ses détracteurs et amuser ses admirateurs. Mais il faut dire qu'à l'heure où les chiffres de vente des deux séries phares de Van Hamme atteignent des sommets, il devient difficile d'en parler sans soulever des polémiques que je trouve pour ma part un rien disproportionnées. Dites que c'est bon et une levée de boucliers se produit aussitôt. Dites que c'est mauvais et tous les afficionados feront de même. Alors, moi, ce que j'en dis, hein...
Les quatre fleuves par Thierry Bellefroid
« Les quatre fleuves », par Edmond baudoin et Fred Vargas, chez Viviane Hamy.

Parmi les livres exceptionnels qu'a écrits Baudoin, cette collaboration avec l'écrivain Fred Vargas restera sans doute au rang des meilleurs. Pour ne pas dire... des chefs d'oeuvre. « Les quatre fleuves » est une histoire magnifique et magnifiquement racontée. Vargas cisèle ses dialogues à la manière d'un orfèvre. Comme chez Pennac, il y a cette famille un peu folle que l'intrigue policière vient révéler, véritable intérêt de l'histoire. Le père est sculpteur, il réalise dans son jardin une oeuvre en capsules de bière qui symbolise ses quatre fils : les quatre fleuves. Les fils en question ne se ressemblent pas mais ils forment une tribu. Sans mère, sans attaches réelles, ils se groupent autour du patriarche qui leur a révélé qu'un seul d'entre eux était le sien, mais qui se refuse à chercher lequel. Vargas campe un à un les quatre frères dont le plus jeune, Grégoire, est à la fois le héros de l'histoire et le maillon le plus faible de la famille. Grégoire se laisse entraîner par son ami Vincent et lorsqu'ils volent la sacoche d'un petit vieux finalement plus costaud que prévu, ils tombent sur un ensemble d'objets assez abjects et sur une fameuse somme d'argent. Mais le vieux en question entend bien retrouver ses trésors de guerre... et leur faire payer l'affront. Vincent est vite éliminé. Pour Grégoire commence alors la fuite, la peur, le jeu du chat et de la souris avec la police, avec l'homme qu'il a volé et quelques autres personnes qui s'intéressent tout à coup beaucoup à lui. Il peut compter sur la famille, cette fameuse tribu qui va faire bloc autour de lui alors que l'horreur de la découverte se fait jour. C'est rudement bien mené, avec des personnages aussi attachants les uns que les autres, une intrigue bien ficelée, une belle économie de moyens. Une fusion réussie entre dessin et littérature, aussi, comme on en rencontre peu. Il fallait un « peintre » comme Baudoin, esthète et amoureux des mots, pour traduire sans tirer la couverture à lui, toute la gamme des sentiments et des émotions charriés par l'écriture de Vargas. Un « dessinateur de BD » aurait fait de la BD. Baudoin est plus que ça. Il a fait une oeuvre. Son pinceau virevolte et trace des lignes fragiles, des mots d'encre de Chine en forme de visages. Surprenant de maîtrise, d'intelligence, de respect pour les personnages et l'histoire. Rare. Tout simplement.
Sharaz-De - T. 1 (Sharaz-De) par Thierry Bellefroid
« Sharaz-de » de Toppi. Chez Mosquito.

Sergio Toppi est l'un de ces immenses dessinateurs italiens malheureusement trop peu connus hors de leurs frontières. Son dessin vaut à lui seul l'achat de ce livre magnifique consacré aux Contes des Mille et Une Nuits. Derrière le prénom de Sharaz-de, il faut en effet reconnaître celui de Shéhérazade. En clair, l'histoire est connue. Ce qui n'empêche pas ce très grand artiste de lui redonner des lettres de noblesse. Toppi jongle avec la page, la compose autour d'un personnage ou d'un thème central. Pas de cases à proprement parler mais des excroissances, des ramifications qui donnent son équilibre à la planche et permettent la narration. Du grand art, d'autant que le graphisme du maître est stupéfiant de beauté. Proche de la gravure, mais surtout très influencé par la peinture, Toppi hachure dans des sens contraires, comme s'il sculptait la matière qu'est le papier. Ses influences vont clairement vers le symbolisme et l'Art Nouveau dans sa période autrichienne. Cela donne des planches spectaculaires qui sont comme autant de tableaux en noir et blanc. Et même quand par le hasard de la volonté de l'éditeur, certaines d'entre elles sont en couleur, le dessinateur arrive à leur donner une touche personnelle créatrice. Mais j'avoue quand même leur préférer les pages en noir et blanc.
Quant à l'histoire, elle est incomplète, car Toppi n'a jamais terminé cette adaptation qui lui avait été commandée pour la revue Linus. Dommage. Reste un livre somptueux que Mosquito a eu la bonne idée de publier en grand format et dont la postface écrite par Thierry Groensteen éclairera le lecteur curieux d'en savoir plus sur Toppi.
Gemma Bovery par Thierry Bellefroid
« Gemma Bovery » par Posy Simmonds. Chez Denoël.

