Les 276 critiques de Philippe Belhache sur Bd Paradisio...

"Comme tout le monde" tome 1, de Spiessert, Lapière et Renders. Expresso Dupuis.

Du cinéma à la BD, de la BD au cinéma... Les deux supports entretiennent des rapports à la "Je t'aime, moi non plus", avec des résultats plus ou moins heureux selon les cas. "Comme tout le monde" est annoncé comme une relecture du thème développé dans le film homonyme sorti cet été dans les salles françaises, il y a seulement quelques jours en Belgique. Le pitch est roublard, empreint d'un cynisme très contemporain. Un "Monsieur tout le monde" consacré comme tel par un jeu télévisé est utilisé à son insu par une société spécialisée, pour tester différents produits de consommation. Il a pour ce faire été placé auprès de lui une apprentie actrice à qui il a été demandé de partager sa vie... Le film ne semble pas avoir soulevé un enthousiasme particulier de la part des critiques en France. Cela n'enlève rien aux qualités de l'album, réalisé par les auteurs du script original eux-mêmes, dont le scénariste BD chevronné Denis Lapière. L'intrigue y est dense, cohérente et bien gérée, de la mise en place des protagonistes aux premiers dérapages. Le graphisme de Spiessert, dans la veine des Peyrault, Korkydu et autres disciples plus ou moins avérés de Dupuy et Berbérian, fait merveille dans le registre. A ranger non loin de "Une épaisse couche de sentiments", album paru il y a quelques mois dans la même collection, même si l'ensemble s'annonce finalement moins ancré dans la noirceur que la vision du monde développée par Gnaedig et Thirault.
Les cinq conteurs de Bagdad par Philippe Belhache
"Les cinq conteurs de Bagdad", de Fabien Vehlmann et Frantz Duchazeau. Dargaud, collection Long Courrier.

Encore un auteur touché par le syndrome du conte oriental ? Après David B., et son "Prophète voilé" (in "Le jardin armé", Futuropolis), Fabien Vehlmann s'empare à son tour du mythe des Mille et une nuits, dans un récit qui place l'art même du conte - et la création littéraire au sens large - au centre de toutes les préoccupations. Le scénariste met en scène cinq conteurs, visitant le Monde à la recherche de nouvelles idées pour mettre sur pied la plus belle histoire qui soit, à l'occasion d'un concours réunissant mille et un (!) des leurs. Leur tâche se complique à chaque étape, leurs relations minées par des antagonismes majeurs et les révélations un poil trop exactes d'une voyante un rien trop douée. Tout en conservant l'essence du conte oriental à la Sinbad, modernisé de quelques répliques XXIe bien senties, Vehlmann fait passer avec ce qu'il faut de distance amusée un discours qui lui est propre. Une réflexion sur la création artistique, sur l'intégrité du propos, le rapport avec le public, les compromissions de style ou même la célébration de la médiocrité, qui pourrait tout aussi bien s'appliquer au petit monde de la bande dessinée... Il est dommage que sur cette base narrative solide, Duchazeau ne se soit pas donné plus de moyens. Le découpage, souvent très classique, tend à enfermer son trait sensible, alors même qu'il excelle à capter les émotions et à restituer les ambiances. Le bonhomme ne semble se lâcher que sur quelques scènes clefs. Sans doute aurait-il gagné à donner un peu plus d'air à ses planches. Reste qu'en écrivant ceci, nous retombons (à pieds joints) dans l'éternel débat sur le fond et la forme. Quel était le thème de l'album, déjà ?
"Obtient la richesse ou meurt en essayant", Poungi II, de Bastien Chanmax. Danger Public.

Danger Public multiplie les projets multimédias. Avant même la sortie de ses Miniblogs, la filiale des éditions de Tournon avait tenté l'aventure "Poungi". Création du jeune graphiste Bastien Chanmax, les délires de Poungi la Racaille ont fait les beaux jours du bkcrew sur Internet avant de faire l'objet d'un premier recueil en janvier dernier, et d'un second pas plus tard que ces derniers jours. Multimédia ? Les gags de Poungi sont téléchargeables sur mobile via un simple appel SMS (ou à partir du site Danger Public). A part cela, le concept se décline comme une suite d'illustrations humoristiques jouant sur le décalage entre l'univers animalier de la banquise et un parler SMS-Verlan estampillé banlieue. Le Poungi de Chanmax est un loulou au QI à ras la visière, homophobe et violent, "sapeur" perpétuellement vêtu d'un survêtement jaune, drogué de foot et d'Internet, pour qui les meufs sont une denrée consommable. "Obtiens la richesse ou meurt en essayant" est souvent hilarant, avec des dialogues percutants et des situations plutôt riches d'observations. Mais pour paraphraser Desproges, l'album reste "toujours à la limite du bon goût sans jamais y tomber". Amis de la poésie antarctique, vous avez tout intérêt à attendre "L'empereur nous fait marcher" des frères Coudray, annoncé d'ici quelques semaines par La Boîte à Bulles.
"Les frontières interdites", Bunker 1/5, de Chistophe Bec et Stéphane Betbeder. Empreinte(s) Dupuis.

