Les 56 critiques de Arnaud Reymann sur Bd Paradisio...

"Au service secret du grand timonier", Tigresse Blanche tome 1, Yann et Conrad chez Dargaud.

Les Innommables, sans les innommables. Avec Tigresse Blanche, Yann et Conrad signent ici le prologue de la série mère. Un prologue prévu en deux volumes, qui auraient pu s'appeler « Les Aventures d'Alix ». Mais cela a déjà été fait, paraît-il.. Alors les deux auteurs (dont nous connaissons tous le goût immodéré pour la parodie) ont truffé cet album de références. Du compagnon d'Alix (Êh-Nak) à Sir Francis Flake (sujet très british de Sa Gracieuse Majesté). Au menu de cet album : ironie, dérision et meurtres en pagaille. Et puis surtout une ambiance, propre à toute la saga Innommables. Yann dresse un western Asiatique, où tous les coups sont permis. On y assassine, étripe ou décapite joyeusement, avant de terminer au « Lotus pourpre ». Classique, quoi... Yann et Conrad sont égaux à eux-même : si vous avez aimé Les Innommables, vous adorerez ce dyptique. Si vous aimez Tigresse Blanche, 11 tomes du trio d'affreux vous attendent.
Cla$$war par Arnaud Reymann
"Cla$$war", de Williams, Hairsine, Foreman et O'Grady, chez Delcourt.

Comic atypique comme a pu l'être Watchmen en son temps, Cla$$war n'en atteint pas le niveau mais reste une oeuvre des plus intéressantes. American, super héros invincible et arme de guerre vivante au service des Etats-Unis d'Amérique ne croit plus au bien-fondé des décisions prises, et qu'il est chargé d'appliquer. Il est dommage de ne pas avoir plus de détails dans l'album, sur ce changement dans le chef du héros. Ainsi, on découvre immédiatement le combat qui oppose le héros rebelle et son ancien employeur (le Président de la plus puissante nation du monde), mais le cheminement psychologique qui l'a amené à prendre cette position n'est évoqué au travers de flash-back très parcellaires. Sinon, l'idée du premier guerrier d'un pays en rupture avec les valeurs qu'il défend est toujours aussi séduisante. Le plus fort des américains ne supporte plus le financement de la CIA grâce à la vente de drogue, le maintien au pouvoir de certains dictateurs pour préserver un « équilibre » souhaité ou encore le déclenchement de conflits pour booster les contrats d'armements. Bref, il ne supporte plus le système en place, système où Mr President n'est rien d'autre que le porte-parole des hommes les plus riches du monde. Un super héros alter-mondialiste, finalement..
« Terra Incognita », Les naufragés d'Ythaq 1, de Christophe Arleston et Adrien Floch, Soleil.

Inutile de le préciser, c'est la nouvelle série d'Arleston. Et pour tout dire, c'est marqué dessus. Le produit est estampillé, et ne dénature pas le catalogue du bonhomme, le concept d'Ythaq mêlant Héroïc Fantasy et Space Opéra, quelque part entre l'univers d'Aquablue et celui (qui lui est propre) de Lanfeust des Etoiles. Passé ce point, force est de constater que le produit est solide malgré son air de déjà-lu. En conteur chevronné, Arleston met en scène des personnages typés, a priori caricaturaux, mais qui semblent appelés à évoluer au-delà des simples stéréotypes. L'histoire est classique mais charpentée, développée sans temps morts sur quelque soixante pages (un pied de nez à Menu et sa fixation sur le 48 CC ?). Le scénariste semble même brider sa tendance naturelle au calembour tous azimuts pour asseoir sa crédibilité, sans pour autant négliger des pointes d'humour référencé (l'attaque des Banfoos a quelque chose de « Sacré Graal »). Adrien Floch insuffle en virtuose le dynamisme nécessaire à l'ensemble, fort du graphisme semi-réaliste qui a fait son succès sur Shloka. Bref, une parfaite entrée en matière. La preuve que sur un terrain désormais balisé, il y a encore moyen de se faire plaisir et de produire des séries de qualité. Heureusement, car nommer Ythaq une histoire de naufragés est présage pour les personnages de certaines difficultés de retour. Et d'un nombre d'albums en conséquence..

