Les petits potins de la bande dessin�e



On vient de l'apprendre

Blueberry sous acide...

Décidément, on ne voit plus que lui. Vincent Cassel est Blueberry ! Vincent Cassel fait la Une de tous les magazines et des sites de cinéma actuellement en France et Belgique. Annoncé de longue date et également très présent sur le Web (une version-leurre de Blueberry a même été lancée depuis le 15 décembre sur les réseaux P2P (échange de fichiers informatiques) par Jan Kounen et Vincent Cassel eux-mêmes afin de donner envie aux "pirates" d'aller voir le vrai film dans les salles) - visitez également le site officiel-, on n'attend donc plus que lui... et non pas sans une certaine inquiétude.. En effet, là où certains films inspirés de séries BD tentent de refléter le plus possible l'univers et l'esprit de celles-ci, il semblerait que Jan Kounen ait décidé de laisser libre cours à son inspiration et se serait "approprié" Blueberry, avec l'envie de "déséquilibrer le genre".. De quoi faire frémir..

Comme l'explique Jean Giraud dans une interview donnée au magazine "Cine Live" de ce mois-ci, "tourner un western conventionnel à l'heure actuelle n'aurait eu aucun sens pour les Européens... quitte encore pour les Américains qui cultivent la nostalgie du genre, mais pour l'équipe du tournage, un western classique ne "suffisait pas"... d'où l'importance apportée au chamanisme dans le film.. Cela donnerait donc un Blueberry aux prises avec des "visions" chamaniques, se débattant dans un univers "surnaturel" supporté partiellement par des images de synthèse et des effets spéciaux... voilà de quoi déstabiliser plus d'un fan du héros de papier...!

Et Jan Kounen de rajouter "Blueberry reflète de près ma propre expérience des visions chamaniques, ma rencontre avec des chamans indiens.. c'est une expérience de laquelle je garde l'impression d'avoir abandonné une partie de moi-même en retrouvant l'enfant que j'étais".

Au départ, il y a bientôt 30 ans, Jean-Michel Charlier avait créé le personnage de Blueberry comme un héros pur et dur, caracolant dans ses montagnes, bien souvent solitaire. Peu avant son décès, Charlier avait commencé à introduire une dimension plus humaine au personnage, brisant ainsi sa carapace. C'est un héritage que Giraud a tenté de reprendre et de développer, allant parfois même jusqu'à "casser" littéralement l'image habituelle que le lecteur avait du personnage, en lui faisant "subir" davantage les événements que les vivre en se "dé"battant.. C'est donc cette expérience que relayerait aujourd'hui Jan Kounen avec son film, en accord avec Jean Giraud.

Blueberry en héros fragile, s'interrogeant sur l'existence, aux prises avec ses démons intérieurs, se livrant à des expériences chamaniques... Vous voilà prévenus.. Alors, si vous décidez d'aller voir le film, oubliez la BD originelle, oubliez son esprit du Far West poussiéreux, acceptez d'être bousculé, d'être déconcerté et laissez-vous envahir par ce "délire mystico-psychédélique" d'un Kounen plus déroutant que jamais.
Expérience risquée pour ce dernier, voire "casse-gueule" diront certains.. c'est un fait, du moins au point de vue cinématographique.

Quant aux amateurs de la BD, ils auront de quoi être quelque peu surpris des propos de Vincent Cassel relatés par un autre magazine (belge), Zone 02, interrogé sur la fidélité du personnage par rapport à la BD : "Je n'ai jamais été fan de Blueberry, ce n'est pas ma culture.(...).. mon souci principal n'a pas été de respecter à la lettre la vision des auteurs.(...).. Je voulais surtout être crédible en tant que cow-boy européen. Maintenant, les fans, je m'en fous, ils peuvent se gratter. On a pris des raccourcis et on a modernisé le concept, tout comme les Américains ont "upgradé" Spiderman. Voilà, c'est ça, on a upgradé" Bluberry..". Ca a l'avantage d'être clair et précis. Cela en devient péniblement réducteur pour le personnage de BD. Finalement, était-on obligé de choisir Blueberry ? Lucky Luke ou Chinaman auraient tout aussi bien pu faire l'affaire !?

"Blueberry, l'expérience secrète" - Sortie en France et en Belgique : le 11 février - durée 2h02 - de Jan Kounen - avec Vincent Cassel, Juliette Lewis, Micheal Masden, Ernest Borgnine...

 
L'expo du Chat de Geluck débarque à Bruxelles

Pour ses 20 ans, le Chat de Philippe Geluck s'est vu offrir une splendide expo durant deux mois au Musée des Beaux-Arts de Paris... Non content de ses 100.000 visiteurs parisiens, le Chat débarque à présent à Bruxelles, sous la verrière de l'Autoworld, dès ce 6 février.

Incisif, caustique, sarcastique, pétillant.. le style de Geluck n'est plus à présenter... Homme de BD, homme de TV, homme de spectacle, artiste tout court, Geluck vous "invite dans sa vie" via cette expo où il présente à la fois son travail, mais également les différentes facettes de son caractère, de l'humour à l'émotion, de la caricature à l'élégance,... les visiteurs ressortent de là surpris et touchés...

Notez également la présence de Philippe Geluck à la Foire du Livre de Bruxelles le vendredi 13 février (Pyramides Rogier).

"Le Chat s'expose" - du 6 février au 16 mai - Autoworld - Esplanade du Cinquantenaire à 1000 Bruxelles de 10h00 à 19h00.

 
Une exposition exceptionnelle Alan Moore

Avec l'exposition "Munoz/Breccia : L'Argentine en noir et blanc", le Palais des Beaux Arts de Charleroi et l'A.S.B.L. Charleroi Images avaient entamé une politique d'expositions ambitieuses liées à la bande dessinée.

A partir du 14 février 2004, l'exposition "Alan Moore, les dessins du magicien" rendra hommage au scénariste qui a révolutionné la bande dessinée anglo-saxonne et dont le travail sert toujours d'exemple stimulant aux meilleurs créateurs de la bande dessinée mondiale.

Ambitieuse, cette exposition présentera plus de 200 originaux issus des archives des dessinateurs ayant travaillé avec Moore et de collections privées européennes et américaines. Les styles graphiques seront donc aussi variés que les univers créés par Alan Moore pour chacun de ses dessinateurs.

Le commissaire d'exposition est l'Anglais Paul Gravett, "le" spécialiste de la bande dessinée anglo-saxonne. Monsieur Gravett s'exprime en français sans la moindre hésitation.

La scénographie est assurée par Winston Spriet (dont la dernière réussite est l'exposition "Le Chat"/Philippe Geluck à Paris).

Exposition "Alan Moore, les dessins du magicien" - Du 14 février au 4 avril 2004 - Du mardi au dimanche de 10h à 18h, fermé les lundis et jours fériés. - Palais des Beaux-Arts de Charleroi - Place du Manège - B-6000 Charleroi - Belgique

 
Rencontre entre journalistes et éditeurs : une première !