Christophe Bec est décidément sur tous les fronts. "Bunker" arrive dans les bacs alors même que les Humanoïdes associés publient son "Temps des loups" (textes et dessins) et la conclusion du triptyque "Carême" (au scénario uniquement). Son nouveau projet chez Dupuis reprend, dixit le dossier de presse, des thématiques qui lui son chères : l'enfermement, l'univers militaire, l'individu confronté à des choses qui le dépassent.. La définition semble effectivement convenir à ce premier jet de "Bunker", nouvelle collaboration avec Stéphane Betbeder après le très surprenant "Hôtel particulier" (Soleil) et sa version revue et corrigée "Anna" (La boîte à bulles). L'ambiance dégagée par ce thriller fantastique n'est certes pas sans rappeler le travail de Bec sur "Sanctuaire" (avec Dorison), mais aussi les univers dérivés de l'oeuvre de Lovecraft (cité en préambule) et le pitch de certains films fantastiques des années 80, au premier rang desquels la "Forteresse noire" de Michael Mann. Le résultat ? Le graphisme de Christophe Bec tient à bout de bras une fiction relativement difficile d'accès. Le dessinateur excelle dans la mise en place de paysages angoissants, dans le design d'univers mêlant éléments fantastiques et réalité terre à terre, dans sa restitution des ambiances militaires. Il est soutenu en cela par le travail de Marie-Paule Alluard sur la couleur, qui contribue largement à la cohérence graphique de l'ensemble. Mais entrer de plain-pied dans "Bunker" signifie avoir digéré en premier lieu le glossaire et le trombinoscope opportunément glissés dans les pages de garde. Une précaution qui ne semble pas indispensable au premier abord, mais qui s'avère fort utile dans le déroulement des faits, les auteurs allant au plus court dans la présentation des personnages. Il faut accepter en outre le principe d'un récit fleuve d'ores et déjà tronçonné en cinq parties, pour lequel Bec et Bedbeger ne livrent pour l'heure qu'un minimum de clefs. Nous sommes loin de l'implacable savoir-faire de Xavier Dorison en la matière. Mais la première pierre est posée. Nul doute que l'édifice vu dans sa globalité vaudra le détour, mais il faut encore attendre.
El Santero (W.E.S.T.) par Philippe Belhache
"El Santero", WEST 3, par Nury, Dorison et Rossi. Dargaud.

Fabien Nury et Xavier Dorison se seraient-ils définitivement trouvés ? Les deux hommes forment incontestablement un des duos les plus performants et les plus expérimentés du moment en matière de thrillers musclés, avec ce qu'il faut d'inventivité et de culot. L'auteur de "Je suis Légion" et celui de "Sanctuaire" - deux séries aux Humanoïdes Associés - ont uni leurs savoirs-faire sur les "Brigades du Tigre" tant à l'écran que sur papier (Glénat), mais aussi sur WEST, série ultra "pêchue" suffisamment porteuse pour que l'éditeur Dargaud accompagne d'une importante campagne marketing la sortie du dernier volume. Les deux premiers albums ont incontestablement rencontré leur public, qu'en est-il du troisième ? Il est de la même veine, peut-être même meilleur car plus retenu, plus sombre, plus incisif encore dans les relations parfois extrêmes des membres de cette Weird Enforcement Special Team entre eux, avec toujours en première ligne l'énigmatique Morton Chapel, personnage antipathique, sombre et expéditif. Comme dans le précédent diptyque, Nury et Dorison manient l'histoire dans l'Histoire, expédiant leurs personnages dans le Cuba de 1902 occupé par l'armée américaine - un choix aux consonances très contemporaines - le vaudou assurant le cahier des charges sur le plan du surnaturel. De la très belle ouvrage, narration au carré et "cliffhanger" haut de gamme, servie par le graphisme classique mais somptueux du vétéran Christian Rossi. Une réussite dans le genre.
"Le jardin armé" et autres histoires, par David B. Futuropolis.

