Les 1231 critiques de Thierry Bellefroid sur Bd Paradisio...

Nuit polaire (Golden City) par Thierry Bellefroid
« Nuit polaire », le tome 3 de la série Golden City, par Pecqueur, Malfin, Schelle et Rosa.

Un jour, Golden City pourrait voler la vedette à Aquablue. Si la SF écolo du second semble en effet tenir la route, elle ne bénéficie plus pour autant d'un courant de mode aussi efficace qu'à ses débuts. Golden City, en revanche, est en phase totale avec son époque. L'histoire d'Harrison Banks remplacé par un clone à la tête de Golden City pendant que l'original croupit dans un bagne de l'Antarctique à l'abri des regards, contient tous les ingrédients des bonnes séries. D'abord, elle ne s'essouffle pas. Ensuite, le dessin de Malfin (et les couleurs de Schelle et Rosa) est à la fois consensuel et très réussi. Enfin, il y a d'une part le héros qui subit l'injustice depuis les débuts de l'histoire et deux personnages de femmes qui incarnent les deux contraires que sont le Mal et le Bien. Soeur Léa, peut-être un peu effacée jusqu'ici, devient même un personnage clé dans le scénario de ce troisième album. Pecqueur enchaîne les événements à un rythme soutenu, mais il faut quand même admettre une chose : ses albums sont vite lus. Avec pour corollaire que l'on reste à chaque fois un peu plus sur sa faim. Il lui faudrait une petite vingtaine de pages de plus pour rassasier pleinement le lecteur. En dehors de cette petite remarque négative, rien à dire, Golden City est en vitesse de croisière pour le plus grand plaisir de tous...
L'Outrage (Tirésias) par Thierry Bellefroid
« L'outrage », tome 1 de la série « Tirésias », par Le Tendre et Rossi. Chez Casterman.

On attendait depuis longtemps un prolongement à « La gloire d'Héra ». Non pas une suite, mais un album dans le même ton. Cinq ans ont passé. Et le résultat est à la hauteur des espérances. Il les dépasse, même, tant le dessin de Christian Rossi a évolué entre les deux albums. Poser côte à côte « La gloire d'Héra » et ce premier volume de « Tirésias » vous en convaincra. Rossi est ici au sommet de son art avec un dessin vigoureux, plus réaliste, plus personnel aussi (on l'a trop longtemps présenté comme un simple « suiveur » de Giraud) et magnifiquement mis en couleurs. Quant à l'histoire, on peut faire confiance à Serge Le Tendre, il sait ce que c'est. Tirésias nous emmène à Thèbes, dans un monde cruel dominé par la guerre, la gloire personnelle et la soumission aux dieux. Un monde qui semble aux antipodes du nôtre mais que le scénariste nous rend plus proche que jamais. La recette est à la fois simple et difficile à mettre en pratique avec tant de brio : créer des héros mythiques aux histoires universelles, captivantes. Tirésias en fait partie. Son destin incroyable correspond très exactement à ce que Le tendre maîtrise le mieux : le sens de la quête. Une quête pour retrouver son identité, une quête pour quitter le corps de femme dans lequel il est emprisonné, lui, le fier guerrier. C'est passionnant, admirablement raconté et tout aussi bien dessiné.
Temps nouveaux par Thierry Bellefroid
« Temps nouveaux » de Tomaz Lavric (TBC) dans la collection Grands Chapitres des éditions Glénat.

Il y avait d'abord eu le fameux « Fables de Bosnie », puis « La cavale de Lézard ». Voici que TBC entre de plein pied dans l'univers Glénat avec deux albums. L'un est paru, il s'agit de ce « Temps nouveaux ». L'autre est à paraître, ce sera l'un des dix tomes du Décalogue, l'histoire imaginée par Frank Giroud (voir dossier par ailleurs). A n'en pas douter, celui-ci sera le plus personnel. Plus encore, peut-être, que « Fables de Bosnie » auquel on pouvait reprocher un certain académisme. « Temps nouveaux », c'est la Slovénie d'aujourd'hui, cette petite république jouxtant l'Autriche qui n'a guère eu de problèmes à se séparer de la Grande Yougoslavie, au début des années 90. Après une guerre éclair contre les troupes yougoslaves, les Slovènes gagnaient en effet le droit de devenir indépendants et ils allaient se tailler une réussite économique sans commune mesure avec ce que vivraient leurs voisins. Leur chance : avoir sur leur sol une unité ethnique et religieuse, contrairement à la Croatie, à la Bosnie-Herzégovine ou même à la Serbie. Dix ans plus tard, la Slovénie mesure le prix qu'elle a payé pour être dans le peloton de ceux qui réussissent. L'ancienne république socialiste de la Yougoslavie titiste est aujourd'hui confrontée à de nouveaux dangers, à des plaies jadis inconnues qui la gangrènent : violence urbaine, chancres, drogue, bandes néo-nazies, prostitution organisée, anciens membres de la police secrète reconvertis en « recouvreurs » de dettes... Ce sont ces phénomènes et ces gens que TBC a choisi de raconter à travers quelques courts récits durs, directs, sans concession. Une image fulgurante de ce que le capitalisme a pu amener dans un pays qui n'y était pas préparé et qui peut aussi bien s'appliquer aux pays baltes, aux anciennes composantes de l'URSS ou au reste des Balkans. Pour y avoir voyagé ces dernières années, j'ai retrouvé dans cet album des ambiances et des sensations plusieurs fois éprouvées dans ces pays de l'ex-bloc communiste. TBC, qui y vit, les rend mieux que personne et s'autorise un album engagé, polémique, dénonciateur. Un album que son trait noir et blanc réaliste transcende d'un bout à l'autre. Jouant tantôt sur les aplats noirs tantôt sur la précision de l'encrage, Tomaz Lavric prouve à ceux qui en doutaient encore qu'il est un grand dessinateur... et qu'il a des choses à dire !
Attaque (Capricorne) par Thierry Bellefroid
« Attaque », le tome 6 de la série Capricorne, par Andréas, dans la collection Troisième Vague du Lombard.

