Les 1231 critiques de Thierry Bellefroid sur Bd Paradisio...

Le preneur d'âmes (Asphodèle) par Thierry Bellefroid
« Le preneur d'âmes », tome 1 de la série « Asphodèle », par Corbeyran, Defali et Schelle. Chez Delcourt.

Encore une nouvelle série pour le prolifique Corbeyran. Celle-ci nous emmène aux limites du paranormal sur les traces d'une sorcière des temps modernes engagée par un étrange trio, victime de maléfices pour le moins embarrassants. Asphodèle n'a pas précisément le physique de l'emploi. Ce qui ne l'empêche pas d'avoir du caractère et d'imposer ses méthodes à ses clients, que cela leur plaise ou non. Il faut dire que dès le départ, les trois hommes en question semblent avoir quelque chose à cacher. Corbeyran rend l'histoire attractive, sans exagérer les « effets spéciaux », en laissant le lecteur appréhender l'histoire à son rythme. Seul bémol, une fois de plus, le format trop étriqué de l'album ne permet guère plus qu'une présentation du problème et des protagonistes. En résulte une impression positive, celle d'être en face d'un scénario charpenté, mais cette impression est tempérée par la frustration résultant de la scène finale. « Asphodèle » confirme en tout cas la veine fantastique de Corbeyran, auteur du Chant des Stryges -entre autres- et son habileté au découpage. Sans être un grand album, loin de là, ce premier tome laisse présager de bons moments, même s'il affiche un air de déjà vu. Le dessin, lui , est un pur produit Delcourt. Ni franchement mauvais ni vraiment bon, il se contente d'être efficace. C'est tout ce que ce genre d'histoire demande. Mais c'est trop peu pour entrer au panthéon des futurs « smash » de la BD.
Frères de lait par Thierry Bellefroid
« Frère de lait », par José-Louis Bocquet et Andreas Gefe, chez EP Editions.

Voilà une adaptation d'un univers de roman pour le moins étonnante. Les lecteurs de « Hors champ », le dernier roman de José-Louis Bocquet paru chez Buchet Chastel, seront surpris d'en retrouver les protagonistes ici, mais dans une extension inédite. Pour eux, l'histoire développée dans « Frère de lait » prend davantage de valeur et de saveur que pour le seul lecteur de BD. (C'est tant mieux, y a pas de raison de ne pas récompenser ceux qui lisent de la littérature !) Mais il ne faut nullement avoir lu l'excellent livre de Bocquet pour apprécier cette descente des « ploucs » sur la ville. Le ton est très proche de celui du roman, jouant sur la voix off et les oppositions d'ambiances. Mais le dessin de Andreas Gefe apporte également sa touche à l'histoire. Un noir et blanc légèrement rehaussé de bleu qui prend la feuille dans le sens de la nervure, ça sent le papier à dessin et le crayon gras tout ça. Très réaliste et en même temps très personnel, le dessin de Gefe apporte ce qu'il faut de noirceur au scénario. Le résultat est une de ces histoires qui oscillent entre le pur polar et la peinture de mœurs. Réussi.
« Gaz à tous les étages », tome 1 de « Sam Speed », par Batem et Colman, scénario de Madeline et MO-cdm. A La Sirène.

La Sirène sur les traces de Bamboo lui-même sur les terres de Cauvin, ça commence à ressembler à une course relais ! D'autant que s'il faut jouer la carte de la filiation, ce Sam Speed doit tout, mais alors là absolument tout, au Joe Bar Team (qui lui-même doit beaucoup à Gaston...). Pour ceux qui, comme moi, détestent les copies -surtout quand elles sont inférieures à l'original-, cet album s'accompagnera inévitablement d'un petit signal « Warning » dans un coin du cerveau. Pour les autres, le rire est-il pour autant au rendez-vous ? Si je parlais de Cauvin un peu plus haut, c'est parce que Madeline et MO-cdm appliquent les recettes que le prince du rire de Marcinelle n'en finit pas de décliner depuis des décennies. Un univers confiné, avec des personnages aux contours si stéréotypés qu'ils conduisent presque les gags tout seuls, un comique de répétition...
A cela, il faut ajouter une recette infernale, qui coupe toute envie de rire : une grande partie des gags se construit sur un principe identique. On montre une partie du décor, on tire en longueur des dialogues plus ou moins allusifs tout au long de la page pour vous asséner le gag final en dernière case, simplement en élargissant le champ de la caméra. Voilà sans doute ce que la BD peut produire de plus pauvre en humour.
Arms - Tome 2 (Arms) par Thierry Bellefroid
« Arms 2 » par Ayouji Minagawa. Chez Kana.