David B. a quitté l'Association pour le Futuropolis new look, non sans emporter sous son bras quelques-unes de ses bonnes feuilles. Notamment "Le prophète voilé" et "Le jardin armé", initialement publiés dans la revue Lapin, et réunis ici avec un troisième récit inédit, "Le tambour amoureux". Un bien ? Un mal ? Les amateurs de polémique en débattront, les lecteurs se réjouiront simplement du très bel objet qui leur est présenté. David B. explore ici l'imaginaire des récits orientaux et des thèmes bibliques médiévaux, s'inspirant de l'imagerie profane et sacrée pour mieux faire passer son propos, avec pour thèmes récurrents la guerre, la mort, la vie après la mort.. Il reste dans la veine de l'excellent Lénora (avec Pauline Martin, Denoël Graphics), adoptant ici un mode de narration plus resserré, plus direct, tout en conservant une haute valeur symbolique. Il convoque le rêve et l'imaginaire pour compenser l'aspect cérébral de sa démonstration, limitant le nombre d'informations par planche, jouant sur le format et la pagination pour poser sa narration. David B. adapte son traitement graphique au conte philosophique, s'inspirant de l'iconographie romane - peinture, mais aussi sculpture - flirtant avec les expériences symbolistes d'un Jan Toorop. Ce nouveau tome est une réussite, même s'il souffre d'un léger déséquilibre, lié à la juxtaposition d'un conte oriental indépendant et de deux autres textes intimement liés, tant par le personnage principal (Zizka) que par leur environnement culturel. Mais c'est finalement peu de choses.
"Battle Hymn, l'escadron des étoiles", de Clay Moore et Jérémy Haun. Bamboo Comics.

Cruelle impression de déjà vu. Non seulement parce que les relectures à l'acide du mythe du super héros sont monnaie courante depuis l'inégalé "Watchmen" d'Alan Moore et Dave Gibbons (Delcourt). Mais aussi parce que les caractéristiques de ces personnages recrutés en pleine Seconde Guerre mondiale évoquent sans coup férir leurs aînés du mythe Marvel : un pseudo Captain América aux identités interchangeables, un Submariner un peu autiste, un Whizzer obsédé, un homme artificiel qui pourrait rappeler aux étourdis que le Human Torch des origines était un androïde.. L'imagerie des principaux membres du All-Winner Squad est bien là, renvoyée par le biais d'un miroir déformant. Clay Moore se défend d'avoir voulu simplement parodier les héros du Golden Age. Pour autant, la mini-série concoctée par ses soins avec son complice Jérémy Haun - ils signent ensemble "Leading man" chez Oni Press - pilonne avec soin le mythe, privilégiant les dissensions dans un groupe composé de personnalités névropathes, au détriment de combats par ailleurs quasi inexistants. Clay Moore nous parle de désinformation, d'apparences trompeuses, de manipulation au nom de l'intérêt supérieur de la nation.. Un propos ambigu et cynique, des personnages qui ne le sont pas moins - à l'exception notable de l'Anglais Mid-Nite - pour un récit qui laisse finalement sur sa faim. Sans doute trop court, trop abrupt, avec une ouverture minimale sur les enjeux réels de la constitution de ce fameux Escadron, pour emporter réellement l'adhésion. Intéressant mais frustrant.
Infiltrations (Sillage) par Philippe Belhache
"Infiltrations", Sillage 9, de Philippe Buchet et Jean-David Morvan. Delcourt, collection Néopolis.

"Sillage" serait-elle la meilleure série de Jean-David Morvan ? Le prolifique scénariste réussit en tout cas un double exploit : créer une attente et confirmer la surprise. Cette neuvième livraison est certainement la meilleure depuis "Engrenages", album d'autant plus réussi qu'il exploite les traits de personnalité les plus irritants de Nävis – son impulsivité incontrôlable et son idéalisme forcené, un brin béni-oui-oui – pour mieux les confronter à une réalité qui n'a rien de simpliste. Oubliés les jeux de mots faciles du tome 5, les bons sentiments sans contrepartie, les émois d'une jeune fille à peine débarquée de sa planète jungle. Dans "Nature Humaine", Morvan brisait les rêves de son héroïne. Il prend aujourd'hui le parti de lui enlever ses dernières illusions, brouillant ses repères, la plaçant brutalement face aux conséquences de ses rebellions. Et quelles conséquences !

Morvan donne à cette nouvelle aventure les formes d'un thriller ultra rythmé, confrontant Nävis à une redoutable terroriste alter-universaliste. Il double sa trame d'un propos politique, dénonçant la violence aveugle comme l'ignominie de certains secrets d'Etat. Ce scénariste chevronné fait un usage intelligent de l'altérité des personnages, intégrant leurs caractéristiques à l'intrigue, évitant ainsi l'écueil de la science-fiction alibi. Et donne ainsi les pleins pouvoirs à son complice Philippe Buchet, qui fait une nouvelle fois preuve de sa maîtrise graphique. Buchet se joue des cadrages, chorégraphie des combats ébouriffants, met en scène son héroïne favorite dans un univers d'une belle cohérence visuelle en nous faisant oublier - pour une fois - ce qui reste le défaut endémique de la série, à savoir le vignettage excessif des planches. Un "Sillage" de très haut niveau, qu'il sera sans doute difficile de labelliser 9-12 ans, comme cela a été fait l'an dernier à Angoulême pour le tome 8.
"La Marie en plastique", tome 1, de Prudhomme et Rabaté. Futuropolis.