Voilà un album qui relance l'intérêt d'une série qu'on croyait entrée en phase quasi routinière. D'un coup, Andréas balaie les ingrédients des cinq premiers tomes, ou presque. Il ne garde d'eux que le personnage central, Capricorne. Tous les seconds rôles, tous les faire-valoir sont absents. Absentes également, la ville de New York, la grande bibliothèque, les histoires de SF basées sur les sources énergétiques. Cet album -qui pourrait aussi bien s'appeler « Rupture »- nous emmène dans une réplique à peine transformée de l'univers concentrationnaire nazi. Victime d'une rafle dans laquelle ont été emportés plusieurs centaines de voyants, chiromanciens et autres médiums, Capricorne se retrouve dans un camp de concentration, aux mains de tortionnaires sadiques, ivres d'autorité ; ils servent la secte mondiale « Concept » qui a pris le pouvoir un peu partout, par la force des armes. Plus réaliste que jamais, le récit privilégie les ambiances, les couleurs et même les cadrages classiques auxquels Andréas tourne généralement le dos. Le résultat est à la mesure de l'entreprise. On est véritablement prisonnier du climat de cet album. Et on redécouvre à quel point Andréas, débarrassé de ses tics, peut faire passer émotions et action avec un minimum d'artifices. Difficile, au stade actuel, de savoir où va mener cette histoire (dont la fin est assez déconcertante et ouvre à toutes les suppositions) mais une chose est sûre, elle témoigne d'une vitalité et d'une volonté de ne pas céder à la facilité qui honorent cet auteur de cinquante ans... C'est aussi un acte de courage et de foi pour un dessinateur né dans le pays responsable des camps de concentration.

Le contrat par Thierry Bellefroid
« Le contrat » de Paul Gillon. Chez Albin Michel.

Il y a cinquante ans qu'il dessine et Paul Gillon ne semble pas ressentir la moindre lassitude. Il le prouve une fois encore avec ce « contrat », récit de science-fiction comme il les aime, c'est-à-dire gentiment érotique, mais aussi et surtout politico-psychologique. Au début, l'histoire fait penser à « Peau de chagrin », de Balzac. On retrouve l'idée d'une vie qui s'amenuise à mesure qu'un objet perd peu à peu de son intégrité. Ici, l'objet en question est le corps du héros, Gerfaut. Homme d'affaires séduisant (et séducteur), Gerfaut est envoyé à Chaisemorte, un pénitencier, pour avoir « volé » le coeur de la petite amie d'un puissant homme d'affaires avec lequel il est en cheville. L'homme en question monte une machination et avant d'avoir pu réaliser quoi que ce soit, Gerfaut intègre ce pénitencier qui sert de banque d'organes pour les plus riches du pays. Mais on lui fait une proposition. S'il accepte de léguer des morceaux de son corps, on lui fabriquera des prothèses, on le libérera et surtout, on le guidera pour qu'il puisse accomplir sa vengeance. Gerfaut accepte et se retrouve d'abord privé de quelques centimètres carrés de peau, puis de membres entiers pour finir sous l'apparence d'un zombie tel qu'on peu le voir en couverture de l'album. A mesure qu'il est dépossédé de son corps, il avance dans le règlement de compte téléguidé qu'il a entrepris. Mais le temps est compté. Et les ennemis d'hier sont peut-être moins importants que les « alliés » d'aujourd'hui. Gerfaut entame une descente aux enfers au terme de laquelle il pourra découvrir toute l'horreur de sa situation, un final qui n'est pas sans rappeler « Le vol des cigognes », le roman de Jean-Christophe Grangé. On pense aussi à « Double Je », le diptyque de Toff et Béhé récemment réédité sous forme d'intégrale par Vents d'Ouest. Pourtant, la ressemblance ne concerne qu'une partie du propos. Car Gillon nous offre une histoire originale, qui se sert habilement des éléments d'anticipation pour exacerber les côtés les moins glorieux de la nature humaine.
Fondation Aquablue (Aquablue) par Thierry Bellefroid
« Fondation Aquablue », tome 8 de la série Aquablue, par Cailleteau et Tota. Chez Delcourt.