Depuis l'excellent « Monster » de Naoki Urasawa, j'avoue regarder différemment la production des éditions Kana. Ce qui ne veut pas dire que tous les mangas me transportent de joie. Paru dans la collection « Big Kana », collection de « prestige » dans laquelle on trouve justement « Monster », ce nouvel univers est à la fois loin d'être original et particulièrement réussi. L'idée d'une génération de gosses possédant un bras artificiel commandé par des nanomachines presque indépendantes de leur volonté affiche évidemment un petit côté déjà vu. Mais la manière de traiter ce phénomène fantastique est quant à elle beaucoup plus intéressante. Minagawa s'intéresse à ses personnages (comme Urasawa, d'ailleurs) et les dote d'un profil psychologique qui dépasse les canons habituels du manga. Il parvient en outre à nous surprendre dans un univers pourtant très balisé. Même si son dessin est bel et bien le produit d'un système (pour ceux qui ne le sauraient pas, le manga est de la littérature de gare au Japon, il est donc hors de question de plancher un an sur un album comme en France ou en Belgique, par exemple), même si certaines scènes manquent de clarté narrative ou tout simplement graphique, « Arms » se présente déjà comme une des séries à suivre dans le flot de nouveautés venant du Japon. Nerveux, captivant, intelligemment mystérieux, le récit de Minagawa a encore quelques beaux jours devant lui.
Super Negra par Thierry Bellefroid
« Super Negra », par Winshluss, aux Requins Marteaux.

Après le succès de Monsieur Ferraille, Winshluss nous rejoue la carte du détournement et cette fois, il frappe fort. Son héros, c'est Mickey. Un Mickey devenu « Super Bad » après avoir été exposé aux radiations atomiques que sa maladresse a déclenchées. Dans ce comix déjanté d'un bout à l'autre, tout le monde pète les plombs : Mickey, bien sûr, mais aussi Pluto, Donald, qui prend la tête d'une milice de quartier ou encore Dingo, dont la folie n'est pas en reste. Ce massacre organisé qu'on croirait dessiné sur du papier buvard avec une plume qui aurait fait la guerre 14-18 est aussi faussement maladroit qu'il est inventif. Une fois de plus, Les Requins Marteaux osent la folie totale, le graphisme crade, les maladresses organisées. On a même quelques superbes fautes d'orthographe en prime (genre : « on le tiens ») mais on n'a rien sans rien, et si on veut du brut de décoffrage, il faut en subir les dégâts collatéraux. Rien à dire, en tout cas, voilà un comix carrément jouissif.
Lupus - T. 1 (Lupus) par Thierry Bellefroid
« Lupus Volume 1 », par Frédérik Peeters, chez Atrabile.

Grâce à « Pilules Bleues », Frédérik Peeters a considérablement pu élargir un public qui restait, jusque-là, assez confidentiel. Aujourd'hui, il peut donc installer des projets plus ambitieux, sans risquer de rater le rendez-vous avec le lecteur. Ce sera sans doute le cas de ce « Lupus », dont les cent premières pages sont éblouissantes de talent, tant graphique que narratif. Bien sûr, les esprits chagrins reprocheront à Frédérik Peeters la trop grande ressemblance de son trait avec celui de Blutch. Mais s'ils appartiennent à la même famille graphique, les deux auteurs ont chacun leur univers, leur patte personnelle. S'arrêter à cette apparente filiation serait une grossière erreur. Au contraire, sans jouer les suiveurs, Peeters nous offre ici une jolie leçon de dessin qui passe à la fois par des pages sombres, hachurées jusqu'à la limite de la lisibilité, mais aussi par des gros plans comme il les affectionne ou par des planches épurées, où le blanc prédomine très largement.
Quant à l'histoire, c'est un peu comme si Valérian et Laureline étaient revisités par Dupuy et Berbérian avec une pointe de Killoffer. Peeters détourne totalement le récit de SF. Ses deux héros sont des loosers qu'on pourrait aussi bien trouver à la station Châtelet qu'au fin fond du Bronx. Désenchantés, camés jusqu'à l'os, rebelles aussi. Et puis cette fille, avec ses grands yeux tristes, qui vient tout chambouler... Le voyage interstellaire est une belle excuse pour mieux cacher que cette bande dessinée ne nous parle que d'une chose : l'homme, la comédie humaine en général. Et bon sang, ce qu'elle le fait bien !
Mes ailes d'homme par Thierry Bellefroid
« Mes ailes d'homme », par Ludovic Debeurme. Aux éditions de L'An 2.

