Chabouté nous a concocté un album sur lequel il y a pas mal de choses à dire... Côté graphisme tout d'abord. C'est toujours aussi typique de son style, très personnel. Il manie toujours avec autant de bonheur le noir et blanc, c'est une merveille. On aime ou on n'aime pas, moi j'adore. Côté personnages ensuite. On retrouve dans cet album des "gueules" connues. Les vieilles sorcières, ici grenouilles de bénitier, la peintre (cf Zoé), et par-ci par-là des visages somme toute assez familiers à l'univers de Chabouté. Petit arrière-goût de déjà vu, donc. Ce qui m'a époustouflé dans cet album, bien plus que dans tout autre qu'il ait fait jusqu'à présent, c'est l'ambiance. Elle est merveilleusement bien développée, et envahit le lecteur dès le tout début. Lugubre, sombre, glauque, oppressante, tenace, je suis véritablement épaté, c'est magnifique. Cela est dû en grande partie aux passages muets, comme par exemple les premières pages de l'album qui nous immergent dans cet univers fermé, mais aussi bien sûr aux personnages de Chabouté et aux expressions qu'il sait si bien leur faire prendre. (Et regardez comment il découpe la scène où le lapin est poursuivi, et le cheminement de la voiture de l'inspecteur ! Très bien fait, ça !!!) Le scénario quant à lui est tout d'abord excellent. Le mystère est complet, on ne dispose de presque aucun indice, et on patauge dans la neige et le doute avec l'inspecteur Tarpon. Excellent donc, jusqu'à... la fin. Eh bien oui, il devait y avoir un "mais", et pour moi, il se situe dans la conclusion de l'album, que je trouve somme toute très banale, et donc assez décevante. Un peu comme le soufflé de Gaston Lagaffe : l'ambiance est là, parfaite, la tension monte, monte, elle est patiemment construite pendant 130 pages, et soudain, pouf, le soufflé retombe. J'aurais volontiers mis un 5/5 à cet album, mais étant donnée la façon dont il se conclut, se sera un 3. Malgré cela, si vous aimez ce qu'a fait Chabouté (les "Zoé", "Sorcières" et autres "Pleine Lune, je veux dire), vous pouvez vous ruer sur cet album, il en vaut la peine. Et sinon, vous pouvez aussi vous ruer dessus.