Je viens de lire, de Philippe Belhache.

Second avis : « Terra Incognita », Les naufragés d'Ythaq 1, de Christophe Arleston et Adrien Floch, Soleil.

Arleston lance les bases d'un « space opera » plutôt prometteur, mais de facture classique. Les personnages rentrent en scène, les rôles sont attribués. Le trio de naufragés (l'aventurière, le technicien et la peste), un guerrier Banfoo (peuplade d'Ythaq) et le sage Feng (autre peuplade). Quant à la quête : pour l'instant, survivre. Dans un deuxième temps, quitter Ythaq. Mais tout cela pourrait bien changer. Arleston applique une recette éprouvée. Découpage, mise en page, scénarisation : on retrouve ce qui a fait le succès de Lanfeust ou de Trolls. Le dessin de Floch cadre pleinement avec ce que l'on peut trouver dans le sérail de Soleil. Il n'y a donc pas vraiment d'éléments qui distinguent cette série d'autres séries du catalogue, sinon le scénario. Dans cette nouvelle série, l'accent n'est pas mis sur l'humour mais sur l'aventure. Et ce de façon plutôt réussie.
"Encore quelques heures à vivre", L'Esprit de Warren tome 4 , de Brunschwig, Servain et Rieu chez Delcourt.


Neuf années se sont écoulées depuis la parution du premier album, presque sept depuis le tome trois : et voici enfin le dénouement de cette série. Scénariste des plus prolifiques, les parutions signées Luc Brunschwig se font plus discrètes ces derniers mois. Hasard des calendriers ? On ne boude donc pas son plaisir en clôturant ENFIN la lecture de ce cycle. Brunschwig est toujours aussi efficace dans sa narration. Rythme, suspense et action tout en insistant sur la psyché des personnages : le scénario est véritablement ciselé de main de maître. On constate au passage que Brunschwig tient à établir une cohérence entre ses différentes séries. Ainsi par exemple le clin d'oeil au « Pouvoir des innocents » en utilisant certains des personnages dans les deux séries. Tout aussi efficace, le dessin réaliste de Servain colle au genre. Reste cependant une impression étrange, en refermant l'album. Le sentiment non pas d'une fin facile ou prévisible, mais en tout cas surprenante par son côté lapidaire. Difficile d'en dire plus sans dévoiler le dernier acte. Un conseil : relire les trois premiers tomes pour bien comprendre toute la subtilité de la série.
"Sanctuary" volume 12, par Fumimura et Ikegami chez Kabuto.

Rarement une série a su rester aussi palpitante jusqu’au dernier volume, distillant les éléments de cette vaste intrigue et des retournements de situation à chaque opus, sans jamais lasser. Sanctuary fait partie de ces albums (au même titre que Monster d’Urasawa ou Quartier lointain de Taniguchi) susceptibles d’amener au manga des lecteurs n’en ayant jamais lu. La série transcende les préjugés que certains éprouvent à l’encontre du manga, elle est un condensé de tous les éléments qui font la force du genre. Les nombreuses pages que compte chacun des 12 volumes permettent de développer l’intrigue de façon passionnante, de poser les ambiances et surtout de percevoir la personnalité complexe de chaque personnage. Déjà une série incontournable du manga, en rappelant toutefois qu’elle est destinée à un public adulte. Certaines scènes sont sexuellement plus qu’explicites, d’autres très violentes. Mais tout cela sans aucune gratuité : ces scènes concourent à dépeindre au plus près le monde des Yakusas.
Old Boy T. 1 (Old Boy) par Arnaud Reymann
"Old Boy" volume 1, de Tsuchiya Garon et Minegishi Nobuaki chez Kabuto.