Edité dans une collection qui porte le nom de « roman visuel », cette étrange histoire emmène le lecteur aux confins de la bande dessinée et aux franges de la littérature. Ludovic Debeurme y retrouve cette écriture très personnelle et ce goût de l'étrange, si bien mariés dans « Céfalus », son premier essai paru l'automne dernier chez Cornélius. Le ton est totalement en rupture avec celui de la bande dessinée et c'est ce qui fait de ce livre un véritable petit bijou. La narration séquentielle est bel et bien présente, on peut donc parler de BD, mais on aurait presque envie de parler d'une nouvelle illustrée. Pourtant, Debeurme est aux commandes de l'ensemble, on ne peut donc pas évoquer ici un travail d'illustration. Au contraire, il faut y voir une volonté de transcender les frontières d'un genre, de faire se rapprocher l'écriture et le dessin. Le trait proche de la gravure évoque souvent Mattotti. Mais on est loin d'un travail de copie. Ne fût-ce que parce que l'univers de Debeurme ne ressemble à celui d'aucun autre. Sa galerie de monstres s'agrandit, qui plonge ses racines dans une interrogation presque métaphysique de la vie. Et qui trouve à travers le dessin une justification esthétique souvent stupéfiante.
Portvissen (Tommy Egg) par Thierry Bellefroid
« Portvissen », tome 2 de « Tommy Egg », par Eco. Chez Paquet.

Le jeune Tommy poursuit sa quête initiatique, toujours aussi confondant de naïveté et d'impatience. Mais Eco introduit un élément fantastique dans un récit qui, jusque-là, brillait surtout par sa poésie semi-réaliste : un poisson qui parle (il fait même plus que ça, mais je m'en voudrais de dévoiler la surprise de la fin de l'album). Avec ce ton presque innocent qui le caractérise, Eco dépeint un univers attachant et pourtant d'une extrême simplicité, jusqu'aux décors qui ne sont qu'esquissés. Ses dialogues affichent toujours ce qu'il faut de candeur ou d'humour pour entraîner le lecteur à la suite de Tommy et du capitaine Van de Zee. Tommy, c'est l'enfant que nous avons tous été : il rêve d'aventure et de grands espaces, ne mesure que rarement la gravité des dangers qui l'entourent, voit le monde à travers un prisme manichéen. Autour de lui, les méchants sont très méchants et les bons un peu moins bons qu'il le voudrait. Mais comme tous ces enfants dont la BD a fait des héros, un brin d'astuce vient toujours à point pour se tirer d'un mauvais pas. Servie par un dessin dépouillé, oscillant entre ligne claire, école Spirou et nouvelle génération -tout en conservant un côté gentiment enfantin-, voilà une série qui constitue un délicat entremets.
« La grande terre », tome 1 de « Dernière frontière », par Marc Bourgne. Chez Carabas.

