Les 1231 critiques de Thierry Bellefroid sur Bd Paradisio...

Carnage Boogie (Les teigneux) par Thierry Bellefroid
« Carnage Boogie », tome 2 des Teigneux, par Chanoinat et Castaza. Chez Soleil.

Ceux qui ont croisé Philippe Chanoinat en dédicace auront été frappés par une chose : il parle comme ses personnages. Cet amoureux du cinéma d'Audiard -du cinéma tout court, même- est à l'inverse très différent de ses personnages. Son look de rocker cache mal un cœur gros comme ça qui contraste avec les actes peu recommandables de ses personnages. Tout ça pour dire que Chanoinat, de toute évidence, n'a pas épousé les Teigneux par opportunisme, mais par passion et par admiration pour ceux qui l'ont fait rêver sur le grand écran. La lecture de ce deuxième album vous en convaincra ; le plaisir que les auteurs ressentent à écrire ces histoires transparaît de chaque case et de chaque dialogue. Plus campagnard que le premier tome, plus éloigné peut-être de films comme les Tontons Flingueurs, ce « Carnage Boogie » applique les mêmes recettes que « Bazooka Twist ». On tire dans le tas, on se met des bourre-pifs pour un oui ou pour un non et finalement, tout ça, c'est juste pour faire rire un coup et oublier ses petits soucis. Inutile de dire que ça marche. Sans prétention, sans mesure non plus -on fait dans la grosse artillerie, y compris pour le nabot de service, sorte d'idiot du village à la puissance dix-, les auteurs de cette farce pleine de fureur et de balles perdues ont su trouver un ton jusque-là peu exploité par la BD. Il conviendra mieux aux nostalgiques du cinéma français de papa qu'aux ados habitués à manger du manga, mais il en faut pour tous les goûts, n'est-ce pas ?
Aphrodite (Chimères) par Thierry Bellefroid
« Aphrodite », tome 1 de Chimères. Par Thomas Mosdi et Joseph Béhé. Chez Vents d'Ouest.

Depuis qu'il est passé à la couleur directe, Béhé nous offre un dessin de plus en plus agréable, tout en ambiances, plein de luminosité. Un dessin valorisé par une mise en page très simple et un encrage qui préserve aussi souvent que possible la délicatesse du trait original. On n'en voit qu'avec plus d'acuité les quelques défauts de fabrication que traîne toujours derrière lui cet attachant dessinateur, comme ces silhouettes mal proportionnées (la femme de la planche 14, par exemple) ou les difficultés qu'il a à dessiner les pieds de ses personnages (souvent escamotés par la magie du cadrage, d'ailleurs). Mais ne boudons pas notre plaisir, celui des yeux évidemment ; Joseph Béhé nous livre ici le meilleur de lui-même et cet album est parcouru d'images magnifiques (les planches 8 et 9, le visage de femme de la planche 11, la planche 34, pour ne citer que ces exemples). L'histoire, quant à elle, n'en est qu'à ses balbutiements. Il n'est pas aisé de capter d'emblée les éléments fantastiques et mythologiques que Mosdi dépose en filigrane. Mais le scénariste de « L'île des morts » (entre autres) ne nous a pas habitué à des histoires simples ou limpides. Laissons-lui le temps d'installer son univers. De toute façon, ce premier album est suffisamment réussi pour convaincre de la suite.
Le grand braquage (Catwoman) par Thierry Bellefroid
« Le grand braquage », dans la série « Catwoman », par Darwyn Cooke, chez Semic Books.