C’était une première. Ce mardi 13 janvier, une quarantaine de membres de l’Association des journalistes et Critiques de Bande Dessinée, l’ACBD, avait rendez-vous avec les éditeurs du Syndicat National de l’Edition, section BD. L’occasion de dresser ensemble un bilan de l’année écoulée, mais aussi de s’interroger les uns les autres. Les éditeurs présents –Glénat/Vents d’Ouest, Dargaud/Lombard/Kana, Soleil, Delcourt, Casterman/Fluide Glacial- voulaient convaincre les journalistes spécialisés de la nécessité impérieuse de parler de leur production. Les journalistes, eux, voulaient attirer l’attention des éditeurs sur les difficultés de leur métier mais aussi leur poser des questions sur la santé du secteur. Au coeur du débat, la question du manga, qui est indéniablement LE phénomène de l’année 2003. Plus que tout autre secteur, le manga développe une croissance à deux chiffres qui ne laisse plus aucun éditeur de marbre. 25 à 30% de la production de l’année écoulée, des coûts de production et des prix de vente attractifs, mais aussi et surtout, une formidable opportunité de "récupérer" un public perdu pour la BD. "Le manga nous permet de renouer avec un public très jeune qui ne se retrouve pas dans la BD franco-belge actuelle. En allant le chercher, en lui apprenant à lire dans la BD, nous espérons l'attirer plus tard vers nos catalogues plus traditionnels" disent en choeur les éditeurs réunis au sein du SNE.

Mourad Boudjellal, le patron des éditions Soleil, y croit dur comme fer. Pour lui, d’ici quelques années, les librairies dévolues aux seuls mangas fleuriront aux côtés des librairies spécialisées actuelles. Sans aller aussi loin, Guy Delcourt voit lui, dans l’offre actuelle, une opportunité pour une transformation du métier de libraire. "On nous dit qu'il y a trop de nouveautés pour qu'elles coexistent sur les étals des libraires. C'est sans doute vrai. Mais je pense que cela va forcer les libraires à faire des choix, à n'exposer et même à ne commander que ce qu'ils aiment vraiment et ce qu'ils veulent défendre. Ce n'est pas forcément mauvais pour le secteur".

Un secteur qui se divise de plus en plus en deux segments, si on le regarde dans la presse spécialisée. "D’une part, les journalistes parlent des grosses machines, des best sellers. De l’autre, ils privilégient ce qui est branché. Mais au milieu, il y a ce qui fait le coeur de notre métier et des ventes. Un coeur ignoré par la presse" se plaint Eric de Montlivault, chez Dargaud. Pourquoi ce grief ? Parce que ce que recherchent les éditeurs pour assurer la survie du marché, c’est une base de grands lecteurs plus large.

Actuellement, on considère que les quelque 200.000 lecteurs qui achètent entre 12 et 15 BD par an constituent à eux seuls 40% du marché. L’objectif du monde de l’édition est de parvenir à élargir ce cercle de convaincus, en lui faisant connaître d’autres produits, en visant aussi le lectorat féminin, "durement" conquis au cours des dix dernières années mais encore trop timide. Pour y arriver, les éditeurs affutent leurs armes. Campagnes de marketing et gros tirages ont un effet sur l’équilibre du marché : les hypers gagnent du terrain au détriment des libraires spécialisés. Désormais, on achète davantage de BD entre les poireaux et le pack de Coca. Encore faut-il savoir ce qu’on achète. Et pour cela, les avis des journalistes peuvent être un guide important. "Pour autant qu’ils ne se limitent pas, comme trop souvent, à ne parler que de ce qu’ils aiment" ose Guy Delcourt, qui appelle de ses voeux une critique plus tranchée. On s’en souviendra !

Thierry Bellefroid

 
Disparition de Jean-Florian Tello

Les Humanoïdes Associés ont la douleur et la tristesse d'annoncer la disparition de leur auteur et ami Jean-Florian Tello, décédé le 1er Janvier 2004 à l'âge de 25 ans.

Sa série Marshall avait débuté en 2002 chez Les Humanoides Associés, et le tome 2 venait de sortir en octobre dernier.
C'est l'un de ses talents les plus prometteurs que la bande dessinée vient de perdre. On gardera le souvenir d’un garçon attachant et d’une grande générosité de coeur, et celui d’un dessinateur toujours soucieux de se dépasser.
Nos pensées vont vers ses proches à qui nous adressons nos sincères condoléances.

Source : Communiqué de presse des Humanoïdes Associés – le 6 janvier 2004.

 
Décès de Eddy Ryssack

Nous avons appris ce jeudi 8 janvier le décès du dessinateur flamand Eddy Ryssack (Borgerhout, 20 mars 1928), auteur notamment de Patrick Loupidon et de Colin Colas, qui fut aussi co-fondateur et co-directeur du Centre Belge de la Bande Dessinée, pour qui il a créé et animé jusqu'à ces derniers jours le petit personnage-mascotte du CBBD, le Chevalier de la Bulle.
Il est décédé d'un arrêt cardiaque à l'hôpital de Renaix où il avait été hospitalisé lundi 5 janvier.

Le Centre Belge de la Bande dessinée éprouve une peine profonde. Avec la disparition de Ryssack, c'est non seulement un grand nom de la bande dessinée flamande, un maillon essentiel de l'histoire des éditions Dupuis et de son aventure audiovisuelle, un pionnier du Centre Belge de la BD, mais c'est surtout un homme aussi chaleureux que charmant, modeste et attentif, doté d'un humour particulièrement apprécié et appréciable.

Eddy Ryssack ou l'humour en mouvement. Si les distingués spécialistes vénèrent en lui le dessinateur de Patrick Lourpidon, les simples amateurs avouent volontiers avoir passé de très bons moments avec Colin Colas qui demeure sans doute le personnage le plus populaire créé par Eddy Ryssack. Quant aux amis de la nature, ils se régalent encore des infinies subtilités graphiques de la série "Arthur et Léopold", cet irrésistible duo de puces dont, sans lui et son scénariste Raoul Cauvin, les tourments nous auraient été inconnus à jamais.

Mais résumer la carrière d'Eddy Ryssack à la création d'une douzaine de héros populaires serait très réducteur. Dès 1959, avec Maurice Rosy, il dirige le fameux studio de dessin animé TVA des éditions Dupuis. Chacun sait que sans lui quelques perles authentiques du dessin animé bien-de-chez-nous n'auraient jamais vu le jour dans les salles obscures !!!

Auteur de plusieurs milliers d'illustrations depuis ses débuts dans Humoradio en 1954, ce scénariste occasionnel (pour "Kramikske" de Jean-Pol, notamment) et adapteur recherché (les gags de Hagar Dunor le viking), est avant tout un formidable dessinateur doué comme peu de ses confrères pour exprimer le mouvement, doublé d'un redoutable humoriste (dans les pages belges de Pilote par exemple) d'autant plus redoutable qu'il ne s'est jamais pris au sérieux.