Plus de dix ans après avoir été dessiné, cet album n'a pas pris une ride. Dans l'esprit des séries « Etre libre » (Dargaud) et « Frank Lincoln » (Glénat), Bourgne y parle de ce qu'il connaît le mieux, l'Alaska. Mais à la différence de Lincoln, il garde dans « Dernière frontière » une innocence et une fraîcheur adolescentes qui rend ses personnages réellement attachants. L'histoire est assez classique : deux ados que tout sépare -il est fils de bonne famille, neveu d'un pilote d'avion-taxi, elle est de sang indien, abandonnée par sa mère dans un orphelinat, en révolte contre la terre entière- se rapprochent à travers les épreuves traversées ensemble ; un avion qui se crache, l'immensité du grand Nord, la lutte pour la survie. Mais Bourgne parvient à donner un souffle épique à cette aventure et à magnifier les paysages de telle sorte que le lecteur s'attache très vite à ce duo d'ados égarés. Une belle initiative des éditions Carabas que d'avoir exhumé cette série oubliée.
Comme un poisson dans l'huile par Thierry Bellefroid
« Comme un poisson dans l'huile » par Guillaume Long. Chez Vertige Graphic.

Le petit livre de Guillaume Long montre si besoin en était qu'on n'a pas encore épuisé la veine autobiographique en bande dessinée. Choisissant de raconter son séjour aux Beaux Arts, Long s'amuse à se moquer de tout en commençant par lui-même. Son humour ravageur et tendre à la fois flotte au-dessus du récit, soutenu par un dessin minimaliste. Une année de cours mais aussi une année d'amitié, d'angoisses et de découvertes, cela peut paraître inintéressant à raconter mais tout est dans le ton qu'on emploie. Guillaume Long a trouvé sa voie pour le faire, ce qui paraît d'autant plus étonnant qu'il confesse à longueur de pages son manque de motivation et surtout son manque d'originalité. Mais même s'il passe cette première année d'apprentissage artistique par la petite porte, on peut dire qu'il a trouvé aujourd'hui un style graphique et une manière de se raconter qui prouvent qu'il a cessé de chercher ses modèles chez les autres. Subtil, frais, très bien écrit, son livre ne sombre ni dans le narcissisme ni dans l'anecdote gratuite.
Projet Sherwood (L'arche) par Thierry Bellefroid
« Projet Sherwood », tome 1 de « L'Arche », par Félix, Mallié et Rieu. Chez Soleil.

Nouveau venu dans la SF, Jérôme Félix entame en compagnie de Vincent Mallié (« Hong kong Triad », « Les Aquanautes ») une histoire de cyber-invasion qui n'en est qu'à ses tout débuts. C'est bien simple, les envahisseurs en question ne pointeront même pas le bout de leur nez dans ce premier album où l'on suit deux personnages principaux coup sur coup. Une première moitié d'album nous met sur les traces de Pad, un flic incorruptible qui est prêt à dénoncer ses supérieurs apparemment moins imperméables que lui aux propositions du consortium « Cadillac », à qui Pad livre une guerre sans merci pour des raisons finalement très personnelles. L'autre moitié nous propose de suivre un tout jeune garçon, informaticien doué mais plutôt maladroit avec les filles, Emilio. C'est finalement lui qui apparaît au terme de ce premier album comme le vrai héros de l'histoire. Une histoire qui ne donne sa mesure que dans les toutes dernières lignes de ce premier tome, brouillant joliment les pistes. Le tout est raconté avec ce qu'il faut d'humour et de suspense pour donner envie au lecteur de poursuivre l'aventure. A évaluer sur la longueur...
Prémonitions (Halloween Blues) par Thierry Bellefroid
« Prémonitions », tome 1 de « Halloween blues », par Mythic et Kas, dans la nouvelle collection « Polyptique » des éditions du Lombard.

« Polyptique » annonce la couleur : 7 albums pour « Halloween Blues ». 7 albums indépendants les uns des autres, mais résolvant en même temps une histoire commune. L'idée est loin d'être neuve. De nombreuses séries télévisées américaines travaillent sur ce principe. Il permet d'éviter la frustration du feuilleton où le lecteur ne connaît jamais de fin au terme d'un épisode tout en créant un suspense en filigrane, avec sa propre scénographie et ses propres récurrences bien calculées. Il n'en faut pas trop, histoire de ne pas perturber la lecture de l'histoire en cours. Et pas trop peu, histoire de créer une vraie envie de connaître la suite. Ici, il semble que le fil rouge soit destiné à être l'assassinat de la femme de Forester, le flic héros de la série, qui a été blanchi pour ce meurtre mais que le fantôme de Dana poursuit de ses questions. Est-ce que cela suffira à rendre les sept albums passionnants ? Pas sûr...

