Warramunga par Thierry Bellefroid « Warramunga », par Toppi. Chez Mosquito.
Des aventures du Collectionneur à l'exceptionnel Sharaz-De, Mosquito a déjà eu l'occasion de nous montrer à quel point les déserts et les grandes étendues passionnent Sergio Toppi. Cette fois encore, le livre s'ouvre sur un décor magistral. Nous sommes dans le bush australien et aucune mise en couleur ne pourrait mieux rendre ce paysage que le noir et blanc hachuré de l'auteur. Des pierres, des racines décharnées, deux hommes maigres et patibulaires, un aborigène, voilà les seuls accessoires de cette première histoire, « Warramunga », qui a donné son nom au livre. De ces ingrédients simplissimes, Toppi tire une fable attendue, certes, mais d'une beauté quasi picturale dont il a le secret. Le ton est donné. « M'Felewzi » peut suivre. Du bush australien, le lecteur s'envole pour le Transvaal africain. Rhinos, éléphants, impalas et buffles l'y attendent. Mais le safari auquel nous convie l'auteur ne respecte pas les règles du genre. Il commence par un meurtre de sang-froid. La machine, ensuite, poursuit sa route, comme mue par un courant animiste ou à tout le moins, une force obscure. Le dessin, une fois encore, hachure, remplit, recrée le réel, réinvente la page. C'est aussi beau que si Gustav Klimt s'était mis à la BD. Et d'ailleurs, à y bien regarder, c'est à se demander comment Toppi peut être le seul à ignorer si génialement les règles de la bande dessinée pour leur substituer cette grammaire personnelle sauvage, rebelle, tranchante. Une grammaire qui ne cède jamais à la facilité et ne tolère aucune image gratuite.