Après avoir été enfermé pendant dix ans dans une chambre d’hôtel, « le prisonnier » est relâché. Comme souvent, le fil conducteur de l’intrigue est original, et donne envie de connaître la suite. Ce qui surprend, par contre, c’est le peu d’éléments distillés au long de ces 200 pages. Les auteurs plantent le décor et les personnages mais s’arrêtent là. On n’a donc pas la moindre piste sur l’identité du prisonnier, du commanditaire de sa détention, et encore moins sur les raisons qui ont poussé le commanditaire à ordonner cette détention dans une « prison privée ». Le dessin est très fluide , le découpage d’une grande clarté : tous deux évoquent le graphisme de la série Zipang (Kana). Old Boy constitue donc une très agréable mise en bouche, en attendant la suite.
"La Vengeance du manchot", Bouncer tome 4, de Boucq et Jodorowsky, Les Humanoïdes Associés.

Ce quatrième opus est à mon sens le volume le plus abouti de cette série ! C'est dire, lorsque l'on connaît la qualité des albums précédents. Le découpage des scènes d'action est d'une clarté exemplaire, plus aéré sans doute que dans les trois premiers albums, le graphisme de Boucq des plus expressifs et surtout des plus vivants. Les personnages portent leur personnalité sur leur visage, parfois à la limite du pastiche mais sans jamais tomber dans l'excès. Jodorowsky poursuit l'introspection de son cow-boy manchot en incluant des éléments classiques du genre western. Un exercice redoutable, car efficace lorsqu'il est bien mené, mais d'une banalité affligeante dans le cas contraire. Or tout cela est ici orchestré de main(s) de maître(s). Ainsi le siège de la ferme, action qui donne le coup d'envoi de cet album. Seul un autre siège me laisse un souvenir d'aboutissement comparable, celui tenu par Red Dust contre les frères Dobbs (Comanche de Greg et Hermann). Le Bouncer à définitivement acquis sa place au panthéon des cow-boys de la bande dessinée.
L'aigle sans orteil par Arnaud Reymann
"L'aigle sans orteils", par Lax, Dupuis, collection Aire Libre.

Un des critères qui me conforte dans l'idée d'avoir en main une très bonne histoire, c'est assurément lorsque un auteur parvient à me passionner avec un récit sur un thème qui me rebute. En clair, je ne m'intéresse pas au cyclisme, et la grande boucle me laisse complètement indifférent. Rien ne me prédispose donc à aimer les aventures d'un pionnier du Tour de France. C'est compter sans le talent d'un Christian Lax au mieux de sa forme. Lax a su trouver le rythme et les mots pour faire de cette histoire un hommage vibrant aux pionniers du Tour, sans perdre en cours de route les lecteurs cyclophobes. L'intelligence du récit est d'être articulé autour du destin d'un homme, Amédée. Les thèmes abordés, le cyclisme et le handicap, le courage d'Amédée et sa volonté, sont des thèmes chers à Lax, et il parvient ici à les rendre avec une émotion palpable. Bref, un album magnifique.
Prime Time (Tony Corso) par Arnaud Reymann
"Prime Time" - Tony Corso tome 2, de Berlion chez Dargaud.

Tony Corso, c'est le retour de la grande aventure. L'ambition de Dargaud n'est pas des moindres : en faire la BD de l'été. Le tome 1 est d'ailleurs paru il y a juste un an, lui aussi à la veille des vacances. Pourquoi le retour de la grande aventure ? Parce que l'on retrouve, dans Tony Corso, les éléments qui ont fait le succès de grands héros de papiers d'il y a dix ou vingt ans. L'accent est mis sur l'enquête, et très très peu sur Corso dont on ignore tout ou presque. Pas de passage en revue des états d'âme du héros. L'intrigue est ancrée dans notre quotidien, et le maître-mot est « action ». Reste cependant un dessin un peu trop figé, un découpage cinématographique des scènes parfois hasardeux. Berlion change radicalement de style : la ligne claire du « Cadet des Soupetard » ne convient pas vraiment aux aventures du détective de la jet set Tropezienne, mais le graphisme doit encore trouver son rythme. Au final, le pari est sans doute réussi puisque l'on passe un très agréable moment à lire ce deuxième opus.
Code Apocalypse (Soda) par Arnaud Reymann
"Code Apocalypse", Soda tome 12, par Tome et Gazzotti, Editions Dupuis, Collection Repérages.