"J'avais envie de voir comment peuvent évoluer les relations entre les membres d'une même famille, réunis sous le même toit.." David Prudhomme confiait déjà vouloir explorer ce thème ancestral au sein du collectif "Japon" coordonné par Frédéric Boilet (Casterman). Faute d'avoir trouvé la bonne famille dans le laps de temps qui lui était imparti, il s'est laissé aller par défaut à une errance onirique. Le scénario de Pascal Rabaté, son complice sur "Petit Paul" (Charrette) ne pouvait dès lors que le séduire. Le thème de "La Marie en plastique" ? La vie de famille, justement, dont le bon déroulement tient à des équilibres parfois délicats, édifice fragile livrés aux coups de boutoir de l'égoïsme et des paroles irréfléchies.

Rabaté, orfèvre des petits riens, met en scène une de ces familles types, modelées sur le modèle ouvrier, mettant en présence trois générations qui n'ont plus suffisamment en commun pour réellement s'entendre. Les discussions orageuses entre le grand-père "Rouge" et son épouse confite dans le Seigneur atteignent leur point d'orgue. Cette dernière choisit de se révolter - à son échelle - en disposant sur la télévision familiale un souvenir de son pèlerinage à Lourdes, la fameuse Marie en plastique. Le ton monte au fil des petits et gros mots, grandes colères et petites lâchetés quotidiennes que Rabaté sait saisir comme personne. Les dialogues ciselés, frappés au coin du quotidien, esquissent les contours d'une réalité connue de chacun de nous, nichée quelque part dans un repli de la famille. Ce quotidien, David Prudhomme se l'approprie pleinement, adaptant son trait épuré à cette fiction contemporaine sensible. Il croque des trognes d'hommes de la rue, icônes de zinc et voisins fantasmés, avec un naturel et une économie de moyens que beaucoup peuvent lui envier. "La Marie" le confirme, si besoin était, parmi les dessinateurs les plus intéressants du moment.
"Le peuple des endormis", tome 1, de Tronchet et Richaud. Dupuis, collection Aire Libre.

Sacré Tronchet, jamais là où l'attend. Tant mieux ! Pour cette nouvelle incursion dans la collection "Aire Libre", il délaisse l'imaginaire de l'écrivain Anne Sibran pour faire sien un texte de Frédéric Richaud, romancier entré en BD via "Le maître de peinture" co-écrit avec Makyo pour les éditions Glénat. Après "Monsieur le jardinier", son premier récit édité chez Grasset, Richaud retrouve avec bonheur le XVIIe siècle en mettant en scène les aventures de Jean, jeune homme timide qui n'échappe à l'enfermement auquel le condamne sa mère que par son don pour le dessin. Un don qui lui rend temporairement les faveurs de son père, avant de le précipiter sur les pas d'un aristocrate aussi fantasque qu'inculte, porté sur le beau sexe et complètement obsédé par l'idée d'être admis à la cour. Le "Ridicule" de Patrice Leconte n'est jamais très loin.. Jean joue le Candide, le révélateur, l'élément stable mettant en valeur les élucubrations déjantées d'un Marquis de Dunan superficiel et prétentieux, presque autiste dans sa quête passionnée de gloire. Et pourtant, au détour d'une conversation, capable d'une certaine profondeur.. Tronchet prête sa patte inimitable à l'affaire, amenant un juste décalage dans la lecture de cette satire des vie et moeurs du siècle de Louis XIV, jouant des couleurs pour hisser Jean de l'obscurité des caves de l'officine de taxidermie de son père aux lumières du rêve africain. Et plaçant au centre de ses compositions l'éternel sourire de Dunan, que l'on se prend à vouloir effacer à grand renfort de gifles. Truculent et rafraîchissant.
"Hawaïan Style", Totale maîtrise 3, par Abolin et Pont. Vents d'Ouest.
"11° C dans l'eau", Crazy Trip 2, de Margaria et Amorin. Vents d'Ouest.