On a déjà écrit beaucoup de choses sur ce nouveau cycle d'Aquablue. Qui ignore encore que désormais, Nao consacrera son temps à défendre la nature à la tête d'une fondation librement inspirée du modèle de la Fondation Cousteau ? Qui ignore que Ciro Tota, désormais seul dessinateur à bord, est de taille à remplir le contrat ? Son dessin est vif, précis, à la fois carré, musculeux et en phase avec les options choisies. Sur une planète nommée Doyle-1800 (la référence à Conan Doyle semble évidente) menacée par un voïvode (un trou noir de petite taille, dirons-nous pour ne pas être trop technique) vivent des espèces préhistoriques que Nao s'est mis en tête de sauver, à la manière de Noé avant le déluge. Mais il n'est guère facile d'embarquer des dinosaures à bord d'un engin spatial. Surtout quand un troupeau rendu fou par des rabatteurs démolit toutes les installations sur son passage. Et c'est la rencontre entre le « gentil » Nao et les « méchants » chasseurs, une puissante société qui organise des safaris pour milliardaires. On croit qu'on va assister à une bagarre en règle. Et finalement non, car Thierry Cailleteau est loin d'être à court d'arguments : un troisième type de protagonistes entre dans la danse. La SF écolo semble en tout cas avoir encore de beaux jours devant elle. Nul doute que ce nouveau cycle rencontrera les faveurs des aficionados. Mais peut-être a-t-il perdu un rien de la magie d'antan... En tout cas, après avoir mis Cybot très en avant dans « Etoile blanche », on regrette que l'amusant robot joue davantage ici les moralisateurs que les réels complices. Même si cela n'enlève rien à l'humour général, toujours aussi bien dosé par Cailleteau.
Monsieur Khol par Thierry Bellefroid
« Monsieur Khol », par Dieter et Moynot. Dans la collection « Carrément BD » des éditions Glénat.

Ceux qui connaissent les nombreux albums qu'ont déjà produits Dieter et Moynot (ensemble ou pas) ne manqueront pas d'être étonnés par cette histoire atypique. Une histoire qui profite d'une collection tout aussi atypique pour s'éloigner des canons de la bande dessinée. Moynot, qui n'est jamais le dernier à s'essayer à de nouvelles techniques, s'aventure ici dans l'aquarelle directe en omettant l'étape de l'encrage. Sous la peinture, le crayonné se laisse deviner, mais les contours sont plus flous, les traits moins cassants. L'ensemble dégage une impression de légèreté, un parfum aérien. Et cela tombe bien, puisque l'histoire de Monsieur Khol, c'est celle d'un homme sans visage et sans personnalité qu'un simple séjour à la campagne va révéler à lui-même. Un scénario qui surprend quand on connaît le cursus des auteurs, plus prompts à écrire des histoires policières ou gentiment anarchistes que des chroniques campagnardes. Force est pourtant de constater qu'ils sont très à l'aise dans cet exercice et que l'on ressort de cet album avec l'impression d'avoir pénétré un bel univers. Les couleurs de Moynot sont magnifiques, tout comme la construction des pages. Pas de blanc entre les cases, tous les dessins d'une planche se touchent et composent une sorte de tableau narratif. C'est du beau travail. Seul le début paraîtra peut-être un rien académique. Mais il serait dommage de s'y attarder, tant la douce poésie de cette histoire est touchante. Elle s'accommode en tout cas parfaitement d'un dessin dégagé des contraintes, peu soucieux de l'exactitude des lieux, presque impressionniste. Et elle tire parti du format carré de l'ouvrage, ce qui est bien sûr la moindre des choses pour un album de cette collection !
Les vagues de la mer (Zambada) par Thierry Bellefroid
« Les vagues de la mer », tome 1 de Zambada, par Autheman et Maltaite. Dans la collection Bulle Noire des éditions Glénat.

Avec « Zambada », c'est un peu le Autheman de Vic Valence que nous retrouvons. Il y a le même ton désinvolte, la même faune échouée sur une île des tropiques, le même humour. Mais sous le trait d'Eric Maltaite. A l'époque de Vic Valence, Autheman lui-même avait suggéré à Henri Filippini de faire dessiner ses histoires par un dessinateur qui aurait un trait plus commercial. Cette fois, c'est le cas et c'est dans la collection du même Henri Filippini que réapparaît Jean-Pierre Autheman après avoir « boudé » Glénat pendant quelques années au profit de Dargaud et d'Albin Michel. La boucle est donc bouclée.
« Zambada » est un excellent polar ensoleillé. Sur une petite île imaginaire, Delgado dirige une police locale très laxiste. Un peu alcoolo, très amoureux d'une femme indigène qui le pousse à considérer ceux-ci avec sympathie, Delgado est le prototype du mec qui n'aime pas les emmerdes. Mais quand il découvre qu'un ponte du « continent » a décidé d'en finir avec les indépendantistes locaux, il n'hésite pas à mouiller sa chemise. L'histoire n'est pas toujours très surprenante, mais les personnages et le climat seuls suffisent au bonheur du lecteur. Car Autheman a un don pour écrire ce genre d'histoires et placer dans la bouche de ses personnages nonchalants des dialogues qui sonnent juste. Il a trouvé en la personne du fils de Will le complice idéal. Maltaite retrouve en effet le climat des îles qu'il avait développé dans son dernier ouvrage (Robinsonne, chez Albin Michel) mais il renoue ici avec un dessin plus traditionnel propre à la BD d'aventure et d'humour qui lui va tout aussi bien. En tout cas, il trouve en la personne de Jean-Pierre Autheman le scénariste qui lui manquait pour faire rebondir sa carrière. On ne peut que s'en réjouir.
« Prémonitions », tome 3 de la série « Oki, souvenirs d'une jeune fille au pair », par Godard et Juszezak. Dans la collection Bulle Noire des éditions Glénat.