Ce dernier opus renoue définitivement avec le côté polar noir des deux premiers tomes. Le Lieutenant Soda ne retrouve pourtant pas son « physique originel ». Dans les deux premiers volumes, sous la plume de Warnant, ce flic-pasteur a tout de l'anti-héros. Petit, malingre et têtu. L'encre employée par Gazzotti pour la suite de la série doit contenir des anabolisants : grand et fort, il n'en conserve pas moins son caractère de flic désabusé. Ce douzième opus joue encore plus sur le désenchantement des valeurs américaines, sur un air de déjà-vu. Un scénario ancré dans une « réalité » pas si lointaine. Tome approfondit les rapports entre les protagonistes et leur caractère : le Captain Pronzini, le Sergent Linda Tchaïkowsky et Soda. Ces personnages s'étoffent, ce qui laisse présager d'autres albums d'aussi grande qualité.
Angry T. 1 (Angry) par Arnaud Reymann
Angry, tome 1 de You Kyoung Won et Kim Jae Yeon chez Paquet, collection asiatique.

Paquet se lance donc dans le manga, et entame cette nouvelle collection avec un manwha (un manga coréen). Les différences entre les mangas et les manwhas sont notables, même si peu perceptibles chez nous au vu des catalogues proposés. Le manwha se lit de gauche à droite, comme une bd européenne. Les thématiques abordées, à l'instar du manga, concernent tous les aspects de la société coréenne. Ceux que nous connaissons, au travers des quelques trop rares parutions traduites, sont plutôt des histoires à destination d'un public adolescent masculin, où des éléments magiques sont omniprésents dans des thèmes généralement axés sur la guerre, la bagarre ou une quête. « Angry » se situe dans cette veine : une bd de baston (avec cette fois le judo comme alibi), un jeune orphelin qui a une revanche à prendre sur la vie. Mais pas de magie. Le graphisme est très soigné, pas de simplification du dessin des personnages pour exprimer leurs sentiments ou états d'âme comme dans beaucoup de mangas. Au final, une série plutôt classique qui ne déconcertera pas les amateurs du genre. Dernier détail : pour cette nouvelle collection, Paquet semble miser sur le prix de vente. Moins de cinq euros...
Loup-garou par Arnaud Reymann
Loup-Garou de Alain Henriet chez Khani Editions

Henriet au scénario et au dessin. L'auteur se fait visiblement plaisir en réalisant ces trois saynètes sur le thème des loup-garous, publiées à compte d'auteur. Des histoires très courtes (l'album se lit en quelques minutes à peine), en noir et blanc, dont le format évoque un supplément de magazine, ou un fanzine. Deux des mini-récits ont d'ailleurs été prépubliés dans Spirou et Kiwi. Les fans d'Henriet ou de Loup-garous y trouveront sans-doute leur compte...
"Exil à Port-Fleuri", Les Conquérants de Troy Tome 1, par Arleston et Tota chez Soleil.

L'éditeur Toulonnais est décidé à profiter autant que faire se peut du phénomène Lanfeust. Voici donc le nouveau-né, toujours supervisé par Arleston, accompagné pour la circonstance de Tota (dessinateur officiant sur Aquablue le temps de quelques tomes). Mais la magie du monde de Troy perd en puissance au fil de ses séries satellites. L'humour tout Goscinnyen des premiers « Lanfeust » ou des « Trolls » a disparu. « Les Conquérants de Troy » se présente donc comme une série classique d'héroic fantasy. Une quête et une troupe composée de personnages aussi différents que traditionnels dans ce type de récits (la jolie aventurière, le jeune frère maladroit, le dandy-boulet-gaffeur, et un compagnon dont on ne connaît pas encore les aptitudes. Sans oublier le dragon, sorte de Milou du héros de HF). Pas vraiment de surprises, donc, mais il faut reconnaître qu'Arleston s'y entend pour construire une histoire. Si cet historique des origines de Troy n'est pas du même niveau que la série-mère, cela reste cependant d'une lecture agréable.
"Le loup de Tasmanie", Russell Chase tome 1, aux Humanoïdes Associés.