Ils ne sont pas nombreux, les auteurs complets dans le domaine du comics. Raison de plus pour s'intéresser à cet album qui s'écarte de la production habituelle tout en exploitant l'univers des super-héros. C'est même en jouant sur l'analogie avec d'autres histoires que Darwyn Cooke crée l'intérêt. Catwoman, voleuse de haut vol, vit à Gotham, la célèbre cité de Batman. Mais le récit de ce grand braquage tient plus du film de Scorcese que du comics US. Avec un dessin léger, qui fait parfois penser à celui d'un Frédérik Peeters, Darwyn Cooke construit son action tout en nuances, jouant sur les flash back et sur le passé commun des protagonistes. Suspense et inventivité au service de héros complexes, humains et empêtrés dans leurs relations de méfiance réciproque, quand ce n'est pas tout simplement de défiance. Un polar intéressant qui s'intéresse vraiment aux personnages, à leurs motivations, à leur histoire, tout en ne négligeant pas les lois du genre, qui veulent que les héros doivent développer des capacités hors du commun. A côté de nombreux comics à la psychologie de bazar, ce « Catwoman » a vraiment des côtés rafraîchissants. Et parfois touchants.
Ludologie par Thierry Bellefroid
« Ludologie », par Ludovic Debeurme, aux éditions Cornélius.

Décidément, Ludovic Debeurme est non seulement un auteur intéressant, mais aussi insaisissable. En deux ans, cet inconnu surgi à la faveur d'un premier album brillant chez Cornélius n'a cessé de montrer des facettes différentes de son talent. Cette fois, il s'essaie à l'autobiographie à travers une série de récits très intimes, que certains trouveront dérangeants ou impudiques, mais qui sont chacun un exercice de style différent. Avec ce trait à la plume qui privilégie l'émotion ou la suggestion sur la représentation, Debeurme fouille les coins les plus nauséeux de l'enfance. Sans méchanceté, sans complaisance non plus, il nous raconte un parcours tourmenté, qui le mène à la fin de l'adolescence dans un monde de névroses et d'incommunicabilité. Il le fait sans jamais oublier de poser un regard lucide sur lui-même, mais sans misérabilisme non plus, toujours avec ce qu'il faut d'humour pour emporter l'adhésion du lecteur. Un livre qui peut quelque part se rapprocher de l'expérience de David B (L'ascension du Haut Mal) par sa troublante transparence et ses côtés proches de l'auto-thérapie. Magnifique.
Double jeu (Veuve noire) par Thierry Bellefroid
« Double jeu », tome 1 de « Veuve noire », par Greg Rucka et Igor Kordey, chez Marvel France.

C'est un récit couleur charbon que nous proposent les auteurs de la « Veuve noire ». On nage dans les bas-fonds de Moscou, le sadomasochisme est partout, le latex et les chaînes aussi, une ambiance à la « Rapaces » que l'on peut qualifier de vulgaire en décidant de ne pas aller plus loin, ou que l'on peut considérer comme un décor comme un autre. Un décor qui sert en tout cas une histoire policière musclée mettant en scène Yelena, la nouvelle « Veuve noire », une sorte de super-agent que la Russie veut lancer sur orbite pour faire oublier celle qui l'a précédée dans ce costume de super-héros 100% soviétique, Natasha Romanoff, passée à l'Ouest avec armes et bagages. Sordide, violent, amoral, le récit nous entraîne à notre insu dans une embrouille complexe, en jouant la carte du glauque et de la manipulation. Au final, grâce à un dessin nerveux -et forcément vulgaire- mais aussi grâce à un scénario plus futé que prévu, le lecteur passe un excellent moment en compagnie de cette araignée russe. La deuxième histoire, elle, met en scène la fameuse Natasha Romanoff, dans une ambiance de polar fantastique à l'américaine. Moins intéressant, très différent de la première histoire, mais mieux dessiné. A vous de choisir.
Just a Pilgrim # 2 par Thierry Bellefroid
« Just a pilgrim, tome 2 », par Garth Ennis et Carlos Ezquerra. Chez Semic Books.