Souvenez-vous, Oki, c'est cette jeune Japonaise traumatisée par la mort de son fiancé qui décide de tout plaquer pour venir s'installer en France et y vivre, d'abord comme jeune fille au pair (d'où le sous-titre de la série) puis comme traductrice. Voilà que la Yoko Tsuno de l'édition imaginée par Christian Godard (père, entre autres, de Martin Milan, du Vagabond des Limbes mais aussi de la série Le Cybertueur dans la même collection) se retrouve embarquée dans une sombre affaire de manipulation par un certain Pablo Fontane, dont le nom rappelle étrangement celui de... Paco Rabanne. Ce n'est pas un hasard, puisque Fontane a les traits du styliste, qu'il est dans le métier de la mode et qu'il a... des prémonitions ! En clair, la fameuse prédiction apocalyptique que Paco Rabanne nous avait servie pour l'an 2000 -et qui a beaucoup fait parler de lui- aura fait germer cette histoire dans le cerveau du scénariste. Il faut dire que l'affaire est tout à fait plausible (même s'il y a certains éléments dont je ne peux vérifier la pertinence, comme par exemple la santé financière du groupe Rabanne) et que la petite Oki a tout à fait le profil de l'emploi. On y retrouve son protecteur, le gentil flic Lambert Lambert, dans un rôle qui lui va, lui aussi, à merveille. Bref, tout ça fonctionne bien. C'est du Bulle Noire, c'est-à-dire, du polar populaire. De la série B en BD, quoi. On a pas envie tous les jours de lire du Felipe Cava ou du Dave Mc Kean, non ? Alors, même si ça reste en-dessous de ce que fait Jean-Charles Kraehn, et même si le dessin de Juszezak reste le principal handicap de la série, c'est l'occasion d'un gentil défoulement.
Baraka la cata (Choco) par Thierry Bellefroid
"Baraka la cata", une aventure de Choco. Par De Brab et Zidrou. Chez Casterman.

Carine de Brabanter ne se contente pas d'avoir relancé « Sac à puces » aux éditions Dupuis. Forte de son trait rond et chatoyant, elle aborde cette nouvelle série enfantine plus onirique qui lui réussit admirablement. De Brab propose en effet aux plus jeunes un dessin dépouillé, extrêmement clair et en même temps très poétique qui va à ravir à cette histoire animalière placée dans le contexte du cirque. Les personnages imaginés par Zidrou sont excellents, à commencer par le « héros », un petit garçon du nom de Choco qui rêve de monter sur la scène pour faire des numéros avec son papa, regrette le temps où celui-ci et sa maman étaient ensemble (désormais, il passe la semaine dans la roulotte de sa maman et retourne le w-e dix mètres plus loin, dans celle que son papa partage avec une nouvelle partenaire), et est secrètement amoureux de sa « soeur de divorce » comme il appelle la fille de sa belle-maman. L'aventure exalte des thèmes merveilleux, mais aussi celui de l'amitié. Choco est un peu trouillard, ça ne le rend que plus sympathique et plus crédible. Mais quand il faut défendre une cause qui en vaut la peine, il s'appuie sur la sagesse de Madame Ku-Hi (comme Q.I, quoi), la puce savante, et sur la fougue de son amoureuse, Lola Sparadrap (fille de Carmina Burana, une référence que seuls les parents comprendront...). Bref, tout cela est frais, bien emmené, et ma foi, peut ravir un public d'adultes un rien nostalgiques en plus des enfants eux-mêmes.
« Les gamins dans l'espace », par Eric Omond et Alexis Nesme. Chez Delcourt Jeunesse.