Parue en feuilleton dans « The Guardian », cette étonnante histoire inspirée du Madame Bovary de Flaubert est un pur bijou, y compris dans cette excellente traduction française. Bien sûr, sa forme faite d'un mélange de textes et de strips ne ravira pas tout le monde et requiert un temps de lecture conséquent. Mais quel bonheur d'entrer dans cet univers personnel où Posy Simmonds révèle son amour des lettres et de la France. L'histoire se présente comme un long flash-back. Elle débute à la mort de Gemma Bovery, un Anglaise installée en Normandie. Dans leur maison, son mari a retrouvé les cahiers intimes qu'elle a écrits. Il se refuse à les ouvrir, estimant qu'il est trop tôt. Son ami, boulanger au village, les dérobe alors et entreprend de compléter les blancs d'une histoire qu'il ne connaît déjà que trop bien. On comprend qu'il n'est pas étranger à la mort de Gemma, mais on ne sait, à ce stade de l'histoire, s'il a été son amant ou si c'est plus compliqué que cela. Et c'est beaucoup plus compliqué, en effet. Formée à la Sorbonne et à la Central School of art de Londres, Posy Simmonds jongle avec la véritable histoire d'Emma Bovary et s'amuse à faire coïncider en partie le roman de Flaubert et son récit à elle. La vie de Gemma se déroule, racontée à la fois par le narrateur -le boulanger- et par les extraits du journal qu'il lit (dans une autre typographie). Amants, déceptions, enthousiasmes retrouvés, recherche de l'amour et du bonheur, incompréhension entre Français et Anglais, Posy Simmonds explore tout à la fois, avec un égal bonheur et une justesse incroyable. Au bout des quelques heures qui sont nécessaires à la lecture de ce livre, vous le refermerez en continuant le récit tout seul, dans un coin de votre tête. C'est la marque des belles histoires...
Alex Clément est mort par Thierry Bellefroid
« Alex Clément est mort », par Delphine Rieu et Emmanuel Lepage. Dans la collection Intégra des éditions Vents d'Ouest.

Difficile de ne pas sentir l'influence de Pascal Rabaté sur cet ouvrage. Paru dans la même collection que la plupart des travaux du génial adaptateur d'Ibicus, « Alex Clément est mort » louche à la fois sur son dessin et sur ses thèmes de prédilection. D'abord, il y a cette famille de notables désargentés où la plupart des membres frisent la camisole de force (le frère à quitté le philarmonique où il jouait des cymbales et rêve de devenir un homme-orchestre à la Rémy Brika ; la soeur, obsédée par sa dot et sa réussite sociale est prête à commettre le meurtre sur une femme qui l'a vu naître ; la mère ignore qu'elle est enceinte de quatre mois à 48 ans ; et le père accepte de se déguiser en SDF pour aller passer des coups de fil louches...). Pour sortir des ennuis, pourquoi ne pas séquestrer la voisine dans la cave et soutirer une rançon à son fils ? Des situations absurdes et une critique acerbe du milieu bourgeois décadent qui rappelle certains albums de Rabaté comme « Les pieds dedans » ou « Premières cartouches ». Puis, il y a le dessin d'Emmanuel Lepage, révélé, après l'excellente série Névé, par « La terre sans mal » (Aire Libre, Dupuis, avec Anne Sibran), un album où son travail en couleur directe avait fait merveille. Emmanuel dépose les pinceaux de couleur et réalise cet album « à la Rabaté », en travaillant un lavis rehaussé assez réussi, et en jouant sur des déformations de visages ou des cadrages qui peuvent rappeler Ibicus tout en jouant une carte beaucoup plus proche de l'humour et de la caricature. Bref, il y a un malaise, cet album ne sonne pas très authentique. Mais il a des qualités. L'histoire tout à fait rocambolesque et souvent invraisemblable est quand même amusante. Et surtout la façon de la raconter, en adoptant tout à tour le point du vue des différents protagonistes fonctionne bien, même si l'idée n'est pas neuve. Bref, une grosse, très grosse farce qui prouve au moins une chose, c'est qu'Emmanuel Lepage est prêt à prendre des risques. Après « La terre sans mal », on s'attendait en effet à tout sauf à ça. Même si ce n'est pas tout à fait réussi, c'est courageux !
La chance de Sébastien (Jojo) par Thierry Bellefroid
« La chance de Sébastien », Jojo N°10, par Geerts. Chez Dupuis.