Vents d'Ouest aurait-elle des actions dans le petit monde du surf ? La maison d'édition porte coup sur coup deux projets, recueils d'humour sur ce même thème, "Total maîtrise" 3 de Pont et Abolin et "Crazy Trip" 2 de Margaria et Amorin. Copie conforme ? Loin de là. "Crazy Trip" est avant tout un recueil de gags formatés, exploitation du créneau qui ne démériterait pas, tant sur le fond que dans la forme graphique, du catalogue humour des éditions Bamboo. "Total maîtrise" évolue plusieurs coudées au dessus, mise en forme en gags d'une planche des aventures de quatre losers bien crétins, qui délaissent temporairement les cimes neigeuses pour les joies de la glisse polynésienne. Olivier Pont et Georges Abolin y cultivent l'humour vache et la vanne qui tue, bousculant leurs personnages, n'épargnant rien ni personne, tout en arrivant malgré tout à les faits progresser. La veillée qui voit chacun s'auto flageller dans un accès subit de sincérité est à ce titre assez grandiose.. Le graphisme d'Abolin est au niveau de ce bon moment de délire. Reste que tout cela ne va pas bien loin. Pas aussi loin, en tout cas, que l'autre aventure commune des deux complices, "Où le regard ne porte pas.." (Dargaud). Mais nous ne sommes déjà plus dans le même registre.
"Fullmetal Alchemist" 8, par Hiromu Arakawa. Kurokawa.

Enfin ! Il aura fallu pas moins de huit recueils et une lecture attentive pour visualiser quelques uns des liens sous-tendant la trame de ce manga à succès diffusé en France depuis seulement un an, à un rythme soutenu, précédé en avant-garde d'un anime de quelque cinquante épisodes, d'un film et de plusieurs jeux vidéos. Edward Elric, jeune alchimiste surdoué, et son frère Alphonse, poursuivent leur quête de la pierre philosophale, laquelle leur permettrait de récupérer ses membres perdus dans une transmutation hasardeuse pour l'un, l'intégralité de son corps pour l'autre. Leurs aventures les ont amenés à débusquer un certain nombre de personnages troubles, notamment des êtres aux pouvoirs insoupçonnés baptisés du nom des sept pêchés capitaux. Et à entrevoir certaines vérités.

Ce tome 8 permet au lecteur d'avoir un peu d'avance sur le héros lui-même. Après avoir exposé ses "chimères", être issues d'expériences alchimiques sur des humains, Hiromu Arakawa lève une partie du voile sur la nature des Homoncules, créatures entièrement créées par l'alchimie, et du complot qui se ourdit au plus haut niveau de l'armée. Fullmetal Alchemist aborde par le biais d'une thématique steampunk un ensemble de questions que le commun des mortels ferait bien de se poser concernant les manipulations génétiques. Hors la thématique de progression par la voie du combat et les classiques relations maître-disciples, le propos ne manque pas d'originalité et les différentes caractéristiques des personnages bien exploitées. L'humour y est régulièrement présent, aussi bien dans des situations de franche comédie que dans la personnalité extrême de certains personnages. Pour autant, la jeune mangaka se montre impitoyable avec ses personnages, lesquels peuvent subitement, et (très) brutalement, quitter la scène. Bref, un shonen plaisant, au graphisme solide sans être révolutionnaire. Le titre cavale d'ailleurs régulièrement aux basques du "Naruto" de Masashi Kishimoto (Kana) au top des meilleures ventes en France.
Escrime et châtiment (Tiffany) par Philippe Belhache
"Escrime et châtiment", Tiffany 1, par Herval et Yann. Delcourt.

La force principale de Yann ? Incontestablement l'humour, allié à une solide maîtrise des codes de narration classiques, même lorsque le propos tend à prendre des formes plus "sérieuses". Cet humour souvent ravageur manquait singulièrement à son récent "Narvalo" (Dargaud). Il affleure de nouveau, pour le meilleur, dans "Tiffany", nouvelle série policière qui marque l'entrée de l'ex-enfant terrible du journal de Spirou dans le catalogue grand public de Delcourt. Le pitch relève en lui-même de la performance : l'héroïne, maître d'arme de profession, est une descendante du frère de Jeanne d'Arc - laquelle, rappelons-le, était pucelle - qui faute d'entendre des voix, perçoit les pensées de son entourage... Sauf apparemment quand lorsqu'elle est amoureuse. Cette jolie jeune femme qui pratique la télépathie comme Benoît Brisefer le culturisme va se voir contrainte de reprendre les affaires de son frère détective privé et enquêter dans son ancien château de famille.

Le résultat est léger comme une bulle de champagne vénéneux. Sur un fond classique mais d'une grande maîtrise, Yann construit touche par touche le nouvel univers de Tiffany, qu'il entoure d'une série de personnages hauts en couleurs, de l'aristo nonagénaire au lieutenant Collaro, en passant par les assistants du frangin. Les dialogues participent pleinement au charme de la série, véritables joutes verbales à fleuret à peine moucheté. Yann manie saillies et calembours avec bonheur, sans lourdeurs excessives, tout en glissant au passage quelques unes de ses références, d'Audiard aux "polardeux" de tout poil, en passant par Maurice Tillieux et indirectement le modèle "Gil Jourdan".