Reconnu par ses pairs - et poussé par ses bons sentiments - Eddy Ryssack est devenu le premier président de l'union professionnelle des auteurs de BD flamands (Stripgilde, 1980-85) avant de s'investir, avec Guy Dessicy, Jean Breydel et Michel Leloup, dans la création du Centre Belge de la BD dont il sera le directeur néerlandophone jusqu'en 1995 et l'administrateur jusqu'en 2002. Depuis, Eddy coulait des jours tranquilles au sommet du Kwaremont, au coeur des Ardennes flamandes. Et il continuait à dessiner.

Source : Communiqué de Presse du Centre de la Bande Dessinée Belge - 8 janvier 2004.

 
La BD en 2003, l’année de la consécration

Gilles Ratier, secrétaire général de l'ACBD (Association des Journalistes et Critiques de Bandes Dessinées) publie son rapport annuel : étude d'une année de bande dessinée sur le territoire francophone européen. 2003 a été l'année de la consécration : consécration en terme de production (2.526 livres appartenant au monde de la BD (dont 1730 nouveautés) ont été publiés en 2003, consécration par le nombre de maisons d'édition : elles sont désormais 185 (contre 180 l'an dernier), consécration par les plus gros tirages et les ventes, consécration de la BD étrangère, consécration pour les prépublications, consécration grâce à l'éventail des prix proposés, consécration des métiers de la BD, consécration grâce à l'intérêt diversifié porté à la BD, consécration grâce aux nombreuses adaptations...

* Consécration en terme de production : 2.526 livres appartenant au monde de la BD (dont 1.730 nouveautés) ont été publiés en 2003, alors que le climat économique général reste morose.

La BD s'en sort bien car sa production augmente pour la 8ème année consécutive, avec des ventes qui se stabilisent. Notons un constant rajeunissement du public, ce qui est un excellent signe pour l'avenir de ce secteur en phase avec notre civilisation de l'image.

Grâce à un programme assez riche en locomotives, la BD continue donc d'afficher, en cette année 2003, une bonne santé éditoriale : elle pèse 13 % dans le marché du livre (on estime qu'un livre vendu sur dix est une BD) et en reste le secteur éditorial le plus porteur, avec les ouvrages pour la jeunesse ou les livres pratiques et parascolaires.

Parmi les 1.730 nouveautés BD (contre 1.494 l'an dernier) : 764 albums (soit 44,16% du secteur) sont publiés par les "grands éditeurs" (contre 843 l'an passé) : on peut les répartir en 5 catégories :
- Imaginaire (SF, heroic-fantasy, fantastique…) : 230 titres contre 270 l'an passé (soit 30,11%)
- Humour : 210 titres contre 257 l'an passé (soit 27,48%),
- Policier (tenant compte des BD d'espionnage et romans contemporains) : 138 titres contre 131 l'an passé (soit 18,06%),
- Historique (intégrant western et aventures de pirates) : 119 titres contre 118 l'an passé (soit 15,57%)
- BD pour tout petits : 67 titres contre 48 l'an passé (soit 8,76%).

Notons que les 27 BD érotiques (contre 19 l'an passé) sont souvent d'origine japonaise et sont désormais l'apanage des labels indépendants.
Ces derniers ont publié 301 livres (contre 274 l'an passé) : locomotives de toutes les expériences d'écritures graphiques, ils représentent donc 17,39% du secteur.
Les mangas (BD japonaises) qui atteignent cette année 30,11%, non seulement de la production mais aussi du chiffre d'affaires du secteur, et les comics (BD américaines dominées par les aventures de super-héros, avec 8,21% de la production) constituent eux aussi des marchés distincts et de plus en plus porteurs.

A ces 1.730 nouveaux albums jamais édités sous cette forme jusqu'à aujourd'hui (soit 68,48% de la production BD annuelle), il faut aussi rajouter 515 rééditions (20,38%) sous une nouvelle présentation ou nouvelles éditions revues et augmentées (contre 436 l'an dernier), 212 recueils d'illustrations ou de dessins d'humour (8,39%) réalisés par des auteurs de BD (contre 207 l'an dernier) et 69 (2,73%) ouvrages sur la BD (contre 67 l'an dernier). Soit un total de 2.526 livres appartenant au monde de la BD (contre 2.204 l'an dernier) : autrement dit, une augmentation de 322 titres (contre 314 l'an dernier), soit 14,6%. A titre de comparaison, il faut savoir que 46.000 nouveaux livres sont publiés dans une année ; la BD représente donc 5,49% des livres édités sur le territoire francophone européen.

* Consécration par le nombre de maisons d'édition : elles sont désormais 185 (contre 180 l'an dernier), mais seulement 26 éditeurs publient la quasi-totalité des albums, c'est à dire les 3/4 de la production en titres. Cela représente vraisemblablement 80 à 90 % des ventes de ce secteur dominé par Glénat (avec 20,42% de parts de marché), Dargaud (19,3%), Dupuis (12,43%), Flammarion avec Casterman et Audie, Soleil, Delcourt, et, dans une moindre mesure, par Les Humanoïdes associés et Albin Michel.

Les éditeurs les plus prolifiques (qui sont passés de 23 à 26 en un an) laissent peu de marge de manœuvre aux nouvelles maisons d'éditions (Akileos, La Boîte à Bulles, Dynamite, L'Employé du moi, Esprit Livres, Humeurs, Nocturne, Theloma, Uploadgraphics…, ou encore Actes Sud, Denoël, Milan… qui s'étaient déjà frottées, sans trop de persévérance, à ce médium). On peut donc constater qu'en 2003 :

Glénat 205 nouveaux titres (contre 185 l'an dernier) soit 8,11% de la production BD,
Soleil-Végétal Manga 184 nouveaux titres (contre 99 l'an passé) soit 7,28%
Delcourt 174 nouveaux titres (contre 122 l'an passé) soit 6,89%
Dargaud-Kana 147 nouveaux titres (contre 169 l'an passé) soit 5,81%
Casterman 118 nouveaux titres (contre 104 l'an passé) soit 4,67%
Panini 116 nouveaux titres (contre 104 l'an passé) soit 4,59%
Tonkam 96 nouveaux titres (contre 120 l'an passé) soit 3,80%
Dupuis 94 nouveaux titres (contre 72 l'an passé) soit 3,72%
Pika 75 nouveaux titres (contre 64 l'an passé) soit 2,96%
Les Humanoïdes Associés 64 nouveaux titres (contre 47 l'an passé) soit 2,53%
Albin Michel 63 nouveaux titres (contre 60 l'an passé) soit 2,49%
Lombard 60 nouveaux titres (contre 57 l'an passé) soit 2,37%
SEEBD (= BD Erogène, Bulle Dog, Akuma et Tokébi) 59 nouveaux titres (contre 24 l'an passé) soit 2,33%
Vents d'Ouest 56 nouveaux titres (contre 44 l'an passé) soit 2,21%
Semic 54 nouveaux titres (contre 29 l'an passé) soit 2,13%
La Sirène-Nucléa² 46 nouveaux titres (contre 25 l'an passé) soit 1,82%
J'ai Lu-Flammarion 41 nouveaux titres (contre 39 l'an passé) soit 1,62%
Paquet 29 nouveaux titres (contre 27 l'an passé) soit 1,15%
L'Association 26 nouveaux titres (contre 25 l'an passé) soit 1,02%
EP Editions-La Martinière 25 nouveaux titres (contre 13 l'an passé) soit 0,98%
Audie 22 nouveaux titres (contre 33 l'an passé) soit 0,87%
Le Seuil 21 nouveaux titres (contre 13 l'an passé) soit 0,83%
S.A.F. (Erko + Nickel) 20 nouveaux titres (contre 7 l'an passé) soit 0,79%
Bamboo 19 nouveaux titres (contre 16 l'an passé) soit 0,75%
Joker 19 nouveaux titres (contre 9 l'an passé) soit 0,75%
Bayard 18 nouveaux titres (contre 18 l'an passé) soit 0,871%