Parmi les rares collections de BD pour la jeunesse, celle des éditions Delcourt est incontestablement la plus intéressante. Pour plusieurs raisons. D'abord, le nombre d'albums publiés, qui incite à prendre au sérieux cette collection. Ensuite, la qualité du travail graphique, pourtant très diversifié, de ses différents auteurs. On y trouve aussi bien l'excellent Yoann et son Toto l'ornithorynque que le dessin sensible et merveilleux de Sandrine Revel avec Un ange gardien. On peut désormais y ajouter le talent d'Alexis Nesme. A l'instar de Yoann, justement -et avec le même scénariste, ce qui n'est sans doute pas un hasard-, il renouvelle le genre en poussant très loin le mélange des encres, craies, gouaches ou crayons de couleur. Cela donne un ton, une atmosphère, qui capturent l'attention du lecteur dès la première page. Il y a une vitalité aussi, dans ce dessin, qui est proche de l'animation en BD. Et puis il faut dire que l'histoire que lui a concoctée Omond est particulièrement propice à l'inventivité. Des gamins imprudents se retrouvent catapultés dans l'espace à bord d'une machine prototype et échouent sur une planète inconnue où des robots combattent tout ce qui n'est pas totalement droit et plat : hommes, animaux, objets ou montagnes. Prétexte à une aventure loufoque mais réjouissante, cette histoire est pleine d'une fraîcheur enfantine dont les plus jeunes raffoleront. Ils auront au passage l'oeil aiguisé pour aborder plus tard la BD des « grands », car Alexis Nesme les aura déjà emmené très loin dans ce qu'il est possible de faire, visuellement, en bande dessinée.
« Autoportrait du vampire d'en face », volume 2 des « Lettres au maire de V. », par Alex Barbier. Editions Fréon.

Il est frappant de constater les directions très différentes prises par les deux « leaders » de la BD indépendante francophone, le français L'Association et le belge Fréon. L'Asso -l'aînée, puisqu'elle existe depuis onze ans maintenant- se caractérise par une bande dessinée érudite, privilégiant le noir et blanc et les histoires autobiographiques, cherchant à réinventer la BD tout en continuant à en épouser la plupart des codes. Fréon, au contraire, tente depuis sa création il y a un peu plus de huit ans, de déconstruire le médium en lui appliquant les pires traitements : renoncement aux techniques du dessin lui-même (avec l'apparition des collages, des découpages, des techniques mixtes les plus diverses), abandon presque total des phylactères, narration éclatée, récit non linéaire, appel aux codes du cinéma et de la vidéo... L'une s'appuie sur une culture très française à la fois littéraire et picturale, l'autre se construit par opposition, cherchant à intégrer les arts plastiques à la bande dessinée. Avec pour résultat que Fréon attire dans son giron des auteurs étrangers (Barbier, mais aussi Stefano Ricci ou encore Gabriella Giandelli) qui trouvent au sein de cette petite structure bruxelloise l'interlocuteur éditorial qui leur convient. Fréon fait-il encore de la BD ? Le débat existe, les avis sont tranchés. Je dirais que oui, dans la mesure où ces albums racontent des histoires par une succession ou une juxtaposition de « dessins » (le terme est à prendre dans son acception la plus large) et de texte. En ce sens, l'étrange suite aux « Lettres au maire de V. » (le premier volume était paru en 98) d'Alex Barbier est bel et bien une BD. Elle l'est d'autant plus que pour une jeune génération d'auteurs, Alex Barbier est désormais considéré comme un chef de file -tout comme l'allemand Martin Tom Dieck ou l'italien Stefano Ricci.
Dans cet « autoportrait du vampire d'en face », ce qui frappe d'emblée, c'est le travail sur la couleur. En opposition aux teintes les plus sombres -le noir, entre autres- qui ont pour signification de symboliser la nuit et la mort, on trouve des teintes parfois très vives, souvent très tranchées. Le peintre Matisse (par exemple le tableau « Intérieur au violon », de 1917) employait déjà cette technique ; le noir rehausse la couleur mieux que le plus bel écrin, et guide l'oeil vers elle. L'autre premier étonnement est cette attirance pour les leçons d'anatomie très crues qui parsèment le livre un peu à la manière de dissections cliniques. Elles rappellent l'autopsie poursuivie tout au long de « Gloria Lopez », l'ouvrage majeur de Thierry Van Hasselt paru l'an dernier dans la même collection (voir « coup de coeur » sur ce site, dans la rubrique consacrée aux dossiers). Ce n'est pas un hasard, c'est en effet Thierry Van Hasselt lui-même qui a prêté un manuel à son alter ego français. Si la carnation de Gloria Lopez était un motif d'étonnement et de fascination pour le héros du livre du bruxellois, les organes des vampires exercent sur l'observateur aquarelliste de Barbier le même pouvoir presque « jubilatoire ».
Pour le reste, cet « autoportrait » est une oeuvre poético-fantastique, proche du surréalisme à certains moments, proche de l'écriture automatique à d'autres. Barbier y démontre en tout cas son incontestable maîtrise technique et se laisse aller, sans aucun tabou, à une autopsie maniaque d'un microcosme attiré par la mort, le sang et le sexe, où chacun est le voyeur de l'autre.
« Le phare d'Alvéona », tome 1 des « Larmes d'Ostasis », par Ouali. Chez Soleil.