Question charme, Herval passe la seconde couche. Ce graphiste rompu à la pub accompagne le texte de Yann d'une ligne aussi légère qu'assurée. Le bonhomme, connu pour avoir commis il y a quelques années de "Drôles de Pin Ups" chez Bamboo - haaa, le calendrier 2005 de l'éditeur ! -, gère avec succès son passage au récit réaliste. Herval a conservé de ses précédentes productions une palette de couleurs pastels qui contribue encore à alléger l'ensemble. Il contribue pleinement à faire de cet "Escrime et châtiment" un album de présentation élégant, référencé et racé.
"Spirou et Fantasio à Tokyo", Spirou et Fantasio T. 49, par Morvan et Munuera. Dupuis.

Que penser de cette nouvelle mouture ? Au delà de la querelle entre les Anciens et les Modernes, cet album possède une identité propre. S'il reprend certains éléments qui ont fait le succès de la série - on y retrouve le Fantasio technophile compulsif de "QRN sur Bretzelburg" - l'action prime dans un album mené à deux cents à l'heure, soutenu par le graphisme ébouriffant du graphiste espagnol José Luis Munuera, effets de vitesse et cadrages grand angle garantis. L'humour est un peu plus présent que dans les précédents tomes et le propos est équilibré. Mais Jean-David Morvan cède à ses vieux démons, surchargeant le contenu des planches malgré un format élargi à soixante-quatre pages. Et ne fait finalement qu'effleurer la personnalité de ses personnages. Itoh Kata lui-même, facétieux magicien mycologue (ou le contraire) créé il y a quelque trente ans par Jean-Claude Fournier, devient une figure monolithique, sorte de sensei japonais respecté mais sans réelle fantaisie.

Le personnage principal de ce nouveau "Spirou et Fantasio" reste finalement Tokyo, cité décrite avec une volonté documentaire, bien éloignée des capitales fantasmées déjà traversées par les deux héros. Une volonté qui justifie l'édition en parallèle d'un numéro 49Z - intéressant mais pas incontournable - en collaboration avec le journaliste Boris Demaria et le mangaka Hiroyuki Ooshima. Ce nouvel album est à cheval entre deux mondes, l'univers Spirou classique et l'imaginaire débridé de Jean-David Morvan. Il peut repousser ou séduire selon que l'on adhère à l'un ou à l'autre. Le numéro 50 de la série, dont la parution devrait coïncider avec les 70 ans de Spirou, devrait trouver un nouvel équilibre, co-écrit avec un ancien de la maison, le scénariste Yann. Il devrait également marquer le retour du savant fou le plus gaffeur de l'histoire de la bande dessinée (roulement de tambour), le grand Zorglub. De quoi susciter de nouvelles attentes.
Pourquoi j'ai tué Pierre par Philippe Belhache
"Pourquoi j'ai tué Pierre", par Alfred et Olivier Ka. Delcourt, collection Mirages.

Comment peut-on en arriver là ? Olivier Ka essaye de comprendre. Et pour sortir Pierre de sa vie, il écrit. "Pourquoi j'ai tué Pierre" est un récit "100 % autobiographique", écrit avec ses tripes par un auteur en pleine possession de ses moyens, qui a décidé de liquider ses comptes avec le passé. A l'âge de 12 ans, le jeune Olivier a été victime d'attouchements de la part d'un prêtre ouvrier avec qui il allait en colonie de vacances. "Je n'ai pas été violé, précise-t-il. Je n'ai pas fait non plus l'objet de violences..." Pourtant, l'homme qu'il est devenu réalise aujourd'hui à quel point l'incident l'a marqué, jusqu'à façonner pour partie sa personnalité.

Olivier Ka, auteur d'ouvrages pour enfants, a choisi d'écrire cette histoire, son histoire. En la mettant en perspective de sa propre existence de fils d'artistes, de ses questionnements d'enfant élevé dans un milieu libertaire et plutôt permissif, de sa relation avec celui qu'il appelait son ami. Avec un homme qu'il n'est pas arrivé à haïr après les faits, allant jusqu'à respecter longtemps sa promesse de ne rien révéler. L'adulte qu'il est devenu est allé jusqu'au bout. Jusqu'au mot "fin". Et même au-delà. Le voyage effectué sur les lieux de la colonie de vacances avec Alfred a eu de fait des conséquences inattendues...