Jojo continue son petit bonhomme de chemin qui sent bon la confiture de groseilles maison et les fleurs des champs. Il a pris l'habitude de rencontrer des camarades un peu particuliers qui se transforment souvent en héros d'un album. Cette fois, c'est Sébastien qui joue ce rôle ingrat. Ingrat, car Sébastien est chargé par Geerts d'être le malchanceux de service. Aucune intention sadique dans le chef du scénariste-dessinateur, au contraire. Il a fait de Sébastien un petit garçon attachant et réaliste, conscient de son état mais pas geignard pour autant. Quand on naît sous la malchance, on sait qu'on ne doit rien attendre de la vie... Rien ? Evidemment, ce serait trop bête si c 'était vraiment comme ça. Alors, Geerts va donner un petit coup de pouce à Sébastien et prouver une fois de plus que le plus important dans la vie, c'est quand même l'amitié. On retrouve les thèmes habituels de la série, on retrouve aussi son univers : la campagne, l'école, le désormais inévitable papa-plombier-clown. Seul changement notoire, la série glisse vers une succession de gags formant une histoire. Plus qu'avant, en effet, Geerts semble soucieux de terminer presque chaque planche par une chute. Cela ne porte pas préjudice à l'ensemble, même si cet album n'est pas le meilleur de la série. Et puis, pour les amateurs, signalons l'existence d'une cassette vidéo de 52 minutes diffusée et coproduite par TF1, la RTBF et la TSR. Un dessin animé très fidèle à l'univers de Geerts, qui part d'un ancien épisode très réussi : le mystère Violaine, et va chercher des éléments dans deux autres histoires de la série.
Week-end avec préméditation par Thierry Bellefroid
« Week-end avec préméditation », par Wazem et Tirabosco. Dans la collection Tohu Bohu des Humanos.

Voilà un album qui m'a rappelé l'excellent « Quelques jours avec un menteur » de Davodeau, paru en 97 dans la collection « Encrages » des éditions Delcourt (celle-là même qui a publié « Le colporteur » de Tirabosco). Même format, mais aussi et surtout même ambiance. Dans un chalet de montagne, des amis se retirent du monde. La différence, c'est qu'ici, ils ne sont que trois... et que les deux « survivants » sont revenus sur les lieux pour tenter de comprendre pourquoi et comment le troisième y a trouvé la mort. Suicide ou accident ? Balançant entre culpabilité et évocation tendre, Serge et Igor refont le trajet jusqu'à cet endroit préservé où ils ont vécu des instants magiques, hors du monde, en compagnie de Mathieu. Le livre est intelligemment construit sur un constant aller-retour entre présent et passé. Comme les lieux sont les mêmes, on ne comprend pas tout de suite. Mais avec beaucoup de subtilité, Wazem a amené les éléments de scénario qui font basculer la lecture de la chronique de vacances vers l'évocation d'un disparu. Tom Tirabosco apporte toute la sensibilité de son dessin à cette histoire douce-amère. De son noir et blanc qui sent bon le pastel gras, il croque les personnages et les lieux sans effets outranciers. C'est beau, aussi beau que l'histoire elle-même qui ne laisse pas indifférent.
Pyjama Party (Les filles) par Thierry Bellefroid
« Pyjama Party », tome 1 de la série « Les filles ». Par Christopher. A « La comédie illustrée ».