Retour aux bonnes vieilles histoires d'anticipation qui fleurissaient dans la littérature et le cinéma des années 80. Une terre dévastée, quelques scientifiques qui ont réussi à maintenir un semblant de vie au fond d'une ancienne faille océanique, le combat pour la vie dans un environnement hostile. Entre Mad Max, Jeremiah et Malevil, cette bonne histoire d'anticipation vaut surtout pour le personnage trouble et fascinant du Pèlerin. C'est sur ses épaules que repose ce récit charpenté, violent et apparemment manichéen. Mais le manichéisme lui-même a ses limites et c'est sur cette limite que joue habilement le scénariste Garth Ennis, en semant le doute dans l'esprit de son prêcheur à l'heure de conclure. Une BD qui se lit comme on boit d'un trait sa cuiller d'huile de ricin. Bigrement efficace, jusque dans son découpage pourtant très classique !
« Jean ou le jour du corbeau », tome 4 du Troisième Testament, par Dorison et Alice, chez Glénat.

La fin du Troisième Testament était attendue par plusieurs dizaines de milliers de lecteurs (l'album est tiré aux environs des 120.000 exemplaires) qui ont dû ronger leur frein. Un an entre le premier et le deuxième tome, deux entre le deuxième et le troisième... trois entre le troisième et le dernier, c'est dire si l'impatience était croissante. Avec une pagination considérablement revue à la hausse, Dorison et Alice terminent cette histoire épique en mêlant action et philosophie, insistant sur les courants contradictoires qui secouent leurs héros. Elisabeth, plus humaniste que jamais, se fiera à son cœur pour apparaître comme la véritable figure emblématique de la série. Conrad de Marbourg, partagé entre l'obéissance à dieu, la foi, la raison et la colère, donne un véritable sens à l'histoire, qui est plus que de la « catholic fantasy » et mêle avec brio l'épique et le romanesque à une interrogation sur le destin et la fragilité humaine. Quant à Sayn, le personnage jusque-là le moins exploré, il livre son secret et permet au lecteur de comprendre le sens d'actes d'une violence jusque-là souvent incompréhensible. Celui qui représentait le Mal absolu est prisonnier de son destin et tente en fin de compte de se délivrer lui-même. Une belle fin, un rythme trépidant et une mise en page toujours aussi spectaculaire contribuent à clore cette série en beauté. Avec un sens croisé de la mathématique et du romanesque aventureux, les auteurs ont su trouver la voie juste pour ne pas refaire « Le nom de la rose » qui les a forcément inspiré.
Petit peintre par Thierry Bellefroid
« Petit peintre », par Dupuy et Berbérian. Chez Cornélius.

Ce n'est plus une réédition, c'est une œuvre neuve, revisitée de fond en comble, que nous proposent chez Cornélius les créateurs de Monsieur Jean et d'Henriette. Initialement paru chez Magic Strip (d'où les allusions aux frères Pasamonik qui dirigeaient cette maison à l'époque et dont l'un des deux a aujourd'hui disparu), ce premier opus du duo Dupuy-Berbérian a été entièrement restauré ; nouvel encrage et nouvelle mise en couleur. Il est frappant de constater qu'en résulte un livre dont les cadrages rappellent une époque aujourd'hui révolue pour les deux auteurs mais dont les couleurs magnifiques témoignent de l'intérêt croissant du duo pour les travaux d'illustration et la sérigraphie. « Petit peintre » est un album qui n'a pas vieilli et que certains lecteurs prendront assurément pour une œuvre nouvelle. Le soin apporté à l'édition vaut largement les 15 euros demandés pour l'achat de cette belle histoire d'enfant surdoué victime de la cupidité et de la bêtise des adultes. Une fable légère malgré ses accents dramatiques, grâce au trait épuré de Dupuy-Berbérian mais aussi, grâce aux personnages caricaturaux (ici encore, révélateurs des débuts du duo) dont le plus burlesque est sans conteste le commissaire Zavaron. On ne peut que féliciter Cornélius d'avoir exhumé cette « vieille » histoire introuvable depuis une quinzaine d'années et d'avoir mis tout son savoir-faire dans la réalisation de ce très beau livre d'une trentaine de pages, suivi de quelques tableaux inédits dans la version originale. En attendant le premier « Monsieur Jean » estampillé Dupuis que l'on annonce pour la fin août, voilà une agréable mise en bouche.
Y a pas que le sexe dans la vie par Thierry Bellefroid
« Y a pas que le sexe dans la vie », par Vuillemin. Chez Albin Michel.