"Pourquoi j'ai tué Pierre" est remarquable à plusieurs points de vue. Par le ton adopté, mais également par ce parti pris d'autobiographie à quatre mains. Olivier Ka confesse volontiers que sans Alfred, il n'y aurait pas eu d'album. Et Alfred d'accompagner la démarche jusqu'au bout, parce que "c'est mon pote, et que nous avons énormément de choses en commun." Le dessinateur aujourd'hui bordelais offre toute la poésie de son graphisme volontiers surréaliste au texte de Ka, épousant le regard de celui qui n'était encore qu'un enfant, explorant sa relation à Pierre, pour mieux l'accompagner ensuite dans sa vie adulte. Les deux hommes avaient déjà éprouvé leur complicité sur "Monsieur Rouge" (Petit à Petit). Ils ont réussi à rendre unique leur point de vue. "Pourquoi j'ai tué Pierre" est un album sur la libération de la parole, servi par un graphisme lui-même conçu comme un langage, les couleurs comme une grammaire. Un album sensible, sans conteste l'un des plus touchants de cette rentrée 2006.
Paris strass par Philippe Belhache
"Paris Strass", de Yoann et Omond. Fluide Glacial, collection Glamour.

Fallait-il vraiment inventer la collection "Glamour" pour lancer "Paris Strass" ? Le doute pourrait être permis, l'humour féroce de Yoann et Omond pouvant trouver sa place sans trop de problèmes dans le catalogue générique des éditions Fluide Glacial. Omond y explore sans trop de retenue les caniveaux des grands de ce monde, explore leurs préoccupations souvent réduites au sexe et à l'argent, ainsi que leurs relations ambiguës à la presse à scandale. Le trait est lourd, les ficelles parfois grosses et l'humour acerbe. Mais le propos fait mouche. Et reste cette impression persistante d'être encore en deçà de la vérité.

La surprise vient également du traitement. Nous sommes dans un univers de bande dessinée plus que dans la caricature, ce à quoi ne nous a pas forcément habitué Fluide. Le découpage est classique, et Yoann avance sans masque. Le dessinateur de "Paris Strass" est le même que celui de "La voleuse du Père Fauteuil" (déjà avec Eric Omond), et surtout du premier one shot de la série parallèle de Spirou et Fantasio, "Les géants pétrifiés", sans rupture de style. Cela peut surprendre, mais cela donne une saveur particulière à l'ensemble. A déguster donc, sans modération, même si pour l'appellation "Glamour", il sera plus intéressant de se pencher sur le cas des "Péchés mignons" d'Arthur de Pins.
Nigel (Wisher) par Philippe Belhache
"Nigel", Wisher 1, de Giulio de Vita et Sébastien Latour. Le Lombard, collection Portail.

Revendiquer une influence est une chose. La voir brandie à bout de bras par un scénariste en est déjà une autre. Sébastien Latour – dont c'est là le premier titre en attendant "Ellis", dans la même collection – voue un culte sans détour ni concession à Neil Gaiman, golden boy de la littérature fantastique qui est à "l'urban fantasy" ce que William Gibson est au "cyberpunk" : un initiateur et un maître. L'urban fantasy ? Un univers décalé qui voit entrer dans le quotidien du XXIe siècle les créatures des contes et légendes des temps passés. "Wisher" est de ce bois, poussant l'hommage au "Neverwhere" de Gaiman jusqu'à installer son intrigue à Londres et organiser le refuge des créatures d'un autre monde dans les souterrains attenant au métro. Pour autant, pas question de donner dans l'hommage béat. Sébastien Latour réalise là un premier scénario musclé, sans temps mort, centré sur un personnage central – le fameux Nigel – que l'on soupçonne d'être le dernier djinn sur terre. Latour donne suffisamment de clefs dans ce premier jet pour ferrer efficacement le lecteur. L'affaire est superbement servie par le graphisme abouti de Giulio de Vita, dessinateur italien qui s'est rodé aux fumetti avant de prendre pied en France par la case "Décalogue", et d'attaquer "James Healer" au Lombard avec Yves Swolfs. "Wisher" joue sur le décalage graphique entre le design XXIe siècle des personnages principaux, et celui - faussement désuet - des agents du MI 10. Sans même parler des créatures de fantasy. Bref, une très bonne entrée en matière pour la collection "Portail", avec pour principal bémol un traitement trop sombre des couleurs, qui nuit au confort de lecture.

Le long voyage de Léna par Philippe Belhache
"Le long voyage de Léna", d'André Juillard et Pierre Christin. Dargaud, collection Long Courrier.

S'il l'on devait retenir des lignes directrices dans la bibliographie foisonnante de Pierre Christin, une colonne vertébrale à son oeuvre, deux mots reviendraient en permanence : voyage et géopolitique. L'homme est un voyageur infatigable, observateur attentif du monde, à l'affût des transformations induites par les grands mouvements qui ont secoué Orient et Occident ces dernières années. "Le long voyage de Léna", première collaboration avec André Juillard, ne déroge pas. L'argument ? Le parcours de Léna, voyage programmé par de mystérieux commanditaires, des pays de l'ex-bloc soviétique jusque dans les contrées ô combien sensibles du Moyen-Orient. Avec pour toile de fonds le terrorisme et la persistance de l'idéal communiste, au-delà de la disparition d'un système..