Voilà un beau premier album, même s'il n'apporte rien de neuf à la BD d'aventure ou d'héroïc fantasy. Construit sur le mythe de l'Atlantide -ce continent englouti avec tout son savoir pour le malheur du reste de l'humanité-, Ludovic Ouali nous propose en guise d'Atlantide, une ville du nom d'Ostasis. Ses secrets sont bien gardés, la légende est peut-être fausse ; d'ailleurs, à force, plus personne ne sait si elle contient un fond de vérité. Cinq héros ne vont pas tarder à le savoir. D'abord, il y a Mossec, taillé dans son costume de héros : grand, beau, musclé, vif, protecteur du plus faible et j'en passe. Il tient une auberge sur une île où personne ne vient en compagnie de sa soeur, Fida, une rouquine qui rappellera peut-être certaine créature « loiselienne » aux lecteurs. Un bâteau aborde, avec un mourant à son bord, et hop, c'est la grande aventure qui commence, comme chez les Thorgal. Mossec et Fida rejoignent les trois autres protagonistes qui vont constituer le groupe de « héros » de cette aventure. Il y a un ami de leur père, sa fille (avec laquelle Mossec a un vieux contentieux) et son jeune petit-fils. Ces cinq personnages sont bien campés et empêchent le lecteur de s'ennuyer, même si la surprise ne l'attend pas à chaque page. Le scénario, classique, se déroule de manière tout à fait linéaire et louche vers quelques autres productions, tout comme les décors qui rappellent parfois un peu trop ceux de Finkel. Mais en dépit de ces petits défauts, on se laisse faire, grâce, notamment, à un dessin lui aussi classique mais efficace et à de belles couleurs. On attend la suite pour voir si Ludovic Ouali a vraiment une belle histoire à nous raconter.
« Deus ex Machina », le tome 5 de la série Carmen Mc Callum, par Fred Duval et Gess. Dans la collection Néopolis des éditions Delcourt.

La collection Néopolis possède quelques beaux fleurons. Deux d'entre eux, Travis et Mc Callum, sont l'oeuvre du même scénariste, Fred Duval. Avec Carmen Mc Callum, Duval a réussi la parfaite symbiose entre le polar pur jus, la BD d'aventure et la SF. De souche irlando-catalane, Carmen, jeune « surdouée » de l'IRA (l'Armée Républicaie Irlandaise) dans les années 2030-2040, est aujourd'hui mercenaire (nous sommes aux alentours de 2050). Au début du premier tome, les auteurs n'hésitaient d'ailleurs pas à en faire un personnage de tueuse sans scrupule, prenant le risque de « confier » leur série à un personnage antipathique. Mais depuis, Carmen s'est humanisée. Et surtout, elle accepte des missions d'intérêt général pour le compte de l'ONU. Après avoir empêché la fusion entre une entité artificielle et le cerveau d'un parrain maffieux japonais en compagnie de son ami hacker « Bugg » dans le premier cycle, elle était embarquée depuis le tome 4 dans une course contre la montre pour sauver des milliers de vies américaines. Résumons la situation. Carmen, engagée par l'ONU, arrêtait de manière spectaculaire un homme recherché par l'Etat du Nevada, Samuel Earp, un fabricant d'armes apparemment protégé par le gouvernement fédéral américain. L'ONU savait que l'homme disposait d'avancées technologiques secrètes dans ses laboratoires et lui évitait le jugement par l'Etat du Nevada s'il laissait aux Nations Unies un contrôle sur ses usines. Mais Earp avait tout prévu. En cas de capture, il lâchait une armée de nanotueurs invincibles sur quatre cibles avec pour mission de tuer toute forme de vie pendant douze heures. Dans ce cinquième album, Carmen tente d'empêcher le carnage. Mais les ennemis sont nombreux et viennent de partout. Et les embrouilles sont tout aussi nombreuses, car la situation s'est considérablement compliquée depuis le début de l'aventure... trahisons, guerres de pouvoir et secrets militaires bien gardés se succèdent page après page. Heureusement, Carmen n'est pas seule. Bugg, qui a pris la place du parrain japonais à la fin du premier cycle a désormais fusionné son cerveau avec une intelligence artificielle. Il devient une sorte de « justicier » à ses côtés. Le rythme est toujours aussi effréné que lors du premier cycle de trois épisodes. Les personnages sont de plus en plus attachants, notamment l'héroïne, Carmen. Le découpage est parfait, les situations sont crédibles. Bref, c'est de la bonne, de la très bonne SF, servie par des protagonistes taillés pour l'aventure. Rien à dire, ce deuxième cycle se conclut comme le premier sur la mention : très bien. Le troisième sera composé de trois épisodes.
« C'est moi le chef », tome 2 de la série « Les années Spoutnik », par Baru. Chez Casterman.

Loin de « L'autoroute du soleil », Baru poursuit cette « autopsie » de ses années d'enfance (« les années Spoutnik » , par référence à l'époque de ce premier satellite envoyé dans l'espace, pour les plus jeunes qui tenteraient de comprendre la portée mystérieuse de ce titre...). Et si le premier album nous avait essentiellement paru sympathique (ce qui n'est pas toujours le plus beau des compliments), il faut admettre que celui-ci est superbe (ce qui est un vrai compliment !). C'est vrai, Baru n'est sans doute jamais meilleur que quand il dénonce violence, racisme et banlieues, ce qui n'est pas le cas ici. Mais cette touchante histoire d'enfance de gosses aussi immigrés qu'insouciants est peut-être la clé pour mieux comprendre ce qui a poussé l'italo-breton Hervé Baruléa (son vrai nom) à créer des univers si intéressants depuis plus de vingt ans. Les dialogues son truculents, les bagarres de mômes valent bien celles des « grands », les situations cocasses se succèdent à un rythme soutenu, les gueules des gamins sont amusantes et puis, il y a cette pointe de nostalgie qui fait du bien juste où il faut. A la manière de ces groupes de heavy metal qui font chavirer les coeurs dès qu'ils font un slow, le rebelle Baru nous donne ici une vision acidulée et régénérante de l'enfance. Un ton unique.
Boule de gnome (Oscar) par Thierry Bellefroid
« Boule de gnome », tome 1 des aventures d'Oscar, par Durieux et Lapière. Chez Dupuis.

