Faire une bio d'un auteur connu pour sa discrétion et son rejet des apparitions publiques tenait de la gageure. C'est désormais chose faite, Frédéric Niffle a passé une semaine entière à récolter les impressions de toutes sortes de Jean Van Hamme et en a retiré son "Ittinéraire d'un enfant doué". Van Hamme est l'auteur que certains bédéphiles adorent détester pour ce qu'il représente (la réussite financière) et ce qu'il défend (la BD "populaire", grand public). Il était donc temps de le connaitre mieux. Contrairement à ce que certains essayent de faire croire, JVH est un pur "self made man", à savoir qu'il ne provient pas d'une famille riche, qu'il n'a pas eu d'autre soutien que lui-même pour arriver là où il est arrivé. D'où probablement son côté extrèmement exclusif dans ses relations : ce n'est pas le genre de personne avec qui on aimerait aller boire un verre pour discuter BD. Son expérience dans le monde de l'industrie et de la finance a certainement largement contribué au fait qu'il cherche à produire au maximum des albums qui plaisent au plus grand nombre, donc rencontrent la demande "populaire". Il l'avoue d'ailleurs lui-même: il n'a aucun chef d'oeuvre à son actif, même s'il considère (à juste titre d'ailleurs) que Le Chninkel et SOS Bonheur sortent largement du lot. JVH parle aussi de sa courte expérience en tant que directeur général chez Dupuis et de sa contribution au développement de la BD "industrielle" telle que nous la connaissons aujourd'hui: les uns (dont je suis) applaudiront, les autre, plus idéalistes peut-être, s'enfermeront dans leur opinion que Van Hamme est décidement un "marchand de soupe" dans un monde artistique. Clairvoyant, il reconnait une perte de vitesse manifeste chez Thorgal et dans une moindre mesure XIII. Mais, regardant ses quelques 30 ans de métier, il est logiquement satisfait de son évolution. Même s'il n'a pas vendu autant que Uderzo, il n'en reste pas moins que, en cumulé sur 10 ans et en restreignant à la langue française, les ventes de Van Hamme dépassent les 20 millions d'exemplaires. Bien peu d'auteurs peuvent en dire autant. Il est important de retenir que JVH ne se considère nullement comme un artiste, mais plutôt comme un producteur. Il ne revendique pas non plus une grande qualité pour son oeuvre: c'est de la BD intelligente (il apporte pour preuve son utilisation par certaines universités de commerce, voire même par des cabinets d'avocats prestigieux ), mais de la BD populaire. Voilà au moins qui est clair. JVH, un auteur mal-aimé? Peut-être par jalousie de son incontestable succès, peut-être par mépris de certaines tranches des bédéphiles pour le "populaire". Qu'importe : il restera toujours lui-même, sûr de lui et de ses capacités à séduire le plus grand nombre. Moi qui aime au moins 75% de la production de Jean Van Hamme, je ressors de la lecture de cet ouvrage avec encore davantage d'admiration pour l'homme, comme pour l'auteur.