En marge de ce fil rouge, que raconte ce premier volume ? Une banale machination montée par un propriétaire terrien pour s'approprier les ressources des terres qui jouxtent sa propriété. Seule originalité, le moyen employé pour tromper tout le monde. Pour nous raconter cela, Mythic nous noie sous les dialogues. L'histoire est exagérément bavarde, à tel point que cela en devient rapidement insupportable pour le lecteur. D'autant que ces dialogues sonnent beaucoup trop artificiellement pour donner une vraie épaisseur aux personnages et les rendre crédibles ; ils semblent tous sortis d'un roman de gare et s'expriment dans une langue désincarnée, à la syntaxe presque académique, quel que soit leur milieu social. Quant aux situations rocambolesques, elles ne manquent pas non plus. Quel homme en train de faire main basse sur toute une région laissera entrer chez lui l'une des personnes dont il veut racheter la propriété pour entamer avec elle une conversation apparemment amicale, un fusil braqué sur lui ? Et ce n'est qu'un exemple parmi d'autres...
Bref, pour un premier album devant « tirer » toute une collection sur laquelle on imagine que le Lombard fonde de grands espoirs, on pouvait vraiment espérer mieux. D'autant que le dessin de Kas, souvent figé, statique, aux couleurs parfois franchement criardes, ne sauve pas l'entreprise. Seul le personnage de June semble touché par une certaine grâce.
Jade (Clifton) par Thierry Bellefroid
« Jade », tome 18 des aventures de Clifton. Par De Groot et Rodrigue. Au Lombard.

Plus de 43 ans après sa création, Clifton change une fois de plus de mains. Il s'offre un quatrième dessinateur (après Macherot, son créateur, puis Azara, il y eut en effet Turk et Bédu) et retrouve le scénariste qu'il avait quitté il y a plusieurs années. Manifestement, la complicité qui s'était exprimée entre Rodrigue et Bob De Groot dans « Doggyguard » n'est pas étrangère à la réussite de l'opération.
Clifton retrouve les culottes courtes de Héron Mélomane, son personnage de chef scout mais ce n'est que pour très peu de temps. Car la jolie Jade, son équipière de choc pour cette aventure, s'en vient donner un coup de frais dans cet univers très masculin où seule Miss Partridge partageait le quotidien du héros. La fin est assez surprenante et montre que Bob De Groot veut rajeunir son personnage tout en veillant à conserver les ingrédients qui ont construit son succès. Même si on est loin de l'univers de Macherot et si certains gags commencent à être éculés, De Groot a su retrouver le plaisir de ses débuts avec Turk. Sans être aussi rondement mené que « Le voleur qui rit » ou « 7 jours pour mourir », ce « Jade » constitue une bonne surprise pour le lecteur.
La bande à Bamboo par Thierry Bellefroid
« La bande à Bamboo », album collectif paru chez Bamboo.

En quelques années, construite sur le succès immédiat des « Profs », la petite maison d'édition d'humour tout public s'est étoffée et offre aujourd'hui un catalogue qui chasse dangereusement sur les terres du magazine Spirou. Pour en avoir le meilleur aperçu, il suffit de lire « La bande à Bamboo ». Vous y trouverez quelques planches de 17 séries en cours. Evidemment, ce sont les meilleurs gags qui ont été retenus, ce qui ne permet pas toujours de juger de la qualité d'un album entier avec les mêmes personnages. Mais les plus intéressants se détachent sans effort du peloton. « Dirty Henry », « Django Renard », « Rob, Wed & Co », « Les Fourmidables », ou les « Fonctionnaires » ont sans doute réussi plus que d'autres à allier univers thématique et galerie de personnages attachants. Ils évitent aussi plus facilement que les autres les situations convenues et les gags prévisibles qui parsèment malheureusement beaucoup d'albums de Bamboo.
Les mystères du meurtre par Thierry Bellefroid
« Les mystères du meurtre », par Neil Gaiman et P. Craig Russell. Chez Semic Album.