Christopher n'est pas un débutant. Mais là, on peut dire qu'il passe à la vitesse supérieure. Avec ce graphisme dépouillé et tout en finesse qui rappelle évidemment Dupuy-Berberian ou Jean-Philippe Peyraud (qui est également un auteur de « La comédie illustrée »), il aborde dans cette nouvelle série intitulée « Les filles » une BD de type « tranche de vie » très fouillée et au ton étonnamment juste. Elles sont cinq : Bénédicte (Ben pour les copines »), Muriel (Mumu), Leïla, Anna et Chloé. Elles se retrouvent pour une pyjama-party qui prendra toute la nuit. En quoi ça consiste ? C'est très simple. Chacune amène son pyjama ou ce qui en tient lieu, l'enfile, s'affale sur une bout de lit ou de divan et déballe « ses petites affaires ». Les cinq jeunes filles -elles ont vingt ans- parlent de leurs mecs, de leurs doutes, de leurs frustrations, de leurs envies, de leurs projets, de leurs coups de gueule. C'est drôle, c'est frais, c'est indiscret. Christopher aurait planqué un enregistreur dans une vraie pyjama-party que ça n'aurait pas donné autre chose. Dans ce huis-clos de 46 pages, on savoure les dialogues, les répliques, les petits retournements de situation, les moments plus fous, les anecdotes croustillantes qui ressortent -la nuit aidant-, la complicité qui peut unir ces jeunes femmes en l'absence de mec. Un grand moment de plaisir tout simple. Un beau moment de BD aussi, car le dessin de Christopher convient parfaitement à l'ambiance qu'il décrit ; tout ce qui est superflu est négligé au profit des visages, des corps et des expressions des cinq protagonistes. Pour sa première BD en couleur grand format (des couleurs réalisées par Scarlett Smulkowski que l'on voit décidément partout), Christopher réalise un sans faute ! C'est un peu comme si Julie, Claire, Cécile et les autres sonnaient tout à coup vraiment juste
Persepolis - tome 1 (Persepolis) par Thierry Bellefroid
« Persépolis » tome 1, par Marjane Satrapi. A L'Association.

Marjane Satrapi est la première dessinatrice de BD iranienne publiée en français (ou publiée tout court, je n'ai pas les moyens de vérifier) Elle entre dans la bande dessinée grâce à Christophe Blain et surtout à David B -dont l'influence sur son graphisme est évidente-, deux des piliers de l'actuel renouveau français de la BD lancé par L'Association. Dans ce premier livre autobiographique, Marjane -que ses parents surnomment Marji- nous raconte son enfance. Et quelle enfance. Son père roule en Cadillac, ça peut paraître banal, mais l'histoire ne se passe pas aux Etats-Unis, elle se déroule... à Téhéran, à la veille de la Révolution Islamique. Et c'est une petite fille de huit à dix ans qui va vivre la chute du Shah et l'avènement d'un régime de terreur qui a fait couler beaucoup d'encre mais qu'elle dépeint ici sous un jour nouveau, personnel, engagé. Oeuvre courageuse, essentielle, qui prouve une fois encore que certains auteurs aujourd'hui arrivent à faire parler la BD de choses graves, elle nous livre cette vision inédite des derniers moments de l'ancienne république iranienne. On a le souffle coupé en découvrant cette face cachée de l'Histoire, mais aussi cette sincérité et cette innocence retrouvées à travers le médium dessiné. Car lorsqu'elle raconte, Marji a à nouveau huit ans. Elle retrouve le chemin des questions qu'elle s'est posée, des réponses qu'on lui a données, de l'admiration qu'elle a eue pour cet oncle emprisonné. On ne sent pas encore vraiment la peur, mais on sent que le prochain livre sera sans doute plus bouleversant encore. A lire absolument.
Nègres jaunes par Thierry Bellefroid
« Nègres jaunes » de Yvan Alagbé, chez Amok.

Avec Olivier Marboeuf, Yvan Alagbé est la cheville ouvrière de la revue « Le cheval sans tête » (où est paru ce récit en 94) et des éditions Amok elles-mêmes. Sachant que cette maison d'édition indépendante tente depuis ses débuts d'allier la recherche graphique et narrative à l'action culturelle et politique, il était naturel qu'elle publie finalement cette histoire en album. Nègres jaunes est un récit dérangeant, oppressant. Difficile de le lire sans ressentir un certain malaise, car il ne traite pas seulement de la différence et du problème des sans papiers, il s'attaque aussi à la solitude ou aux relations de pouvoir et de dépendance. Deux réfugiés béninois en situation illégale sont pris en sympathie par un ancien policier harki, Mario, qui se fait fort de leur trouver des papiers. Sans ressources, ils se laissent plus ou moins faire par leur bienfaiteur dont la générosité cache une soif de reconnaissance immodérée. Bien vite, c'est une totale dévotion qu'il leur demande. Et le récit bascule, glauque, vers le cauchemar. C'est noir, très noir. Noir comme l'humour et les chemises du même nom. Car le fascisme peut prendre toutes les formes, y compris celle de la domination ordinaire sur les plus faibles. Remarquable à plus d'un titre, cet album est en outre dessinée avec beaucoup de talent, au pinceau et à l'encre de Chine, sur les traces d'un Edmond Baudoin à qui il ne pourrait que plaire.
Si j'ai bonne mémoire par Thierry Bellefroid
« Si j'ai bonne mémoire » par Alexis Robin, dans la collection Tohu Bohu des Humanoïdes Associés.