Vuillemin n'est jamais meilleur que lorsqu'il travaille ses gags en une image. La puissance évocatrice de son dessin, le concentré d'humour qu'oblige la concision le servent mieux encore que les gags en plusieurs planches des « Sales blagues de l'Echo ». Et même si ses obsessions ou ses sujets fétiches -le sexe, la scatologie, l'imbécillité ordinaire- restent la matière principale de ces « cartoons », on est très proche ici de l'exercice du dessin d'actualité. Avec son ton acerbe et sa sensibilité politiquement incorrecte, Vuillemin revisite la bêtise, l'inculture, le racisme ordinaire, le tourisme sexuel, la déliquescence sociale, les grandes mésaventures du monde politique et les désillusions de la France. Dire que la lecture de ce livre est jouissive est en-dessous de la vérité. Vuillemin est au sommet de sa forme !
« Pas de chance, 1ère partie », par Philippe Riche, aux Humanos.

Aux heures glorieuses, Tohu Bohu éditait Dupuy-Berbérian, Wazem, Tirabosco, Thierry Robin ou Christian Durieux et révélait Grégory Mardon ou Seth (en français en tout cas, puisque l'auteur canadien était loin d'être un débutant dans son pays). Depuis, on a eu peu d'occasions de brûler d'enthousiasme pour les petits formats noir et blanc des Humanos. Ce « Pas de chance » renoue avec les meilleurs moments de la collection. Un livre de débutant qui maîtrise déjà parfaitement son sujet et dont le dessin noir et blanc évolue tout au long de l'album pour prendre une certaine assurance dans le dernier tiers. Quelques éléments de l'histoire sont étranges et les réactions des personnages pas toujours crédibles, certes. Pour autant, le mystère entretenu tout au long de ce premier album et le côté décalé, joliment glauque de ce scénario réserve une lecture agréable, au rythme bien soutenu. Ce n'est pas nécessairement évident quand on se lance d'emblée dans une pagination aussi dense (104 pages pour ce premier tome). Philippe Riche s'égare bien de temps en temps dans des scènes pas vraiment vitales pour la bonne marche du récit. Mais il ne perd pas son lecteur en route. C'est le principal.
Le cas Girardon par Thierry Bellefroid
« Le cas Girardon », par Barranger et Bernatets. Au Cycliste.

Après un comix puis un premier album au Cycliste (« Tante Lydie et moi »), voici sans aucun doute le livre le plus abouti de Barranger. L'histoire de ce jeune cadre victime d'une malédiction depuis qu'il croise partout sur sa route la même statue africaine commence de manière assez classique. Elle se déploie ensuite grâce à une narration en trois phases et à trois voix qui permet au lecteur d'entrer petit à petit dans le secret de ce qui est tout sauf une histoire de magie noire. Réfugié dans une petite communauté africaine croquée avec justesse et humour par l'auteur, Rémi Girardon raconte son histoire en flash-back successifs. Puis c'est Béa, sa compagne, qui donne sa version des faits. Enfin, la conclusion est laissée à son meilleur ami. Dommage que Barranger ait choisi de jouer sur une relation ambiguë un peu facile et convenue entre les deux protagonistes masculins pour cette troisième partie. Quoiqu'il en soit, l'histoire est plaisante à lire et intelligemment construite, parfois inutilement polluée par des dialogues de quidams à l'arrière-plan, mais c'est un défaut somme toute assez mineur. Quant aux couleurs de Bernatets, elles habillent sans ostentation un dessin quelque peu rugueux mais non dénué de personnalité.
« La vierge noire », tome 2 du Marquis d'Anaon, par Vehlmann et Bonhomme. Chez Dargaud.