Denis Lapière avait-il encore besoin de prouver qu'il était aussi à l'aise dans le registre enfantin que dans les BD adultes comme celles de la collection Aire Libre? Non, sans doute. Son « Ludo » nous a convaincus depuis longtemps. Et à l'opposé, ses collaborations avec Stassen, Gillon ou plus récemment Pellejero sont tout aussi réussies. Bref, le scénariste liégeois tient la forme et il le prouve. Avec un Christian Durieux qu'on attendait dans ce genre d'exercice depuis le magnifique « Benito Mambo » paru aux Humanos dans la collection Tohu Bohu, il réalise ici une très belle histoire qui augure d'une bien jolie série. Révélé par « Avel » chez Glénat (une bonne série injustement boudée par le public qu'il n'est pas trop tard pour découvrir, scénario de Jean Dufaux), Durieux avait enchaîné avec un exercice moins réussi au Lombard (Foudre), avant de surprendre tout le monde avec Benito. Désormais, il mène deux « carrières » de front. Il y aura d'une part le Durieux réaliste, un trait plus sévère qu'il met au service d'Andréas dans la série Mobilis entamée chez Delcourt l'an dernier. Et il y aura le Durieux plus rond, plus naïf, au dessin à la fois dépouillé et expressif, celui d'Oscar. Lapière lui offre sur un plateau les ingrédients d'une jolie série enfantine. Il y a le « héros », Oscar, petit gamin débrouillard qui a fui son orphelinat pour « vivre tout seul », comme il dit. C'est le roi de la tchatche. Il invente comme il respire et se tire, grâce à cela, de toutes les situations. Il est sous la protection d'un SDF, Khartoum, qui se conduit comme son père. Ce duo adorable va tomber sous le charme d'une tout aussi adorable gosse de riche, Gégé. Et jouer au chat et à la souris avec tous ceux qui se sont lancés à leurs trousses. C'est drôle, gentil sans être mièvre, joliment découpé (avec de petites surprises en fin de double page pour maintenir le suspense) et -je me répète- magnifiquement mis en image par Christian Durieux.
Multivitaminé par Thierry Bellefroid
« Multivitaminé », par Woodrow Phoenix et Ian Carney, à La Comédie Illustrée.

Drôle de mélange que celui de ces deux histoires très différentes réunies sous le titre « Multi-vitaminé ». Il y a d'abord un court récit des aventures loufoques de Panta-fourmi, une fourmi justicière abritée par un gigantesque pantalon d'acier aussi truffé de gadgets que la voiture de James Bond. Elle poursuit un cygne barbu qui a décidé de détruire tous les pantalons de la ville. C'est fou, très proche d'un dessin animé sans contrainte, où tout est possible, où le merveilleux côtoie le mauvais goût et le mauvais goût le dispute à l'humour. Drôle, à condition que ce soit à petites doses (ce qui est le cas ici). Et puis, sans prévenir, on bascule dans un univers beaucoup plus réaliste (même s'il est très fantaisiste, lui aussi), celui de deux héroïnes qui vivent leurs aventures à l'agence de détectives Kat&Kat. Sugar Kat et Rebecca Kat sont aussi différentes qu'on peut l'être, bien qu'elles soient jumelles. L'une est la fille la plus jolie et la plus populaire du monde. Même sous ses lunettes noires, n'importe quel clodo la reconnaît. Elle décide de prendre une année sabbatique, délaisse ses affaires très rentables, achète sans la prévenir 51% des parts de la société de détective de sa soeur et l'y rejoint. Rebecca, elle, a toujours vécu dans l'ombre de la belle Sugar. Elle rêve qu'un garçon s'intéresse un jour à elle pour autre chose que pour approcher sa jumelle. En attendant, elle a plutôt les pieds sur terre et voit d'un assez mauvais oeil le « congé sabbatique » de Sugar. Ce couple est drôle et bien exploité par le scénariste, Ian Carney, mais aussi par son dessinateur, Woodrow Phoenix, qui a réussi à donner à Sugar cette apparence de fille parfaite sans pour autant faire de sa soeur un laideron. La mise en page est dynamique et ignore presque totalement le « gaufrier » pour adopter une structure plus éclatée et parfois même très libre qui correspond davantage aux habitudes du comics américain. La ligne est dépouillée, les décors stylisés -voire inexistants-, mais le dessin de Phoenix l'emporte par son dynamisme et sa fraîcheur. Beaucoup moins folle que le court récit de la Panta-fourmi, cette aventure des soeurs Kat m'a semblé plus intéressante et sans doute plus digne de connaître une suite en albums. Il se murmure que Walt Disney aurait acheté les droits et s'apprêterait à mettre de vrais visages sur ceux dessinés par Phoenix...
Politique étrangère par Thierry Bellefroid
« Politique étrangère », par Jochen Gerner et Lewis Trondheim. A L'Association.