Première BD pour Alexis Robin (à ne pas confondre avec Thierry Robin), scénariste et dessinateur à la fois. En l'ouvrant, on est séduit d'emblée par une mise en page sobre, un découpage efficace et un lavis très réussi qui travaille beaucoup sur la matière (en employant notamment un papier très épais dont la trame se révèle sous les gris les plus clairs). Bien sûr, les visages ont quelques défauts, les uns ont les joues trop rebondies, les autres ont des proportions un peu caricaturales. Mais globalement, Alexis Robin entre dans la BD par la grande porte. Il le fait d'autant plus qu'il signe une histoire très intéressante. J'avoue avoir eu peur en lisant les premières pages. Qu'est-ce que c'était que cette histoire d'un type qui se souviendrait -en la voyant passer dans la rue- qu'il a dit je t'aime à une femme mais qui aurait tout oublié du reste : son nom, quand et comment ils se sont rencontrés, etc... ? Le syndrome « XIII » allait-il à nouveau frapper ? A priori, ça sentait le roussi. Mais Alexis Robin a réussi à mettre ces ingrédients dans un shaker personnel qui retourne toutes les suppositions et les doutes du lecteur comme une crêpe. Son récit est en fait une histoire complexe, qu'on n'arrive pas à cerner avec certitude avant la fin et qui s'apparente finalement à un thriller. Une histoire intriguante et noire, une chute en avant qui entraîne les protagonistes malgré eux sur une pente dangereuse, fatale. Bien construit, sans longueurs malgré sa taille impressionnante (175 pages), cet exercice sur la mémoire et ses doutes est une réelle réussite.
« From Hell, une autopsie de Jack L'Eventreur », par Alan Moore et Eddie Campbell. Chez Delcourt.

570 pages ! 570 pages inoubliables. Quand vous refermerez cet album, sachez qu'il vous poursuivra pendant plusieurs jours. Sachez que tout ce que vous lirez ensuite vous semblera fade et superficiel. Alan Moore n'est pas seulement un tout grand scénariste et le maître anglais du genre. Il prouve ici qu'il est aussi un véritable écrivain, au sens noble du terme. Car « From Hell » est plus qu'une BD. Ou plutôt, est une sorte de méga-BD. Pas tant par la taille que par la profondeur de son propos, la qualité de son approche. Plonger dans cette autopsie, c'est oublier tout ce qu'on croit savoir de l'Angleterre victorienne et du mythe de Jack L'Eventreur, si affadi par des générations de navets cinématographiques. Basé sur la plus solide documentation qui soit (42 pages d'annotations expliquent les sources de chacune des scènes retenues dans l'album !), From Hell est une démonstration d'intelligence et de maîtrise du scénario. Moore démontre comment une tentative de chantage finalement presque mineure va permettre par représailles à l'un des personnages les plus influents de la Haute Société de perpétrer des crimes rituels démoniaques. Alan Moore a choisi de ne pas privilégier l'enquête. Au contraire, il remonte loin en amont et reconstitue les faits de manière « clinique », nous permettant d'entrer dans le cheminement intellectuel du tueur, d'assister à la naissance de son mythe façonné en grande partie par la presse, de comprendre comment l'énigme a pu demeurer non-élucidée. C'est tout simplement captivant. Difficile d'en dire davantage, car trois jours après la lecture de cette intégrale, les mots me manquent encore pour en parler. Ne vous laissez pas rebuter par l'épaisseur de ce livre ni par le traitement sombre et sans artifice d'Eddie Campbell. Une fois passé le temps d'adaptation que nécessite la mise en place de nombreux personnages pas toujours faciles à reconnaître, vous ne pourrez refermer cet album qu'après en avoir lu la dernière ligne. Autant dire qu'il vous faut une demi- journée devant vous, au moins, pour oser l'ouvrir...
Révolution par Thierry Bellefroid
« Révolution » par Manara, chez Albin Michel.