Après une première « enquête » qui sentait bon les falaises bretonnes balayées par le vent, c'est en Auvergne que nous emmènent les auteurs pour une traque de serial killer avant la lettre. Dans ce XVIIIème siècle où tout ce qui ne s'explique pas est mis sur le compte de la sorcellerie, Jean-Baptiste Poulain s'attaque à une série de crimes perpétrés à proximité d'une vierge noire, chaque veille de Noël. Pour résoudre l'énigme, il fait davantage appel à la psychologie que les gens du coin, plus prompts, en cette époque, à désigner le premier bouc émissaire venu. Poulain, un « profiler » avant la lettre. Certes, mais « Le marquis d'Ananon » est davantage qu'un livre policier médiéval. Avec l'air de ne pas y toucher, Vehlmann installe des ambiances, pose des questions, disserte sur la nature humaine et la différence, sur dieu et les forces du mal, sur la bonne volonté et la culpabilité. Ses héros ont des failles. Tant et si bien qu'une fois l'histoire résolue, il restera sur place des zones d'ombre qui permettront aux secrets de rester à l'abri des regards. Poulain résoud le mystère malgré lui, si l'on peut dire, et n'en tire aucune gloire, bien au contraire.
Le trait de Matthieu Bonhomme fait merveille pour conter par le dessin cette histoire campagnarde toute en clairs-obscurs et en paysages enneigés. Claire, dans la droite ligne des récits qui ont fait le succès de Dargaud ou du Lombard dans les années soixante-soixante-dix, sa mise en page est à la fois sobre et efficace. Sans tenter de jouer les orfèvres, le dessinateur parvient à servir le propos et à monter quelques planches très réussies. Il y a, dans cette façon de ne jamais en faire trop, dans l'utilisation parcimonieuse et intelligente de la lumière ou des silhouettes, dans cette volonté de classicisme esthétique, quelque chose de proche de la démarche d'Emmanuel Guibert sur « Les olives noires ».
« Quartier lointain, tome 2 », de Jirô Taniguchi. Chez Casterman.

Récompensé l'an dernier à Angoulême (Alph'Art du scénario) pour le premier volume de ce diptyque, Jirô Taniguchi se devait de ne pas décevoir. Même si l'argument de départ a des allures de déjà-vu (que ce soit sous une autre forme dans des films comme « Back to the future » ou dans la littérature, sous une forme très proche, chez Jacqueline Harpman), Taniguchi a su donner à son histoire les accents de la sincérité et en faire un très beau conte sur l'impossibilité de réécrire l'histoire. Son héros, Hiroshi, soudainement plongé avec sa conscience d'adulte dans le corps de l'adolescent qu'il fut jadis, va tout faire pour infléchir le cours d'une vie qu'il connaît par avance. Dans sa première vie, son père a quitté la famille sans raison un soir et n'est jamais revenu. Hiroshi peut-il, en revivant les événements et en étant le seul à connaître l'avenir, empêcher ce qui paraît inexorable ? C'est le propos apparent d'un livre qui touche, comme toujours chez Taniguchi, par sa justesse de ton et son humanité. Mais l'auteur va plus loin et s'interroge sur la liberté d'action de l'homme, sur le sens du sacrifice, sur la fuite aussi. Il parvient également à émouvoir son lecteur, à l'entraîner dans des amours adolescentes qui pourraient facilement sombrer dans la mièvrerie, tout cela, sans aucune chute de rythme. Le seul moment un peu plus faible est le réveil du héros un peu avant la fin du livre, qui paraît cousu de fil blanc. Mais Taniguchi se rattrape fort heureusement dans le final où il signe une chute inattendue et agréable, qui laisse des portes ouvertes à l'imagination du lecteur.
Jos (Les Carnets du Gueuloir) par Thierry Bellefroid
« Jos », tome 1 des « Carnets du Gueuloir », par Nico et Oliv, chez Petit à Petit.