Enfin, il ne faut pas oublier les labels indépendants (L'An 2, Atrabile, Clair de Lune, La Cafetière, Charrette, Coccinelle BD, La Comédie Illustrée, Cornélius, Le Cycliste, Drozophile, Dynamite, Ego comme X, FLBLB, FRMK, Groinge, Jet Stream, Joie de lire, Loup, Mosquito, Le 9ème Monde, Petit à petit, PLG, Point Image-JVDH, Psikopat, Rackham, Reporter, Les Requins Marteaux, Six Pieds sous Terre, Sketch, Temps Forts, Toth, USA, Vertige Graphic….) qui construisent peu à peu des catalogues fort intéressants, découvrant sans cesse de nouveaux talents. Ils participent pleinement au redéploiement de la BD, même si leurs tirages sont loin d'atteindre ceux des best-sellers.

* Consécration par les plus gros tirages et les ventes : "Titeuf", "Astérix" (avec une fausse nouveauté) et d'autres séries classiques (comme "Blake et Mortimer", "Le Petit Spirou","Joe Bar Team", "Boule & Bill", "Le Chat", "Lanfeust de Troy", "Cédric"…) confirment leur succès."32 décembre" de Bilal se place aussi parmi les meilleures ventes, toutes catégories confondues. Même s'il n'y a pas eu de nouvel album de "Titeuf" dessiné par Zep cette année, cette série reste la meilleure vente de l'année car elle prend toujours d'assaut les premières places du top des livres. Quant à "Astérix et la rentrée gauloise", il ne s'agit que de la réédition augmentée (tirée quand même à 1.500.000 ex. !) d'un album paru en 1993. Toutefois, les autres grands gagnants de l'année semblent être :

"Blake et Mortimer" de Sente et Juillard (600.000 ex.),
"Le Petit Spirou" de Tome et Janry (590.000 ex.),
"Joe Bar Team" de Bar2 (530.000 ex.),
"Boule & Bill" de Verron d'après Roba (400.000 ex.),
"Le Chat" de Geluck (300.000 ex.),
"Lanfeust de Troy"d'Arleston et Tarquin (300.000 ex.),
"Cédric" de Cauvin et Laudec (300.000 ex.),
"Blueberry" de Giraud (230.000 ex.),
"Litteul Kévin" de Coyote (200.000 ex.),
"Cédric & cie" (collectif) (192.000 ex.),
"Les Tuniques bleues" de Cauvin et Lambil (190.000 ex.),
collectif annuel "Mégatchô" (160.000 ex.),
"Les Schtroumpfs" du studio Peyo (150.000 ex.),
"Le troisième testament" de Dorison et Alice (150.000 ex.),
"Les Profs" de Erroc et Pica (150.000 ex.),
"Tom-Tom et Nana" de Cohen, Reberg et Desprès (120.000 ex.),
"L'élève Ducobu" de Zidrou et Godi (120.000 ex.),
"Kid Paddle & cie" (collectif) (120.000 ex.),
"L'agent 212" de Cauvin et Kox (102.000 ex.),
"Marsupilami" de Dugomier et Batem d'après Franquin (100.000 ex.),
"Atalante" de Crisse (100.000 ex.),
"Sambre" de Yslaire (100.000 ex.),
"Sillage" de Morvan et Buchet (100.000 ex.),
"Alpha" de Mythic et Jigounov (100.000 ex.),
"La jeunesse de Blueberry" de Corteggiani et Blanc-Dumont (100.000 ex.),
"Léonard" de Bob de Groot et Turk (100.000 ex.),
"Caméra café" de Van Linthout, Stibane et Didgé (100.000 ex.),
"Blacksad" de Diaz Canales et Guarnido (90.000 ex.),
"Bételgeuse" de Léo (90.000 ex.),
"Alix" de Martin et Moralès (90.000 ex.),
"Les femmes en blanc" de Cauvin et Bercovici (87.000 ex.),
"Golden City" de Pecqueur et Malfin (80.000 ex.),
"Wayne Shelton" de Van Hamme, Cailleteau et Denayer (80.000 ex.),
"Yakari" de Job et Derib (80.000 ex.),
"IR$" de Desberg et Vrancken (70.000 ex.),
"Rapaces" de Dufaux et Marini (70.000 ex.),
"Best of Boule et Bill" de Roba (65.000 ex.),
"Best of Gaston" de Franquin (65.000 ex.),
"Mélusine" de Gilson et Clarke (61.000 ex.),
"Calvin et Hobbes" de Watterson (60.000 ex.),
"Légende" de Swolfs (60.000 ex.),
"Les forêts d'Opale" de Arleston et Pellet (60.000 ex.),
"Le chant des Stryges" de Corbeyran et Guérineau (60.000 ex.),
"Le chat du rabbin" de Sfar (60.000 ex.),
"Les chroniques de la lune noire" de Froideval et Pontet (60.000 ex.),
"Momo le coursier" de Margerin (60.000 ex.),
"Jérémiah" de Hermann (53.000 ex.),
"Les Psy" de Cauvin et Bédu (52.000 ex.),
"Carmen McCallum" de Duval et Gess (50.000 ex.),
"Les sales blagues" de Vuillemin (50.000 ex.),
"Jérôme K. Jérôme Bloche" de Dodier (50.000 ex.),
"Gil St André" de Kraehn et Vallès (50.000 ex.),
"Les Gendarmes" de Sulpice, Cazenove et Jenfèvre (50.000 ex.),
"Pierre Tombal" de Hardy et Cauvin (50.000 ex.),
"Bouncer" de Jodorowsky et Boucq (50.000 ex.),
"W.E.S.T." de Dorison, Nury et Rossi (50.000 ex.),
"Golden Cup" de Pecqueur et Henriet (45.000 ex.),
"Tramp" de Kraehn et Jusseaume (45.000 ex.),
"Les guides en BD" (collectifs) (40.000 ex. par titre)

Bien entendu, comme dans tous les secteurs de l'édition, les tirages sont souvent supérieurs aux ventes réelles qui croissent moins vite que le nombre de parutions (le nombre de retours est toujours imprévisible) : d'où le fléchissement des tirages moyens. Toutefois, ces chiffres extraordinaires font des envieux : on les retrouve même pour des BD reposant sur le seul nom de leurs auteurs, comme celles dues à :

Bilal tirage de 425.000 ex. pour "32 décembre"
Tardi 135.000 ex. pour "Le cri du peuple T.3"

ou pour des séries au concept original comme :

"Le décalogue" de Giroud 100.000 ex. par titres
"Le triangle secret" de Convard 80 000 ex. par titres

Ces dernières sont souvent réparties dans des collections correspondant à différents types de marchés pour en faciliter la vente. Cela explique la création incessante de nouvelles segmentations en cette année 2003 ("Petits délires" et "Polyptiques" au Lombard, "Insomnie" chez Delcourt, "Expresso" chez Dupuis, "Haute tension" chez Albin Michel, "Les 3 masques" et "Styx" aux Humanoïdes associés, par exemple).

