| "Mais Lidwine ne quittera pas la Quête pour autant..."
Co scénariste, metteur en scène, coloriste de l'Ami Javin, vous n'avez pas chômé dites donc ?
La BD n'est pas un métier de fainéant ! Concernant le scénario, Serge m'a invité depuis le début de La Quête à y
participer. Il amenait l'idée générale et nous la triturions. On en discutait, on argumentait. On peaufinait. Un vrai
bonheur.
Cette fois, comme Le Tendre le raconte, ce fut une partie de piano à quatre mains.
A deux autour d'une table, c'est fantastique. Quand on s'entend comme nous nous entendons, tout va très vite.
Une idée en amène une autre. Si l'une trouvée par l'un est jugée médiocre par l'autre, on cherche autre chose.
Notre règle : ne pas vouloir faire du génial, mais au moins du bien huilé, du sympathique, pour que les lecteurs
prennent vraiment leur plaisir.
Beaucoup vont regretter de ne pas retrouver Pelisse et ses fabuleux 115-60-90.
Elle reviendra. Et puis n'oubliez pas que Mara est là, et qu'elle a créé Pelisse à son image. C'est
donc une Pelisse bis qui est l'héroïne de L'Ami Javin.
Mais on découvre d'abord une fille de ferme, Fumette, qui n'a rien d'une beauté.
Ah bon ? Moi, je la trouve très excitante.
Qu'est-ce qui vous touche le plus dans ce nouvel album ?
Emotionnellement, la mort de Javin. Et le fait de découvrir Listelle toute jeunette. Mais le plus fort,
le plus insidieux, c'est la progression de la secte mystérieuse qui peu à peu, alors que personne n'y
croit, va s'implanter partout. Comme l'a fait le nazisme.
Ne pas retrouver Loisel au dessin va sembler à certains une désertion, non ?
Je ne peux pas tout faire. Peter Pan et La Quête, c'est trop. J'avais prévenu Le Tendre et ensemble,
nous avons cherché un remplaçant. Le premier à s'y essayer fut Cromwell, l'auteur de Bal de la
Sueur et d'Anita Bomba. Il réalisa plusieurs planches, mais dans un style peut-être un peu trop
humoristique à notre goût, un peu trop proche d'Astérix. Puis Lidwine vint. C'était presque un
voisin. Il planchait à l'époque sur son Dernier Loup d'Oz, dans un style très réaliste. Moi, je voulais
un style semi-réaliste. Il s'y est fait tout de suite.
Comment avez-vous travaillé ?
J'avais commencé un story-board pour Cromwell. J'ai demandé à Lidwine s'il voulait que je continue. Il a dit oui.
On dirait la bonne vieille méthode stakhanoviste des studios de comics américains. Scénaristes,
dessinateurs, encreurs,...
Alors là, pas du tout. Lidwine n'a pas fait un simple travail d'encreur, mais bien de dessinateur, de créateur, au
même titre que Le Tendre ou moi. Je n'ai pas touché un porte-plume dans cette histoire. Et Lidwine a réalisé huit
pages sans story-board de ma part.
Vous dites n'avoir pas eu le temps de dessiner l'album. Mais vous avez trouvé celui de faire les
couleurs. C'est cohérent tout ça ?
Je tenais à ce qu'il n'y ait rien à redire à cet album. J'ai une gamme de couleurs qui m'est
propre, qu'on retrouve dans les tomes 3 et 4 de La Quête, ainsi que les quatre albums de
Peter Pan. Et ça, je ne veux pas le déléguer. Alors, que pouvais-je faire ? Former un
coloriste qui aurait récupéré ma palette de couleurs, et s'en serait servi ailleurs ? Pas
question. Alors je m'y suis collé.
Lidwine, qui avait son Loup d'Oz à boucler, a mis cinq ans pour terminer L'Ami
Javin. Quid de la suite ?
Ca va s'arranger. Je n'ai plus qu'un Peter Pan à dessiner, 90 pages. Le scénario est fini.
Ensuite, je reprendrai La Quête, tandis que Lidwine se consacrera presque entièrement à
la suite du Loup d'Oz.. Presque. Parce que, pour qu'il y ait une certaine continuité dans le
graphisme de notre série, je dessinerai les personnages et lui, assurera les décors,
jusqu'au plus petit détail, à la plus petite mouche. Et Dieu sait qu'il sait faire ça, chercher
la petite bête...
Vous produisez un album tous les deux ans. Pourquoi ce rythme de sénateur ?
Je fais très peu de BD, car à chaque fois, je dois réapprendre à dessiner.
Je ne sais plus comment j'ai fait auparavant.
Je ne sais plus ce qu'il faut faire.
Je sais seulement ce qu'il ne faut plus faire...
Loisel
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