On a plutôt envie de dire que cet album n'est pas... une révolution, en dépit de son titre. Manara ne fait pas dans la dentelle (en général, il est plus prompt à l'enlever, la dentelle...) et ça se voit. Son héroïne, une jolie (ça vous étonne ?) danseuse du nom de Kay va se retrouver embarquée dans une histoire totalement abracadabrante avec le directeur artistique qui vient de l'engager pour la télévision. Au moment où Kay enlève sa petite culotte, bardaf, des méchants cagoulés investissent le bureau du directeur artistique en question. Leur mission : kidnapper le bonhomme. Ils prennent la jeune fille avec eux (pas de témoins, on ne sait jamais, elle pourrait reconnaître la marque des cagoules !) et vlan, elle fera tout le reste de l'album sans culotte (ça serait pas arrivé si elle avait choisi de se faire kidnapper dans un album de Walthéry, moi je vous le dis). Kay, qui a beaucoup de ressource, parviendra à échapper à ses ravisseurs, menottée à son directeur artistique qui est aussi pleutre qu'une meute de teckels face à un pitt-bull. Et pendant ce temps, on découvre pourquoi ce vieux débris s'était fait kidnapper. Le monde est en pleine révolution. Un nommé Robespierre (rassurez-vous, c'est un pseudo) a décidé de juger et de passer par la guillotine tous ceux qui faisaient de la télévision. Ca commence par un journaliste sportif, puis par un directeur de l'info et devrait suivre au bout du compte notre directeur artistique en fuite. Tout ça est très gros. Manara y livre au passage son dégoût pour la télévision. Mais il le fait avec bien peu d'élégance, surtout lorsqu'il juge les publicitaires pour la raison qu'ils vendent leurs produits en y ajoutant de la fesse... ce qui est exactement son cas à lui ! A moins qu'il ne s'agisse là de la quintessence du second degré ? A priori, tout cela n'a ni queue ni tête et la fin est complètement tarte. Manara est capable de tellement mieux ! Faut-il qu'on lui fasse relire « Le Déclic N°1 » ?
Comme une rivière par Thierry Bellefroid
« Comme une rivière » par Wazem. Dans la collection Tohu Bohu des Humanoïdes Associés.

Que dire de cet album de près de 110 pages si ce n'est tout d'abord qu'il est tiré en longueur ? J'aime les silences dans la BD, les choses qui ne se déroulent pas forcément à toute vapeur. Mais ici, Wazem nous promène, surtout dans les 50 premières pages. Il nous dira que c'était pour installer un climat. Certes, mais point trop n'en faut, au risque de perdre le lecteur en route. Le soliloque pitoyable d'un vieil homme veuf au fond des bois n'est pas des plus excitants. Mais passons. La confrontation entre ce vieil homme et son fils parti depuis de longues années à la ville est, lui, très réussi. Cela sauve donc l'album et lui confère un attrait certain. Il y a beaucoup de sensibilité dans la seconde partie de l'histoire où chaque petit geste de la vie peut prendre des dimensions nouvelles.
Reste un problème et il est de taille. La première page, c'est du Derib. Après un album précédent qui empruntait beaucoup (trop ?) à Pratt, ça ressemble presque à un nouvel hommage. Mais quand on avance dans l'histoire et qu'on croise successivement les styles de Fred, de Blain, de Blutch et de Dupuy et Berberian pour ne citer qu'eux, l'hommage tourne au carnage. D'accord, Wazem sait tout faire. D'accord, il peut sur une même page « chausser » les styles de presque tous les maîtres du noir et blanc. Mais quel intérêt ? Et surtout, quel plaisir, pour le lecteur, de voir du Dupuy-Berberian en moins bien, perdu dans une planche traitée à la manière de Blutch ? Il y a des styles qui se marient difficilement. Il y a surtout cette impression très dérangeante que Wazem n'a pas, lui, de style. Et qu'il se cherche à travers ceux des autres. Viendra-t-il démentir cette impression avec un album au graphisme réellement personnel un jour ? Je l'espère.
Congo Bill par Thierry Bellefroid
« Congo Bill » par Zezelj et Cunningham. Chez Mosquito.