Les chiffres des tirages ont été communiqués par les attachés de presse ou les responsables éditoriaux. Merci à Sébastien Agogué, Jérôme Aragnou,Virginie Arbib, Marlène Barsotti, Maud Beaumont, Pol Beauté, Elise Brun, Anne Caisson, Evelyne Colas, Benjamine des Courtils, Cécile Cuillerier, Kathy Degreef, Ghislaine Dulier, Xavier Fostroy, Anne-Cécile Hautbois, Cédric Illand, Michel Jans, Bernard Joubert, Emmanuelle Klein, Patrice Lamare, Lise Louvet, Bernard Mahé, Philippe Marcel, Florence Mihail-Danton, Philippe Morin, Thierry Mornet, Frédéric Niffle, Daniel Pellegrino, Arnaud Plumeri , Diane Rayer, Marie-Thérèse Vieira et Hélène Werlé.

* Consécration de la BD étrangère : les 521 BD japonaises ou coréennes (mangas ou manwhas) représentent, désormais, pratiquement 30 % du marché de la BD et sont appréciées par un public très jeune.

On comptait 377 mangas l'an dernier : on note donc une augmentation de 144 titres (contre 108 en 2002) pour ce secteur de plus en plus apprécié. Notons qu'il n'est plus concentré chez quelques éditeurs spécialisés (comme Tonkam ou Pika) ; en effet, de plus en plus d'éditeurs traditionnels de BD s'intéressent à ce secteur lucratif : Glénat, Dargaud (avec Kana), Panini (avec Génération Comics), Flammarion (avec J'ai Lu), Delcourt (avec Akata), Soleil (avec Végétal Manga), SEEBD (avec Akuma et Tokébi)…

En 2003, les plus gros tirages des mangas sont principalement :

"Yu-Gi-Oh" 60.000 ex.
"Gunnm Last Order" 40.000 ex.
"Love Hina" 35.000 ex.
"Captain Tsubasa world youth" 30.000 ex.
"Naruto" 30.000 ex.
"Kenshin le vagabond" 30.000 ex.
"Fruits Basket" 30.000 ex.
"Shaman King" 25.000 ex.
"Hunter X Hunter" 25.000 ex.
"Samouraï deeper Kyo" 25.000 ex.
"Hikaru no Go" 25.000 ex.
"Angel Sanctuary" 25.000 ex.
"Appare Jipangu" 25.000 ex.
"King of Fighters Zillon" 25.000 ex.
"X" 25.000 ex.
"G.T.O." 20.000 ex.
"Chobits" 20.000 ex.
"Slam Dunk" 20.000 ex.
"Nana" 20.000 ex.

Leur développement est un des principaux facteurs d'augmentation de la production BD car les nouveaux tomes de chaque série se succèdent dans des délais très rapprochés.

L'engouement des comics relayé par les récents succès cinématographiques ("X-Men", "Daredevil", "Hulk", "La ligue des gentlemen extraordinaires"…) est toujours d'actualité puisque 142 BD américaines (soit 8,21%) ont été publiées en albums cette année (contre 129 en 2002). On dénombre aussi 35 BD italiennes (contre 27 en 2002), 14 BD argentines (contre 10 en 2002), 9 BD espagnoles (contre 13 en 2002)… : au total 767 traductions -tous horizons confondus- (contre 586 l'an passé), c'est-à-dire 44,33% de la production des nouveautés. Voilà qui facilite les prospections à l'étranger, même dans des pays où il est difficile de percer comme la Russie, réfractaire à cet art depuis des années, ou aux USA où le succès de l'édition en langue anglaise de "Persépolis" permet d'espérer l'ouverture à de nombreux autres talents francophones. Pourtant, voici à titre d'exemple quelques vedettes dont le succès demeure international : "Les Schtroumpfs" (traduits en 25 langues), "Lucky Luke", "Joe Bar Team (en 17 langues)", "Titeuf" (en 14), "Thorgal" (en 13), "XIII" (en 11)…

* Consécration pour les prépublications : la BD ne se limite pas aux albums, elle investit également de nombreuses formes de publication : magazines généralistes, fanzines, Internet… Paradoxalement, les 21 magazines spécialisés de BD, vendus dans le réseau presse, ne trouvent pas toujours leur public.

En 2003, 305 BD (soit 17,63% des nouveautés) ont été prépubliées (contre 269 en 2002), pour la plupart dans les 21 magazines de BD que sont Spirou, Le Journal de Mickey, Picsou, Fluide Glacial qui fait appel à l'humoriste Albert Algoud pour redorer son blason, Psikopat, Lanfeust Mag (tirage : 30 000 exemplaires), Vécu, L'Echo des Savanes, Ferraille, Coyote…, la nouvelle mouture de Kid Paddle Magazine ou les récents Grosbill, Art X, Strip, Tokebi…, ou encore Pilote qui renaît le temps d'un seul numéro (vendu à 200 000 exemplaires !) : ils n'étaient que 16 en 2002 !

Si Pavillon Rouge et les petits formats édités par Semic ("Rodéo", "Kiwi", "Zembla"…) ont hélas disparu, notons que, dopées par le succès de "Titeuf", les éditions Glénat ont lancé une nouvelle formule de Tchô (40.000 ventes mensuelles), tandis que certains titres ont été rebaptisés tel Minnie Mag devenu Witch Mag. Ceci dit, remarquons que 12 revues -et non des moindres puisque Métal Hurlant, Lapin, Bile Noire…, ou des nouveaux comme Bang !, Shônen Collection (spécialisé dans la prépublication de mangas, tirage 30.000 ex.), La Lunette…, en font partie- préfèrent la distribution en librairies spécialisées (contre 11 en 2002). Dans ce même circuit, des revues érudites comme Hop !, Le Collectionneur de Bandes dessinées, La Lettre, Sapristi, PLG, DBD et L'Avis des Bulles nous parlent de la BD et de ses acteurs. Seuls Bo Doï, Calliope, Wizard (spécialisé dans les super-héros) et les derniers-nés L'Année de la BD ou Le Virus Manga osent affronter le public des kiosques, des Relay et autres Maisons de la Presse. On relève également, dans ce réseau de distribution, une diminution des magazines publiant des BD américaines super-héroïques ("Spider-Man", "X-Men", "Spawn", "Batman"…) : 42 fascicules (tirés entre 25 000 et 50 000 ex.) paraissent régulièrement (contre 54 en 2002). Ce secteur est désormais entre les mains de deux groupes (Panini et Semic), lesquels investissent de plus en plus dans les produits de librairies.