Si l'on excepte un évident problème de définition (certains dessins laissent vraiment trop apparaître les pixels) et les imperfections graphiques d'un album de débutant, ce premier tome des « Carnets du Gueuloir » est globalement une bonne surprise. Sans être très originale, la trame du jeune garçon envoyé au bagne de Cayenne pour un meurtre qu'il n'a pas commis permet des développements agréables à suivre. C'est de la BD d'aventure pur jus, avec coups bas et retournements de situation, personnages souvent manichéens, un héros poursuivi par l'injustice. On pense évidemment à « Papillon », et il est difficile de lire ce premier opus sans avoir à l'esprit toute la littérature et les films qui ont déjà exploité la veine de Cayenne jusqu'à l'os. Mais Oliv' et Nico, deux auteurs découverts à travers les livres thématiques de petit format des éditions Petit à Petit auront au moins eu le mérite de parvenir à en sortir en allant au bout de leur projet et en osant d'emblée un récit de plus de 120 planches. Nico doit encore beaucoup apprendre pour cacher les faiblesses de son trait, capter les émotions, camper des visages vivants, ressemblants, réguliers. Mais l'ambiance, elle, y est déjà.
« Touche pas à mon doudou », tome 1 des Ripoupons, par Bélom et Gégé. Chez Bamboo.

Si vous mettez face à face ce premier album et le « bébé blues » de Kirkman et Scott paru chez Hors Collection, une chose vous sautera aux yeux ; les deux font rire -ou sourire, c'est selon- mais seul le second sonne parfaitement juste. Le problème des Ripoupons est le même que celui du Petit Spirou, il s'agit de faire rire avec des enfants sur lesquels on projette des préoccupations d'adultes. Ce n'est pas toujours le cas, mais il faut avouer que le lecteur est parfois un rien mal à l'aise quand les protagonistes de ces gags de crèche ou de pré-maternelle qui ressemblent physiquement à des bébés se parlent comme des enfants de 8 ans. A croire que le système d'albums hyper-thématiques de Bamboo a coincé les deux auteurs dans un univers qu'ils avaient d'emblée envie de déborder. Hormis ce bémol, il faut reconnaître que leur coup d'essai est plutôt frais et sympathique, et qu'il ne s'agit pas là, loin de là, du plus mauvais album de l'éditeur des « Profs ».
Rayban Dog par Thierry Bellefroid
« Rayban Dog », par Murphy et Redolfi. Chez Paquet.

Voilà un album étrange qui vous plonge dans un monde à part dès la première page. Un monde fantastique mais très américain puisque le héros de cette histoire, Sean Bazley, débarque dans une petite cité US soi-disant paradisiaque après avoir essuyé une tornade. Il se retrouve entouré de gens qui poussent invariablement leur tondeuse sur un carré de gazon identique devant chez eux en lui envoyant du « bonjour » à longueur de temps. Derrière la loufoquerie de cet album, on trouve une nouvelle décalée, étrangement envoûtante, qui correspond parfaitement au dessin de Tommy Redolfi, mélange de caricature et de BD. Avec ses personnages aux corps nains surmontés de grosses têtes et son climat glauque, « Rayban dog » s'affiche comme une bande dessinée de type underground US, ce qui ne l'empêche pas d'être parfaitement lisible. Ce n'est sans doute pas la moindre de ses qualités. L'humour étant la seconde. Et un art consommé du non-sens la troisième.
Morrigane (Robin Hood) par Thierry Bellefroid
« Morrigane », tome 2 de Robin Hood, par Brrémaud et Loche. Chez Soleil.

Après un premier album très prometteur, on pouvait craindre que les auteurs de ce Robin décalé, ne jouissant plus de l'effet de surprise, nous enthousiasment moins. Mais il faut le reconnaître : tant l'humour de Brrémaud que le dessin tout en finesse de Loche continuent d'alimenter une série qui ne se prend jamais au sérieux. Leur Robin des Bois peu glorieux -dans ce deuxième tome, il n'hésite pas à planter tout le monde dans une attitude aussi couarde qu'égoïste- passe presque pour un personnage secondaire de sa propre série ; l'univers merveilleux dans lequel baigne l'histoire, avec ses petits elfes et ses gros dragons, occupe quant à lui le devant de la scène, permettant les développements inattendus du scénario. Bien sûr, tout cela n'a plus grand chose à voir avec l'histoire originale, moins encore avec l'Histoire tout court, mais le lecteur le sait bien ; malgré le titre de la série, il ne s'attend pas à une nouvelle version du film de Disney. D'ailleurs, même le personnage de la Belle Marianne est traité ici avec beaucoup de dérision. On est constamment dans le second degré, dans l'humour de référence, et en même temps dans une sorte d'héroïc fantasy qui ne dirait pas son nom.
« Une jeunesse qui s'enfuit », dans la série Donjon Potron-Minet. Chez Delcourt.