Qu'ils étaient ternes, les profs de ma fac de droit. Pas un seul pour venir habillé d'un maillot de corps ultra-moulant et nous emmener dans de furieuses aventures. Alors que dans d'autres facs... celle d'archéologie, par exemple. Le professeur Jones y vient armé de son fouet. Et celle de zoologie : le professeur Chase n'y passe que peu de temps, occupé qu'il est à être traqué par les triades ou autres maffias locales, un peu partout dans le monde. Les études universitaires ne sont plus ce qu'elles étaient. Ou en tout cas ce qu'elles sont dans l'esprit des scénaristes. Ce premier album des aventures de Russell Chase est à prendre tel quel : sans prétentions, comme une histoire classique d'aventures. Les ficelles scénaristiques sont des plus traditionnelles. Un professeur d'université, globbe-trotteur, emporté par sa passion, la cryptozoologie. L'histoire rebondit de page en page, le récit ne se focalise pas sur les personnages (dont la personnalité est à peine effleurée) mais sur l'intrigue. Une quête classique. Le héros - ainsi que tout un tas d'ennemis très puissants - recherchent un même objet : la main du Yéti. L'élément plutôt neuf, ici, est ce concept de cryptozoologie. Une science des animaux mythiques. Question rythme, cet album n'est pas sans rappeler ce que l'on pouvait lire il y a quelques dizaines d'années (Vahardi, Marc Dacier, etc..). Une histoire agréable et distrayante, mais qui ne marquera peut-être pas les esprits.
"Opus II : Passé composé", Phenomenum Tome 3, par Kaminka et Vedrines chez Glénat.

Un dessin trop anguleux et figé, et cela tout au long des trois albums, mais peu importe. Depuis le premier volume, la richesse et l'originalité du scénario compensent les quelques lacunes graphiques. Le genre d'histoire que l'on découvre de plus en plus en manga et malheureusement de moins en moins dans la BD franco-belge. L'idée de départ est assez simple : un homme se découvre la capacité d'arrêter le temps. Ce qui lui confère un pouvoir quasi infini : dans cet espace figé, lui seul continue d'être libre de ses mouvements. Enfin pas vraiment, puisqu'il s'avère que d'autres ont ce même pouvoir. L'idée de maîtriser ainsi le temps nous a tous traversé l'esprit un jour ou l'autre, mais nous sommes-nous demandé ce que nous en ferions vraiment ? Rêves de richesses faciles, sans aucun doute. Tout comme le fait Yann au début. Mais après ? En attendant de trouver une réponse, celle apportée par Kaminka et Vedrines est plus que passionnante.
Lydia (Mertownville) par Arnaud Reymann
"Lydia", Mertown Ville Tome 1, par Michel Falardeau chez Paquet.

Le dessin rappelle irrésistiblement Boondock's d'Aaron Mc Gruder. Les personnages de Falardeau sont de ceux que l'on imagine plus aisément en logo de vêtements pour surfer ou rappeur plutôt qu'en héros de bande dessinée. Et sans doute encore moins dans une histoire de justicières aux supers-pouvoirs. Comme quoi... Passé le cap de la couverture (pas vraiment engageante) puis de la première page, on rentre très rapidement dans le monde de l'auteur. Un monde pour le moins surprenant : le récit commence de façon assez réaliste et classique. Falardeau décrit la relation d'une ado délurée décidée à faire des études d'art et de son père, militaire à la retraite (façon Cabu) qui, bien sûr, voit les choses autrement. Du réalisme, l'auteur amorce un passage en douceur vers ... on ne sait pas encore vraiment. Mélange de Harry Potter et de comics américain ? A voir... en tout cas, j'ai très envie de connaître la suite.
S.E.T.I. (L'arche) par Arnaud Reymann
"S.E.T.I.", L'Arche Tome 3, par Felix Mallié et Rieu chez Soleil.