* Consécration grâce à l'éventail des prix proposés : différentes opérations promotionnelles sont organisées par les éditeurs qui multiplient les mises en valeur de leur catalogue, afin de le proposer à un public de plus en plus large. Les grands éditeurs continuent à multiplier les albums à un prix modique ou offrant un plus (un autre album, un ex-libris, un cahier supplémentaire...). Certains comme Dupuis, Dargaud, Casterman ou Bamboo éditent aussi des collectifs promotionnels à bas prix regroupant leurs différentes séries… D'autres, comme Glénat, proposent des intégrales dans un format proche du roman et à un prix défiant toute concurrence.

Les éditeurs multiplient donc les tentatives pour mettre en valeur le fonds de leur catalogue d'où le nombre accru des rééditions : intégrales (150 titres soit 29,12%) ou éditions "new look" de séries déjà bien implantées (120 titres soit 23,30%).

Toutefois, il faut noter la recrudescence des tirages de luxe (60 titres soit 11,65%) touchant un public d'amateurs avisés ou de spéculateurs, comme c'était le cas dans les années 80, à l'aube d'une crise que l'on espère loin derrière nous. Le public peut donc désormais faire son choix parmi une production pléthorique, même s'il reste encore bien des auteurs à redécouvrir : il devient urgent de valoriser les BD innovantes et oubliées qui font partie d'un patrimoine que les éditeurs se doivent d'entretenir. En 2003, seulement 67 titres (soit 3,87% des nouveautés) parus dans la presse ou à l'étranger et datant de plus de 20 ans ont bénéficié d'une parution en album (contre 46 l'an passé). Merci aux éditions de l'Âge d'or, l'An 2, l'Association, Bulle Dog, Le Cri, Delcourt, Dupuis, FRMK, Ligne d'ombre, Loup, Mosquito, Niffle, Panini, Soleil, Taupinambour, Temps Forts, Toth, Triomphe, Vertige Graphic…, qui proposent, enfin, des chefs-d'œuvre signés André Joy, Arthur Burdett Frost, Massimo Mattioli, Brian Bolland, Wilhelm Bush, Osamû Tezuka, Jijé, Yves Chaland, Alex Barbier, Ivo Milazzo, Eddy Paape, Attilio Michelluzzi, Dino Battaglia, Raymond Macherot, Maurice Tillieux, Jack Kirby, Steve Ditko, Will Eisner, John Buscema, Magnus, Lucien Nortier, Christian Gaty, Jean Cézard, Maurice Cuvillier, Loÿs Pétillot, Keiji Nakazawa, Chantal Montellier, Yoshihiro Tatsumi…

Cette diversité prouve que le lecteur de BD est curieux et cultivé, à l'encontre des idées reçues : il n'y a, en effet, aucune raison pour que le public de la BD le soit moins que celui du cinéma ou de la littérature contemporaine !

* Consécration grâce à l'intérêt diversifié porté à la BD : c'est désormais un média solidement implanté dont l'importance ne peut plus être ignorée !

En France, la BD est, enfin, reconnue comme un secteur à part entière de l'édition : elle a été transférée de la délégation aux Arts plastiques vers la direction du Livre et de la lecture. Cette reconnaissance institutionnelle lui permet, entre autres, d'amplifier ses droits à tous les dispositifs du Centre National du Livre : aides aux jeunes auteurs, au développement des nouvelles maisons d'édition, à la traduction d'ouvrages étrangers…

Même si la BD est aujourd'hui un art qui réussit à entrer dans de nombreuses institutions officielles et qui se heurte à de moins en moins de préjugés (le bon accueil que réserve le public aux romans graphiques en est une preuve flagrante), elle garde son impertinence. Cette particularité explique qu'elle soit encore trop souvent synonyme de sous-culture, notamment dans les milieux dits littéraires ou culturels. Pourtant, des revues telles que Lire, Télérama ou Beaux Arts Magazine n'ont pas hésité, cette année, à consacrer une grande partie de leur contenu ou, même, un numéro spécial à un des aspects de ce qu'on appelle le 9e art : un média qui regroupe d'ailleurs de nombreux intellectuels "bédéphiles" analysant ou étudiant les tendances et l'histoire de cette culture dite du divertissement. De même, la chaîne Arte a été le partenaire du groupe Glénat pour organiser le 1er concours européen de bandes dessinées destiné à découvrir de nouveaux auteurs et sachez que le très sérieux mensuel Capital : l'essentiel de l'économie prépare, lui aussi, un dossier sur la BD ! La BD est un art populaire graphique et littéraire qui s'expose et voyage facilement mais son expansion s'est pourtant construite sans réelle vitrine médiatique. Ainsi, en dehors de l'événementiel Festival d'Angoulême (qui représente, et on peut le regretter, 90 % de la couverture journalistique de l'année), la population s'estime toujours aussi mal informée, surtout par la télévision, mais aussi par les radios et la presse écrite généraliste. L'actualité du 9e art mérite pourtant une présence renforcée dans les relais d'opinion avec des émissions régulières et des rubriques permanentes.

Les journalistes et spécialistes critiques passionnés (le plus souvent réunis au sein de l'ACBD : Association des Critiques et journalistes de Bandes Dessinées) ne manquent pourtant pas : leurs efforts doivent être mieux récompensés ! Ces journalistes et spécialistes du 9e art remettent, tous les ans, le Grand Prix de la Critique, à l'album le plus remarquable de l'année ; en 2003, il a été décerné à "La grippe coloniale T.1" par Serge Huo-Chao-Si et Appollo chez Vents d'Ouest.

Notons également que les ouvrages ci-dessous, classés par ordre alphabétique d'éditeurs, ont été aussi très appréciés !