Même perdu sur une île déserte, Trondheim écrirait de petites histoires sur le sable, devant sa hutte. Il ne lui faut pas grand chose pour démarrer. La preuve en est cet album réunissant cent strips minimalistes de quatre cases chacun. Difficile de travailler davantage à l'économie ! Pourtant, Lewis Trondheim y transcende son talent. Poussé par la rigueur d'une telle discipline dans laquelle excellent généralement davantage d'Américains que d'Européens, il imagine comment la venue inopinée d'un étranger peut remettre en question toute la vie d'un petit royaume dont nous ne voyons qu'une demi-douzaine de sujets en tout et pour tout. Car les personnages sont aussi peu nombreux que les éléments de décor, il n'est pas utile d'en avoir plus. Il y a le roi, la reine, le chef de la sécurité, un médecin, un geôlier, deux dieux (un blanc et un noir)... c'est à peu près tout. Chaque strip a un début et une fin, il peut se lire sans références aux autres. Mais mis bout à bout, ils forment une histoire savoureuse qui nous en dit long sur la logique, le poids des mots, l'abus d'autorité, le pouvoir, la loi du plus fort... Un exercice brillant, joliment servi par l'encre de Chine un peu épaisse et le dessin minimaliste de Jochen Gerner.
« Green manor, Tome 1 », par Bodart et Vehlmann, dans la collection Humour Libre des éditions Dupuis.

S'il a commencé à dessiner en 1985, c'est un peu plus tard, avec Nicotine Goudron (sur scénario de Yann, albums chez Albin Michel à partir du début des années 90, prépublication dans l'Echo des Savanes) et avec les Affreux (scénario Morel, albums chez Glénat, prépublication dans Circus) que Denis Bodart a rencontré les faveurs du public. Beaucoup ont cependant presque oublié son nom aujourd'hui. Ils s'en souviendront à coup sûr après la lecture de cet excellent premier recueil d'histoires courtes réunies sous le titre générique de « Green manor ». Le point commun entre tous ces récits ? Le lieu et le contexte, d'abord. Nous sommes au « Green manor club », un club anglais comme il en existe tant d'autres, à la fin des années 1870. On y boit et on y devise entre gentlemen. Seul sujet de conversation, les affaires criminelles. Autre point commun entre toutes ces histoires : l'extrême soin qu'y apporte le scénariste Fabien Vehlmann. A chaque fois, il convient de ramasser en quelques pages une enquête singulière, un défi aux lois de la logique, un pari qui a tourné court. Les assassins y sont plutôt sympathiques et leurs méfaits ont l'allure de chefs d'oeuvre. A tel point qu'un des récits du recueil est justement consacré à la tentative de crime parfait que désirent laisser dans l'histoire deux éminents membres du club, « par amour de l'art ». Ce n'est pas désopilant, mais c'est brillant d'intelligence, de finesse. Les références sont nombreuses et l'on pense inévitablement au Baker Street paru l'an dernier chez Delcourt, qui chassait un peu sur les mêmes terres. La mécanique scénaristique est sans doute poussée plus loin encore ici. Quant au dessin de Denis Bodart rehaussé par les couleurs très à propos de Scarlett Smulkowski, il est tout simplement magnifique. Bodart réalise en effet la fusion entre l'école « Marcinelle », comme on l'appelle -l'héritage Spirou, quoi- et une ligne beaucoup plus réaliste qui lui est personnelle. Dommage qu'il n'ait pas soigné davantage sa couverture.
Planeta Games (Les Technopères) par Thierry Bellefroid
Je viens de lire... « Les Technopères, tome 3 », par Zoran Janjetov, Fred Beltran et Alexandro Jodorowsky. Aux Humanoïdes Associés.

Suite du récit des mémoires du Suprême Technopère, Albino, qui nous raconte depuis trois albums maintenant comment il a été formé et s'est forgé son caractère. Et cette fois, on sent qu'il va entrer dans une période décisive puisqu'à la fin de cet album, il s'en va vers un destin inattendu. En attendant, on a droit comme à l'accoutumée au récit croisé de son initiation et à la saga familiale ; Albino continue en effet de raconter l'étrange destin de sa mère et de ses frère et sœur pendant qu'il remonte le fil de ses propres souvenirs. Bref, la vitesse de croisière est atteinte. Avec son paléovocabulaire, le méta-scénariste Jodo nous emmène où il veut puisque tout est permis. Mais y croit-il lui-même ? Il y a des moments où on se pose la question. Sûrement pas la série la plus intéressante du « maître »... Quant à Janjetov et Beltran, ils s'en donnent à cœur joie et usent la 3D jusqu'à la moelle. Je ne dirai pas qu'on s'ennuie, mais qu'on se laisse faire.
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