Le complice idéal de Dave Mc Kean, adapté ici par P. Craig Russell, au départ d'une de ses pièces radiophoniques. Une histoire à la marge du récit fantastique et du conte philosophique, qui nous propose de découvrir la genèse du meurtre. Nous sommes avec les anges, avant la création du monde, qui n'en est encore qu'au stade de l'expérimentation en vase clos. Dieu -Le Nom- est omnipotent et omniscient. Il a créé toute chose pour qu'elle le serve. Aussi, lorsqu'un ange est retrouvé mort après une chute vertigineuse, un autre ange a-t-il été prévu pour exprimer la punition du Nom. Cet premier limier de l'Histoire va découvrir dans un monde asexué et normalement dépourvu d'ambition personnelle comment on jongle avec des notions aussi abstraites que l'amour, la jalousie et la mort. Passionnant, conçu comme un véritable thriller, le récit est en outre raconté par l'un des protagonistes déchu, une nuit, sur un banc public de L.A., à un homme qui lui a offert une cigarette. Le traitement graphique de P. Craig Russell est limpide et son découpage irréprochable. On se laisse porter, étonné de la facilité avec laquelle Neil Gaiman déroule son intrigue, dans ce monde dont il invente tous les codes. Sans exagérer les côtés fantastiques et explorer des décors de rêve qui peuvent vite virer au kitsch, Russell joue quant à lui la carte de la stylisation, parfois jusqu'à épouser le genre du comics de super héros. Magnifique.
« Le Trésor des abysses », tome 2 de Imago Mundi. Par Brahy, Corbeyran, Braquelaire. Chez Dargaud.

On ne peut que se réjouir de l'initiative prise par Dargaud de publier en même temps les deux volets qui constituent cette première histoire de Imago Mundi. Voilà une décision commercialement courageuse, puisque l'éditeur a dû attendre la réalisation de 92 planches avant de pouvoir envisager de voir rentrer le premier euro dans les caisses. Pour le lecteur, en tout cas, c'est tout bénéfice. Et finalement, on peut se demander si l'éditeur n'y gagne pas en visibilité, les deux albums étant plus facilement mis en avant par le libraires qu'un premier tome de série.

Imago Mundi est le fruit de l'imagination d'un scénariste connu et d'un scientifique, ce qui explique la cohérence de l'ensemble. Corbeyran et Achille Braquelaire se sont rencontrés il y a près de dix ans, ils ont eu le temps de mûrir leur projet. On ne présente plus le premier. Quant au second, il dirige le département informatique de l'université de Bordeaux. Ensemble, ils ont choisi de publier une histoire d'aventures sur fond de recherche scientifique en essayant à la fois de sortir des sentiers battus et de rester crédibles, y compris aux yeux des spécialistes. C'est sans doute à ce mélange d'ambitions et de savoir-faire que l'on doit la réussite d'Imago Mundi, mis sur le papier par Luc Brahy, qui avait débuté chez Vents d'Ouest avec « Zoltan », une histoire scénarisée par Frank Giroud.
Les trois personnages principaux, le « vieil » aventurier suédois et ses deux jeunes génies, fonctionnent à merveille dans le dispositif imaginé par Corbeyran. L'histoire est intelligente sans jamais négliger le plaisir de lecture, le dessin est efficace, seule la mise en couleur aurait pu être plus « discrète » en se passant de certains effets, mais dans l'ensemble, voilà une belle réussite d'emblée.
Octave et le cachalot (Octave) par Thierry Bellefroid
« Octave et le cachalot », par Chauvel et Alfred. Cez Delcourt Jeunesse.

Derrière une couverture très réussie, un petit bijou où tout est à sa place. Une belle histoire, simple et forte comme les enfants aiment qu'on leur en raconte. Un dessin économe, qui fait une grande place aux couleurs et aux atmosphères. Une mise en page qui met en valeur les gros plans et les expressions du visage d'Octave. Tout concourt à rendre cet album accessible et lumineux. Une fois encore, on y découvre un Chauvel plus sensible et plus polymorphe qu'il y paraît. De Ring Circus à Popotka en passant par « La digue », Chauvel déroule de belles histoires au ton plus personnel, en marge de cet univers marqué par la mafia, la violence et le cinéma qu'il affectionne particulièrement et qui constitue l'ossature de sa production. Ce Chauvel-là gagne à être connu, tout comme celui qui nos propose avec une belle constance les aventures d'Arthur.
« Des fourmis dans les jambes », tome 1 des Fourmidables, par Vincent Deporter.