Remarquable album à mi-chemin entre fiction historique et fantastique, ce « Congo Bill » est dérangeant. Le climat dans lequel baigne l'histoire, d'abord. A la limite du territoire du Zaïre (on est encore sous le régime de Mobutu, avant que le Zaïre ne soit rebaptisé Congo), sur le territoire des gorilles qui jouxte le Rwanda, un étrange message a été lancé par on ne sait qui à l'adresse d'un homme des services secrets américains, Devilin DuPaul (habile jeu de mots : Devil-In, l'homme qui incarne le diable). Les têtes de 108 tutsis plantées sur des pieux forment son prénom, vu du ciel. Devilin DuPaul débarque donc à Kinshasa puis remonte le fleuve pour une mission ultra-secrète dont même ses hommes ne savent rien. Et plutôt que de faire de DuPaul le héros de l'histoire, Scott Cunningham a choisi de suivre l'un des « snipers » embarqué dans l'expédition, un noir aux yeux bleus hanté par une vision récurrente, celle d'un enfant qui l'aurait reconnu lors d'une exécution à distance. Cet Afro-américain découvre l'Afrique et ses rites, s'interroge sur la mort, sur sa mort possible, ne cesse de remettre en cause sa présence en ces lieux. Très conforme à la réalité, le Congo -ou plutôt le Zaïre- auquel il est confronté lui renvoie l'image d'une ancienne colonie laissée à l'appétit des prédateurs, Américains en tête. Mais il n'y a pas qu'eux. L'ancien colonisateur belge n'est pas épargné. Mobutu en prend pour son grade, lui aussi, avec une excellente description de ses méthodes d'enrichissement personnel. Kabila lui-même (l'actuel président du Congo, ndlr) n'est pas oublié, puisque les auteurs s'attachent à démontrer comment il conclut des alliances très « rentables » pendant sa guérilla contre Mobutu. Mais au-delà de sa dimension politique, presque pamphlétaire parfois, cet album est une vision d'apocalypse (et le terme n'est pas employé par hasard, « Congo Bill » rappelle « Apocalypse Now » par certains de ses aspects). Il y a « quelque chose » dans les arbres, bête ou démon, qui décapite tous ceux qui s'aventurent dans la forêt. « Quelque chose » d'inquiétant, de terrible, qu'il va falloir découvrir et détruire. L'ambiance est oppressante, le noir et blanc n'empêche pas le Croate Danijel Zezelj (auteur d'un très noir « Invitation à la danse » chez le même éditeur) de faire passer beaucoup d'atmosphère et de mystère à travers son dessin acéré. Le découpage est remarquable et la scène finale est tout simplement fantasmagorique. On oscille sans cesse et avec beaucoup d'intelligence entre réalité et fiction pour aboutir, halluciné, à la fin d'un suspense maintenu pendant près de 90 pages.
« En attendant Fillasse », une aventure de Barjouflasque, par Mattt Konture. Dans la collection Mimolette de L'Association.

A l'heure où il est de bon ton de trouver les fondateurs de L'Association un peu trop éloignés de leurs principes fondateurs et facilement attirés par les grandes maisons d'édition, la moitié d'entre eux est tout de même toujours en train de faire de la résistance. Killofer, dont on attend avec impatience un opus sans concession à paraître au Seuil, Jean-Claude Menu, peu productif mais néanmoins toujours réellement « alternatif » (il a porté à fond le projet « Comix 2000 »). Et Konture, qui nous offre d'un coup un seul deux nouveaux recueils à L'Asso. Bref, si la maison a grandi et s'est professionnalisée, elle ne se renie pas pour autant. Konture est sans doute le plus « anti-commercial » de tous. Publiés dans des revues et des fanzines divers (A table, Jade, Jambon Blindé, La Monstrueuse, etc...) ses récits semi-autobiographiques sont difficilement déchiffrables et ressemblent souvent à des gribouillages d'ado baba cool obsédé par l'oisiveté, le shit et les coups de déprime. Mais derrière cette façade se cache un petit monde peuplé de clins d'oeil. Konture dialogue sans cesse avec Barjouflasque, son « héros » tantôt barje tantôt flasque. Il se montre, se dessine, se déforme, joue sur les codes de la BD, finit par intervertir les préséances. Qui est le vrai créateur de l'histoire, finalement ? Le dessinateur ou le héros qui l'interpelle sans cesse ? A ce petit jeu, Konture est très fort. Et si on se laisse prendre, si on accepte ce dessin foisonnant qui rappelle parfois le génial Crumb, on lira Headbanger (l 'autre nouveauté) ou ce Barjouflasque en se disant que peu de maisons d'éditions alternatives ont su garder leur cap comme l'a fait L'Association pendant 10 ans, tout en arrivant à grandir et à se diversifier.
« L'enquête corse » de Pétillon. Chez Albin Michel.