Troisième et dernier volume, S.E.T.I. est sans aucun doute l'album le plus abouti de cette trilogie de science-fiction. Tant au niveau du dessin (ligne claire moderne) qu'au niveau du scénario. La conclusion réserve son lot de surprises et de retournements de situations, l'intrigue est très savamment orchestrée pour maintenir le suspense jusqu'à la dernière page. Et c'est peut-être là le reproche à faire à cette passionnante série : le scénario aurait sans doute gagné en force en distillant les "révélations" et surprises au fil des deux albums précédents. Car dans les premiers volumes, les auteurs plantent le décor d'une aventure SF agréable mais somme toute classique. Ce troisième tome vient bousculer cette routine en obligeant le lecteur à remettre toute sa vision des personnages en cause. Pour ne pas dévoiler la fin de cette course-poursuite au CDRom, signalons simplement qu'il est rare de trouver un bon scénario où se mêlent bagarres, conflits d'intérêts, meurtres et histoires d'amour sans qu'il n'y ait de "méchants"... un tour de force réussi dans l'Arche.
"Les eaux mortes", de Rodolphe et Maucler. Editions Albin Michel.

L'atmosphère des enquêtes du commissaire Raffini rappelle irrésistiblement celle de son confrère Maigret. Pas seulement en raison de l'époque choisie, mais surtout par le ton intimiste et la galerie de portraits dressée par les auteurs. Raffini est le vecteur par lequel on découvre un petit village (Saint-Hilaire), ses habitants, et ses petites histoires sordides. Ce qui séduit dans cet album, c'est la description à la limite du stéréotype des notables du village, leurs travers, leurs comportements. Une enquête qui n'en est pas vraiment une. Comme le commissaire parisien, on arrive de façon totalement impromptue à Saint-Hilaire, le temps d'un week-end. Deux jours assez riches en émotions : l'énigme du « corbeau » qui écrit aux habitants va trouver son dénouement, un meurtre sa conclusion. Lorsque Raffini reprend la route, il n'a pas résolu grand chose, mais il semble être le témoin indispensable pour que les pièces se mettent en place et que la vie du bourg reprenne son cours habituel. Cette histoire laisse un sentiment agréable d'avoir assisté à un épisode d'une fresque plus large, d'avoir été le témoin privilégié d'une chronique villageoise.
"L'école emportée", tome 3, par Kazuo Umezu chez Glénat - Collection Bunko.

Cette série de science-fiction paraît dans le format Bunko chez Glénat (dans la collection éponyme). Chaque album comporte quelques centaines de pages (un minimum de 300) mais dans un format nettement plus petit que d'habitude ; un format réservé aux grands classiques du manga, il permet de constituer une intégrale avec un nombre moins important de volumes... et pour un prix modique. Aux yeux d'un européen, ce type d'album tient plus du missel que de la bd, et nécessite parfois une vue plus que perçante pour distinguer textes et dessins, une question d'habitude sans doute. « L'école emportée » est un récit fantastique, à la frontière de l'horreur. De jeunes écoliers effectuent avec leur école un bond dans l'espace temps, et se retrouvent sur une terre hostile, désertique, peuplée « d'insectes » géants et carnivores. Ces enfants du niveau de la maternelle et du primaire livrés à eux même font preuve d'une violence rare. La violence scolaire est un thème récurrent chez les mangakas, et abordée sous l'angle du fantastique, elle soulève encore plus de questions. Cette violence est-elle innée chez les écoliers Nippons, ou est-elle générée par des circonstances particulière ? Telle semble être l'interrogation de Kazuo Umezu. Le style de l'auteur est plutôt naïf, ce qui accentue le décalage avec la mort et la violence omniprésentes dans le récit. Mais la répartition des rôles est de facture assez classique : alors que tous perdent la tête, un des enfants (Shô) semble garder la sienne sur ses épaules. Shô n'a pourtant rien du héros, petit garçon capricieux et élève moyen, le drame révèle ses qualités et son courage.... Mais le plus grand intérêt de cette série réside peut être dans le fait qu'il s'agit d'une histoire culte au Japon. L'occasion donc d'appréhender la culture Manga.
The girl from Ipanema par Arnaud Reymann
"The girl from Ipanema", par Herman et Yves H., Le Lombard Collection Signé.