- "L'ascension du Haut-Mal T.6" par David B. à L'Association
- "PyongYang" par Guy Delisle à L'Association
- "Quartier lointain T.2" par Jirô Taniguchi chez Casterman
- "Le commis voyageur T.1" par Seth chez Casterman
- "Les imposteurs T.1" par Christian Cailleaux chez Casterman
- "Le cas Girardon" par Christian Barranger au Cycliste
- "Le combat ordinaire" par Manu Larcenet chez Dargaud
- "Blacksad T.2 : Arctic-Nation" par Juanjo Guarnido et Juan D. Canales chez Dargaud
- "Le chat du rabbin T.3 : L'exode" par Joann Sfar chez Dargaud
- "Ayako T.1" par Osamû Tezuka chez Delcourt
- "Vincent et Van Gogh" par Gradimir Smudja chez Delcourt
- "Le photographe T.1" par Emmanuel Guibert et Didier Lefèvre chez Dupuis
- "Là-bas" par Tronchet et Anne Sibran chez Dupuis
- "Anatomie du désordre" par Emmanuel Moynot chez Glénat
-"32 décembre" par Enki Bilal chez Les Humanoïdes associés
- "Monster T.7 à 11" par Naoki Urasawa chez Kana
- "Zapata, en temps de guerre" par Philippe Squarzoni aux Requins Marteaux
- "Le bruit du givre" par Lorenzo Mattotti et Jorge Zentner au Seuil
- "Kuklos" par Christophe Gaultier et Sylvain Ricard au Soleil

* Consécration des métiers de la BD qui, comme le public concerné, attirent de plus en plus de femmes : 1.264 dessinateurs ou scénaristes (dont 93 femmes, soit 7,35%) sont employés sur le territoire francophone européen.

Aujourd'hui, pour vivre (plus ou moins bien) de la BD, il faut avoir au moins trois albums toujours au catalogue des éditeurs et un contrat en cours, ou travailler, de façon systématique, pour la presse. Mais la plupart de ces créateurs sont obligés d'être de plus en plus polyvalents, travaillant pour d'autres médias et participant très souvent à des animations pédagogiques en école, pour permettre et développer l'accès à la lecture et à l'écriture. Ils nous prouvent ainsi que la BD offre un terrain fantastique à la créativité, à la réflexion, au travail en équipe, à l'ouverture sur toutes les cultures. Parmi ces 1.264 auteurs notons que 190 (soit 15%) d'entre eux sont scénaristes sans être également dessinateurs (contre 150 en 2002) et que certains sont aussi coloristes, lettreurs, maquettistes, traducteurs, éditeurs, responsables éditoriaux, journalistes, organisateurs de festivals….

Si 2003 fut l'année du 20ème anniversaire de la mort d'Hergé (de nombreuses commémorations ont entouré l'évocation du créateur de "Tintin" alors que les conditions pour utiliser son œuvre sont de plus en plus draconiennes), n'oublions pas les disparitions (rien que sur le territoire francophone européen) de Franz (dessinateur de "Jugurtha", "Lester Cockney" ou "Poupée d'ivoire"), Patrick Moerell (pilier de la revue Fluide Glacial), Rémy Bordelet (dessinateur pour les petits formats), Omer Boucquey (plus connu pour ses dessins animés), Georges Pichard (dessinateur de pulpeuses héroïnes comme "Blanche Epiphanie", "Paulette" ou "Marie-Gabrielle de St Eutrope"), Guy Bara (le papa de "Max l'explorateur"), Jean-Pierre Ventillard (éditeur des "Pieds-Nickelés"), Alain Bignon (dessinateur de "Une éducation algérienne" ou de "Il faut y croire pour le voir"), Maurice Manesse (un habitué des publications Fleurus)...

* Consécration grâce aux nombreuses adaptations : les BD sont très souvent sources d'inspiration pour d'autres formes d'art et d'autres médias.

Il n'y a jamais eu, par exemple, autant de films mis en chantier d'après des BD. Malgré le désintérêt de la plupart des médias généralistes (il manque vraiment une émission de TV entièrement dévolue au 9ème art !), la BD est partout ! Il n'y a jamais eu autant de festivals, de librairies, de sites Internet, de fresques murales, d'expositions, de musées spécialisés dans ce domaine ou de livres écrits sur la BD (31 des 69 essais publiés en 2003 sont des monographies et 23 sont des guides pratiques).

D'autres domaines artistiques s'inspirent régulièrement des images et des histoires qui ont déjà fait leurs preuves en figuration narrative. C'est surtout au cinéma que cela est le plus significatif : la BD est à l'origine de succès comme "Michel Vaillant" ou "L'outremangeur" (pour ne citer que les productions francophones sorties en 2003) et de nombreux projets sont en cours ("Iznogoud", "Jack Palmer", "XIII", "Bob Morane", "Blake & Mortimer", "Lucky Luke", "Thorgal", "La trilogie Nikopol", "Neige", "Tanguy et Laverdure", "Blacksad", "Adèle Blanc-Sec", "Rapaces", "Rahan", "Ranxerox", "Pilules bleues", "Monsieur Jean", "Le triangle secret", "Giacomo C.", "Valérian", "Lanfeust", "Les Pieds Nickelés","Bob et Bobette", "Barbarella", "Le démon de midi"…, et même "Tintin" par Spielberg).

Les créateurs restent, heureusement, les maîtres de leurs BD comme l'a prouvé Albert Uderzo en refusant l'adaptation cinématographique d'un troisième "Astérix". Cette razzia du septième art sur le neuvième est due, en grande partie, aux excellents scores obtenus par les adaptations cinématographiques d'"Astérix et Cléopâtre" et de "Spider-Man", en 2002, mais aussi à cette omniprésence de la BD dans la culture mondiale et à sa récente valorisation. Pour les producteurs, il est plus facile de lire une BD qu'un script écrit pour le cinéma !

On constate le même engouement dans les dessins animés (la chaîne de télévision France 2 s'appuie même sur une nouvelle grille de programmation intégrant de nombreux dessins animés. s'inspirant de BD afin de remédier à la perte de repères des jeunes et à leur peur de l'avenir), les jeux vidéos ou de société, les pièces de théâtre…, sans parler des produits dérivés (Pixi ou objets 3D, T-shirt, sous-bocks, verreries, sérigraphies, affiches, posters, ex-libris, portfolios, cartes postales, téléphoniques ou à jouer, enveloppes, étiquettes de vins ou de fromages, Cd-roms, plaques émaillées, sacs plastiques, timbres-poste…), de la publicité avec ses grandes campagnes de communication ou de la politique. D'ailleurs, il apparaît que ce qui est comptabilisé dans les 212 recueils d'illustrations (outre les 74 dessins d'humour et les 56 textes illustrés) réalisés par des auteurs de BD résulte souvent de ces adaptations. En effet, les éditeurs et les auteurs n'hésitent pas à proposer les travaux graphiques réalisés pour ces autres médias sous forme de recueils, souvent luxueux : juste retour des choses !

Si quelques signes de mauvais augure (disparition des petits formats, difficultés économiques de la presse spécialisée BD, relative surproduction, baisse du tirage moyen, stagnation des ventes en hypermarchés, tirages surdimensionnés pour certains titres pourtant largement médiatisés…) font les choux gras des esprits chagrins et peuvent inquiéter les professionnels, il n'en demeure pas moins que la BD apparaît aujourd'hui comme un loisir intégré dans nos pratiques culturelles, touchant toutes les générations et les couches sociales. Même "Le petit Larousse" présente sa nouvelle édition en se basant sur l'entrée d'une dizaine d'auteurs de bandes dessinées dont Bretécher, Druillet, Fred, Gotlib, Moebius, Schuiten, Wolinski…

La BD fait donc bien partie du paysage. Elle est plus populaire que jamais : elle n'a pas attendu que l'on s'occupe d'elle pour entrer dans les foyers ! Aujourd'hui, la BD est considérée par l'ensemble de la population comme éducative et originale, son lectorat se rajeunit (84% des 8-14 ans lisent des BD), se féminise (45% des lecteurs de BD sont désormais des femmes)… !