Voilà un album véritablement réjouissant qui colle parfaitement à l'esprit « Bamboo », caractérisé par l'humour grand public et tous âges. Les Fourmidables peuvent plaire aux plus jeunes ; les gags sont compréhensibles par tous et le dessin de Deporter plein de vie et de dynamisme fait le reste. Mais les adultes peuvent tout aussi bien s'amuser des facéties de ces petits insectes plus maladroits qu'organisés qui ne cessent de tomber dans les pièges que leur tendent les humains. Il y a dans cette série un brin d'humour noir et de causticité qui la distingue du tout-venant. Confrontées aux ravages du tabac comme à la bêtise humaine, les fourmis de Deporter n'hésitent pas à se venger des hommes ou à faire mentir leur réputation en sombrant dans la paresse. C'est enlevé, inspiré et les gags ne tombent jamais à plat.
Héros et bovins par Thierry Bellefroid
« Hermann, héros et bovins », aux éditions Mosquito.

Avec un titre aussi énigmatique, certains se demanderont quelle mouche a piqué Mosquito au moment de publier ce livre. Bien sûr, tous les lecteurs d'Hermann auront remarqué que les bovins ne manquent pas dans ses albums. De là à leur consacrer un livre...
Et pourtant. A la lecture de ce petit « traité », on ne peut que mieux comprendre l'univers des hommes et des vaches sur lequel le scénariste de Jeremiah règne en maître. Car ce livre n'est pas qu'une variation sur le thème des bêtes à cornes et sabots. Jouant la carte thématique qu'on lui tendait, Hermann a choisi de s'expliquer. Avec ses mots à lui. Il dépeint patiemment, un à un, les héros de ses histoires, remontant jusqu'aux séries de Greg, à cette époque lointaine aujourd'hui où il n'était QUE le dessinateur d'un scénariste génial. Mettant ses personnages en parallèle avec des bestiaux qui parlent d'eux mieux que personne, l'auteur fouille la psychologie de ceux qui l'ont accompagné depuis les années soixante et nous offre sa vision de leurs traits de caractère ou de leurs petits travers. En résulte une lecture parfois nostalgique mais pleine d'enseignements, qui permet au lecteur d'appréhender l'œuvre plus en profondeur. On dit toujours que les histoires doivent se suffire à elles-mêmes. Ce très beau livre est la preuve qu'il y a moyen de faire commenter son œuvre à un créateur. A condition de ne pas lui en imposer la forme.
« Tenu par les couilles », tome 3 du Bal de la sueur. Par Cromwell et Riff Reb's. Chez Soleil.

C'est sûr, avec un titre pareil, voilà un album qui ne se retrouvera pas dans les bacs des bibliothèques paroissiales ! Mais que cela ne vous prive pas de sa lecture qui rappelle le premier volume du Bal de la Sueur (paru il y a bientôt 20 ans !). On y retrouve le même univers -après un détour par une Venise de bazar dans le tome 2- et les auteurs s'en sont donné à cœur joie pour passer à la moulinette tout ce qui peut paraître à peu près politiquement correct ou un peu trop propre dans la BD d'aujourd'hui. Miné par une colonie de morpions électroniques qui menacent de lui exploser à tout moment les bijoux de famille, Manuel, l'ignoble rabatteur de contrat, n'a d'autre solution que d'envoyer Sergueï Wladi et son bateau, le Buffalo Grace, à la chasse à l'homme. S'en suivent des aventures aussi loufoques que jouissives où l'humour ne faiblit pas plus que le rythme, le tout dessiné de mains de maîtres, par Cromwell et Riff Reb's, qui ont fait de sérieux progrès depuis qu'ils avaient délaissé cette série. Il faut dire que les deux compères nous avaient planté là en... 1987 après deux albums seulement. Depuis, l'eau a coulé sous les ponts et la sueur sous les bras de leurs héros.
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