Pour leur troisième opus commun les Huppen père et fils, Hermann et Yves H. poursuivent leur road movie américain. Après Liens de sang, aux accents et aux décors très new-yorkais et après Manhattan Beach 1957, qui sillonne le Sud profond à la recherche d'un hypothétique eldorado, Yves H. plante ses caméras sur les contreforts de Los Angeles, sous le Hollywood Sing. Polar toujours comme dans les deux premiers volets de la trilogie, mais période contemporaine après des années 50 et le milieu des seventies. En poussant toujours plus à l'Ouest, Yves H. pousse également de plus en plus loin le style d'écriture, qui se veut très marqué par la série B américaine. Mais à force, il finit par pousser le bouchon un peu loin. Non que le scénario ne tienne pas la route. Sans révolutionner le genre, loin s'en faut, il ne pêche ni par simplisme ni par manque de cohérence. Par contre, les planches de Hermann regorgent, débordent faut-il même dire, de monologues en « voix off ». Certes, ces passages récitatifs sont une sorte de marque de fabrique du polar US, mais là, Yves H. y va un peu fort, ne laissant finalement plus aucune place au talent de son père pour montrer le non-dit. Jusqu'à introduire dans chaque dessin ou presque des sortes de fiches techniques qui décrivent littéralement le moindre élément. On peut estimer que le lecteur a parfois besoin d'aide pour comprendre le propos, qu'il se laisse parfois distraire par la télé qui fonctionne, le chien qui jappe et les voisins qui crient, que, trônant sur le plus auguste des sièges, il ait besoin de temps pour mener à bien son dur labeur... Néanmoins, cette fille d'Ipanema n'avait pas besoin d'une telle lourdeur et de tant de verbiage. Dans le genre la version de Renaud et Dufaux dans la série Jessica Blandy sonnait mieux, plus proche en tout cas du magnifique standard d'Astrud Gilberto.

Par Laurent Fabri.

Second avis : "The girl from Ipanema", par Herman et Yves H., Le Lombard Collection Signé.

Suite et fin de la trilogie américaine des Hermann, père et fils. Un album aux références affichées, celles d'autres trilogies écrites par James Ellroy, grand maître du polar noir américain. Les passionnés du genre y verront aussi l'influence d'un Michael Connely, autre tenor de la littérature noire. Mais il ne suffit pas de s'inspirer des auteurs précités, ni de reprendre les éléments habituels et essentiels de leurs romans pour parvenir à mettre sur pied une oeuvre de qualité. Le sexe, le meurtre, la corruption, la maffia, flics pourris ou intègres : ces seuls ingrédients ne font pas un bon scénario s'il n'y a pas le liant indispensable : une intrigue passionnante. Dès les premières pages de "The girl from Ipanema", on perçoit un déséquilibre. Le narratif et le descriptif l'emportent sur le dessin, certaines planches sont si chargées de textes qu'il n'y a place que pour trois ou quatre (petites) cases. Une écriture assez froide, contextuelle, parfois semblable à un rapport de police, mais qui ne réussit pas à faire rentrer le lecteur dans l'ambiance voulue par le récit. On peut se demander si cette histoire ne tient pas plus du roman illustré que de la bande dessinée. Reste par contre le plaisir incontestable ressenti à la lecture d'un album dessiné par Hermann. A l'apogée de son art depuis déjà de nombreux albums, Hermann démontre une fois de plus qu'il maîtrise comme nul autre la couleur directe.
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