Pas question pour l'auteur d'écrire un nouveau thriller à la Fleming. Léna est une coursière, qui va de contact en contact au fil d'une mission dont elle ignore les tenants et les aboutissants. Elle est aussi une page blanche sur laquelle Christin écrit l'histoire d'un monde déchu. Il oppose cette femme au profil lisse, élégante et inaccessible, et ses contacts plus ou moins hauts en couleurs, tout en mettant en parallèle leurs motivations, lesquelles se rattachent aux éléments épars d'un passé vivace et pourtant révolu. Jusqu'à la conclusion finale.. Pierre Christin compose là une intrigue simple mais solide, faussement linéaire, bâtie à la manière d'un puzzle. Il impose au récit le rythme indolent des voyage à l'ancienne, interdisant à son personnage tout contact avec les moyens modernes de déplacement ou de communication. Trains, bus, cargos.. permettent à ce grand bourlingueur de capter l'humeur du lieu pour mieux la restituer.

André Juillard retranscrit ces ambiances avec ce trait élégant qui est aujourd'hui sa signature. Graphiquement, Léna se pose comme une grande soeur un rien mutique de la Louise de son "Cahier bleu", élégante, racée, intemporelle dans sa mise jusque dans les dernières pages où elle retrouve enfin sa personnalité. Il réussit l'exploit d'accompagner le propos de Christin, ses errances, sans décrocher le lecteur malgré l'importance des commentaires en voix off et l'omniprésence du personnage de Léna. Il y avait beaucoup à attendre de cette rencontre entre deux grands noms de la bande dessinée. Le rendez-vous est tenu. Pour le meilleur.
"Le déluge", Le retour à la terre 4, par Jean-Yves Ferri et Manu Larcenet. Dargaud, collection Poisson Pilote.

Serait-ce un effet de lassitude du lecteur ? La prise en main de ce nouvel opus du "Retour à la Terre" n'offre pas tout à fait le même plaisir que les précédents. Une déception ? Loin de là tout de même. Sans doute la formidable réussite des trois premiers opus avait-elle créé trop d'attente. Les gags d'ouverture, consacrés aux premiers émois de parents de Manu et Mariette semblent un peu plus convenus que de coutume, finalement assez classiques et mal inscrits dans le concept initial de la série. D'où un moment de flottement, malgré quelques bonnes idées, avant la remise dans les rails de la narration. Un nouveau plongeon dans l'univers décalé du duo Ferri-Larcenet, avec des moments de pur bonheur burlesque (belle trouvaille que les Atlantes), un travail exemplaire sur le comique de répétition et la mise en avant de ce personnage clef qu'est devenue "la" Mortemont. Même si pour le coup cette dernière passe du statut d'icône de ce magnifique délire rural à celui de petite vieille caricaturale. Certes, nous sommes loin du chef-d'oeuvre attendu. "Le déluge" se lit malgré tout comme on vit de plaisantes retrouvailles avec de vieux amis.
"Lucha Libre 1", de Bill, Tanquerelle, Fabien M., Gobi, Witko et Frissen. Humanoïdes associés.

"Lucha Libre" frappe fort, très fort. Trouver plus tocard que les Mystery Men, en soi, c'est déjà dur. En sortir de pleines brouettes avec promesse d'aller encore plus loin, cela tient de l'exploit. Le pari est relevé par une bande de copains qui a uni ses talents pour réaliser cette série improbable en forme de revue non moins improbable.. "Lucha Libre" fait référence à la lutte mexicaine, pratiquée par des hommes masqués considérés chez eux comme des demi-dieux. Dans le cas qui nous occupe, il s'agirait plutôt de demi-sels et de bras cassés, quand ils ne sont pas bons à classer dans la catégorie névropathe. Mais bon.. Thierry "Jerry" Frissen, qui avait déjà commis "Ces zombies qui ont mangé le monde", excelle dans ce délire très maîtrisé prenant pour théâtre un East L.A. de losers. Il y jette pêle-mêle ses lutteurs de bazar, un chef de gang se prenant pour Elvis, un Godzilla de pacotille, des frères Bogdanov transformés en siamois du phylactère, des loups-garous revanchards et un clébard diarrhéique.. Le tout dans un hommage bien secoué aux comics intégrant tout ce qui leur a plu du manga ou du franco-belge. Dans le sillage de Frissen, figurent des signatures comme Bill et Gobi (ZbluCops chez Glénat), Fabien M ou Witko. Et aussi Tanquerelle, qui avait déjà donné dans la formule catch avec son "Tête Noire" chez Milan. Sans même compter les "guest stars" auteurs de fausses couvertures, dont Ohm, Michel Pirus et Stéphane Oiry forment la première ligne. Un premier jet foisonnant et bien barré. Ca défoule.
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