Alors qu'on fête ces jours-ci les vingt premiers albums du Donjon, l'un d'entre eux a particulièrement retenu mon attention. Resté sur le souvenir du merveilleux « Chemise de la nuit » qui reste à ce jour le meilleur album de cette « arborescence », j'ai ouvert avec une certaine impatience ce troisième volume en collaboration avec Christophe Blain. Et je n'ai pas été déçu. L'univers développé dans Potron-Minet reste le plus poétique de cette galaxie qui ravive tous les monstres planqués dans les sous-sols des cerveaux de Sfar et Trondheim. Hyacinthe est un héros délicieux de candeur et de tendresse presque enfantine. Il se frotte ici à l'amour dans une aventure qui confirme les petites obsessions de Joann Sfar, bien décidé à être l'un des rares créateurs de la BD à oser aborder avec humour -mais en appelant un chat un chat- les petits tracas sexuels des hommes. Hyacinthe fait la connaissance des maladies honteuses et des femmes de petite vertu avec un naturel désarmant et un humour qui évite la moindre vulgarité. Il faut dire que le dessin de Christophe Blain est un régal et contribue grandement à la fraîcheur du projet. Quant à l'action, elle est présente d'un bout à l'autre avec un égal bonheur. Blain virevolte, botte, touche, pique, cabriole, sans jamais fatiguer sa plume. La scène d'ouverture à elle seule vaut le détour. Et prouve que ce trio est décidément en grande forme.
« Journal d'une célibataire », par Didot et Daphnée. A la Sirène.

La lecture de ce « Journal d"une célibataire » ne devrait pas vous empêcher de dormir. N'y cherchez ni astuces scénographiques ni astuces narratives, Didot et Daphnée n'ont pas cherché midi à quatorze heures. Surfant sur la vague du journal de Bridget Jones qui semble avoir donné le coup d'envoi d'une mode qui n'épargne ni la littérature, ni le cinéma ni la BD, les auteurs signent un livre parfaitement prévisible aux décors minimalistes et aux personnages caricaturaux. Là où Dupuy-Berbérian parviennent à transcender le quotidien pour installer un univers personnel et créer une certaine magie, « Le journal d'une célibataire » se contente de clichés restitués sans aucun talent. Bref, même s'il arrive qu'on sourie à la lecture de cet album, on ne peut que regretter l'inflation de BD sur le quotidien qui ont de moins en moins de choses à dire... et à montrer.
L'homme qui ne valait plus rien par Thierry Bellefroid
« L'homme qui ne valait plus rien », par Nikola Watko. Aux Requins Marteaux.

Encore un de ces petits livres jouissifs dont nous régalent régulièrement les Requins. Steve Austin, ça vous dit quelque chose ? Sûrement, si vous avez plus de 35 ans. Rappelez-vous. L'homme bionique, qui valait six milliards. Un feuilleton télé qui a bercé l'enfance de millions de spectateurs. Et que Nikola Watko, l'auteur des déjà très trash « Bijoux de famille » et « Slots », passe au crible de la dérision. Steve sombre dans l'alcoolisme d'abord, dans la drogue ensuite, victime de l'indifférence de super Jaimie, devenue amnésique. C'est tout l'univers de la série télé qui est pastiché ici, sans aucun état d'âme, et pour le plus grand bonheur du lecteur. Un comix franchement aussi drôle qu'irrespectueux que l'on ne peut que conseiller aux nostalgiques de cette époque où l'on croyait dur commpe fer aux héros invincibles, incorruptibles et infaillibles.
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