Lupus - T. 1 (Lupus) par Thierry Bellefroid
« Lupus Volume 1 », par Frédérik Peeters, chez Atrabile.
Grâce à « Pilules Bleues », Frédérik Peeters a considérablement pu élargir un public qui restait, jusque-là, assez confidentiel. Aujourd'hui, il peut donc installer des projets plus ambitieux, sans risquer de rater le rendez-vous avec le lecteur. Ce sera sans doute le cas de ce « Lupus », dont les cent premières pages sont éblouissantes de talent, tant graphique que narratif. Bien sûr, les esprits chagrins reprocheront à Frédérik Peeters la trop grande ressemblance de son trait avec celui de Blutch. Mais s'ils appartiennent à la même famille graphique, les deux auteurs ont chacun leur univers, leur patte personnelle. S'arrêter à cette apparente filiation serait une grossière erreur. Au contraire, sans jouer les suiveurs, Peeters nous offre ici une jolie leçon de dessin qui passe à la fois par des pages sombres, hachurées jusqu'à la limite de la lisibilité, mais aussi par des gros plans comme il les affectionne ou par des planches épurées, où le blanc prédomine très largement.
Quant à l'histoire, c'est un peu comme si Valérian et Laureline étaient revisités par Dupuy et Berbérian avec une pointe de Killoffer. Peeters détourne totalement le récit de SF. Ses deux héros sont des loosers qu'on pourrait aussi bien trouver à la station Châtelet qu'au fin fond du Bronx. Désenchantés, camés jusqu'à l'os, rebelles aussi. Et puis cette fille, avec ses grands yeux tristes, qui vient tout chambouler... Le voyage interstellaire est une belle excuse pour mieux cacher que cette bande dessinée ne nous parle que d'une chose : l'homme, la comédie humaine en général. Et bon sang, ce qu'elle le fait bien !