Livre 1 (Purgatoire) par Thierry Bellefroid « Purgatoire, Livre 1 », par Chabouté. Chez Vents d'Ouest. Dans la collection Equinoxe.
La couleur, enfin, pour un Chabouté qu'on croyait acquis à vie au noir et blanc. Mais une couleur discrète, qui s'excuse presque d'être là. Normal, le propos, lui, est noir, très noir. Jusqu'ici totalement réaliste (mais on connaît l'animal, il résiste rarement à aller au-delà des apparences pour emmener son lecteur sur la pente savonneuse du fantastique, au moins du bout des doigts ; le prochain album sera donc déterminant), ce livre 1 nous raconte la descente aux enfers d'un jeune indépendant auquel tout sourit jusqu'à l'incendie de sa maison. Endetté jusqu'au cou, victime d'un assureur pour le moins véreux, le voilà à la rue, montré du doigt, rejeté, en marge. Même si tout cela se passe vite, très vite, on ne peut s'empêcher de penser, à la lecture de cette BD, que notre petit confort ne tient parfois qu'à peu de choses. Chabouté le démontre avec brio, son récit est comme une machine implacable, elle avance vers un dénouement que l'on suppose tragique. La fin laisse le lecteur imaginer ce que sera la série, mais sans pour autant le planter en plein milieu de l'action, comme c'est trop souvent le cas au terme des premiers tomes de séries. Chabouté, artisan du one-shot depuis ses débuts, a eu la bonne idée de trouver comment achever ce premier récit de manière cohérente. Seule la dernière planche abandonne le lecteur sur une interrogation mystérieuse qui trouvera forcémenent son écho dans le tome 2. Pour le reste, cette histoire très dure nécessitait bien 64 pages pour se mettre en place : les événements vont déjà à toute allure et les personnages sont campés en deux temps trois mouvements. On n'ose pas imaginer ce que ce premier tome aurait donné s'il avait dû tenir dans un format standard de 46 planches. Grâce à sa longueur, Chabouté trouve le temps de dessiner des respirations, souvent muettes, qui sont essentielles à la qualité du livre.