Ça commence comme un remake d'Astérix en Corse en version moderne. On a l'impression que tout ce qu'on lit, Gosciny nous l'a déjà servi avec génie il y a des décennies. Et pourtant, on marche. Parce que la caricature, pour grosse qu'elle soit, est vachement bien tapée. Et parce que Pétillon va finalement beaucoup plus loin que Gosciny. Non seulement il s'attaque au caractère réputé irascible des Corses, non seulement il souligne leur farouche volonté d'indépendance, leur attachement au clanisme, leur rancune tenace... mais il y a joute les éléments contemporains sans lesquels la Corse ne serait pas la Corse, du moins en BD ! On a donc droit à des flics pas curieux par convois entiers, à un enquêteur qui risque sa peau simplement en demandant si quelqu'un a vu l'homme qu'il cherche, à des sous-factions indépendantistes rivales, à des cafés et des mairies qui explosent plus vite que leur ombre... tout un petit monde que croque joyeusement Pétillon avec l'air de ne pas y toucher. C'est drôle, qu'on le prenne au premier ou au second degré. Ce douzième Jack Palmer est une réussite. Et même s'il ne plaira forcément pas à tout le monde, il a le mérite de sortir en pleine actualité. Aux dernières nouvelles, Pétillon devrait être présent au festival de BD de Bastia, au printemps prochain. Avec une garde rapprochée ?
Trinité par Thierry Bellefroid
« Trinité » par Ambre. Chez Six Pieds Sous Terre.

Après l'ambitieux « Journal d'un looser » réalisé avec Lionel Tran et paru l'an dernier chez le même éditeur, on pouvait attendre un nouvel album grand format. Il n'en est rien, « Trinité » paraît dans la jeune collection Plantigrade, c'est un petit album de 64 pages. Au-delà, on reconnaît la patte de ce peintre et illustrateur lithographe qui manie parfaitement le noir et blanc. Dans ce récit intimiste et fantasmagorique où nous suivons Coeur, Ventre et Tête, les trois « héros » cartographes, Ambre joue sur les contrastes. Tantôt abstraits, tantôt saisissants de vérité, ses décors sont un quatrième acteur. L'architecture de cette ville abandonnée ménage quelques très beaux dessins. Mais la succession de cases et de pleines pages du chapitre trois, beaucoup moins figuratives, provoquent également des émotions chez le lecteur. Du moins s'il accepte de pénétrer un univers qui fait fi de la plupart des codes de la BD. Car il n'est jamais aisé d'entrer dans ce type de récit, moins mû par une logique scénaristique que par une volonté artistique. Ambre donne à voir, à rêver. Et à revenir en arrière, à la recherche d'une image restée floue. Pour amateurs d'art et de BD alternative.
L'Age d'Or (WildC.A.T.S X-Men) par Thierry Bellefroid
« L'âge d'or », tome 1 de la série Wildc.A.T.S X-men. Par Lobdell et Charrest. Chez Soleil.

Soleil s'attaque au Comics US et ma foi, s'y prend plutôt bien. En témoigne ce premier tome d'une série qui réunit deux mythes. D'une part les Wildc.A.T.S (pour « Covert Action Teams ») qui réunit un groupe de combattants génétiquement altérés dépendant des services secrets du gouvernement. De l'autre, les X-Men, des Super héros aux superpouvoirs initialement versés dans la lutte contre le crime à New York et récemment immortalisés par le cinéma. Désormais, les voilà qui combattent ensemble sous la plume de Scott Lambdell. Mutants, extraterrestres, humains et hybrides n'ont qu'un but : sauver la planète des envahisseurs qui la menacent. Dans ce premier volume, on retourne dans le temps jusqu'aux années quarante. Les nazis sont en fait des Daemonites et deux de nos héros vont tout faire pour les empêcher de nuire. L'un appartient aux X-Men, c'est Wolverine. L'autre aux Wilc.AT.S, c'est Soeur Zealot. La rencontre est explosive, parfois drôle, purement « américaine », mais c'est bien ce qu'on espère quand on lit un comics. Et au final, on est pas déçu, notamment grâce au stupéfiant traitement graphique de Travis Charrest !
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