Informations et étude émanant de Gilles Ratier, secrétaire général de l'ACBD (Association des journalistes et Critiques de Bandes Dessinées). 23/12/03.

 
Tintin au Pays du Roi des Belges !

Même si cela devient de plus en plus courant, ce n'est pas tous les jours que des auteurs de littérature s'intéressent à la bande dessinée. C'est encore moins fréquent de voir ceux-ci tenter d'investir l'univers d'un héros de bande dessinée, tout en conservant leur mode de rédaction, leur style propre et en tentant de "prolonger" les aventures de celui-ci dans la littérature. C'est maintenant chose faite et quel univers aurait mieux pu s'y prêter que celui de Tintin ?

Edité par les éditions Moulinsart, "Drôle de Plumes" est un recueil réunissant 11 nouvelles inédites publiées à l'occasion du 75ème anniversaire de Tintin... et du 70ème anniversaire du Roi Albert II, Roi des Belges. "11 nouvelles de Tintin au Pays du Roi des Belges..."

Véritable défi, exercice inédit... chaque écrivain a écrit une nouvelle représentative de son univers et de son style en intégrant un ou plusieurs personnages de l'oeuvre d'Hergé. Chaque récit devait se dérouler totalement ou partiellement sur le "Tracé Royal", itinéraire royal historique. Ce tracé traverse Bruxelles, du Château de Laeken jusqu'au Palais Royal pour se terminer au Palais de Justice. Chaque nouvelle est illustrée exclusivement par des dessins provenant des aventures de Tintin. Il ne s'agit pas de nouvelles aventures de Tintin... mais bien de l'incursion de personnages hergéens dans des univers littéraires personnels.. Et quelle brochette d'écrivains : Alain Beremboom, Jacqueline Harpman, Frank Dannemark, Jean-Claude Bologne, Jacques De Decker, Eric De Kuyper, Xavier Hanotte, Régine Vandamme, Kamiel Vanhole, Koen Peeters, Geert van Istendael... ainsi qu'une préface du non moins "connu" Erik Orsenna.

Cet événement n'aurait pas été complet sans un "lancement royal" de l'ouvrage. Ce 17 décembre, un tirage de tête numéroté et toilé de l'ouvrage a été offert à sa majesté le Roi Albert II, en présence des auteurs, de l'éditeur ainsi que Fanny et Nick Rodwell au Palais Royal de Bruxelles.

Une idée originale de cadeau à l'approche des fêtes de fin d'année.

Publié aux éditions Moulinsart, l'ouvrage sort en librairie ce 18 décembre, au prix de 24 euros (176 pages) et existe également en langue néerlandaise sous le titre "Met de Kroontjespen".

 
Bob Morane fête ses 50 ans !

Bob Morane fête ses 50 ans !! Le 16 décembre 1953, les éditions Marabout lançaient "La vallée Infernale", premier titre de plus de 180 aventures de Bob Morane. Son créateur, Henri Vernes, actuellement l'un des doyens de la littérature et bande dessinée belge, vient lui-même se souffler ses 85 bougies ! Baladé par ce dernier à travers les continents, l'espace et le temps, c'est au travers d'une multitude de médias que les lecteurs auront pu découvrir et suivre les aventures de Bob Morane et Bill Balantine : le roman, la bande dessinée, les disques, la TV, le dessin animé, et peut-être un jour prochain.. le cinéma. Rappelons que l'adaptation de ses romans en bande dessinée remonte à 1959.

Pour fêter dignement cette occasion, les éditions A Propos publient leur 11ème ouvrage : "Henri Vernes - A Propos de 50 ans d'Aventures" - une interview extrêmement bien documentée et illustrée, réalisée par Stephan Caluwaerts et Yann, préfacée par Jean Dufaux. Vous pourrez ainsi en savoir plus sur la genèse de la série, l'évolution de celle-ci au travers des décennies, les thèmes majeurs abordés par l'auteur, ses techniques de travail et également l'avenir de la série.

En outre, l'ouvrage se compose d'un récit inédit "Fawcett, le naufragé de la forêt vierge", un roman d'aventure historique prépublié en 1956 dans le magazine Femmes d'Aujourd'hui, complément de "Sur la Piste de Fawcett", célèbre épisode des aventures de Bob Morane.

L'ouvrage est actuellement en vente dans toutes les librairies au prix de 10 euros (128 pages).

 
Prix de la Critique, Prix Goscinny, Prix de Genève

En cette fin d'année 2003, à quelques semaines du Festival International de BD d'Angoulême, les prix pleuvent...

- Le Grand Prix de la Critique BD revient, cette année, à “La grippe coloniale” Tome 1 : “Le retour d'Ulysse” par Serge Huo-Chao-Si et Appollo, aux éditions Vents d’Ouest !

L’ACBD, l’Association des Critiques et journalistes de Bandes Dessinées, honore, avec ce prix, deux auteurs de l’île de la Réunion qui ont inscrit leur récit alerte, drôle et profondément émouvant dans le cadre d’un épisode douloureux et longtemps occulté de l’histoire locale : le retour sur l’île des enfants du pays mobilisés en 14-18 pour défendre la patrie française. En revenant des tranchées de la Grande Guerre, ils apporteront malgré eux, en 1919, la grippe qui allait décimer la population locale. Le Grand Prix de la Critique Bandes Dessinées de l’ACBD valorise ainsi un album remarquable au sein d’une production sans cesse plus importante. Cette année, les journalistes ont fait leur choix parmi quelques 1730 nouveautés publiées dans l’espace francophone.

Le communiqué officiel parle "d’un album remarquable" car le jury est bien conscient qu’il ne s’agit pas du seul album important paru en 2003.

- Prix René Goscinny :
"Le Prix René Goscinny 2003, récompensant le meilleur "jeune" scénariste de BD de l'année, vient d'être attribué à Riad Sattouf pour le scénario de l’album "Les jolis pieds de Florence" paru aux éditions Dargaud.

Le jury du 11ème Prix René Goscinny était composé de : Philippe Druillet, Alix Girod de l’Ain, Anne Goscinny, Benoït Habert, Nagui, Yves Poinot, David Pujadas, Marjane Satrapi, Patrick Timsit et Mickaël Youn.

Le 11ème Prix René Goscinny doté d’un trophée en bronze et d’un chèque de 5000 euros (la plus forte dotation pour le lauréat de toute la BD) sera officiellement décerné au lauréat lors de la soirée de remise des prix du Festival de la bande dessinée d’Angoulême.

Plus d'info sur les prix René Goscinny : http://www.goscinny.net/

- Prix International de la Ville de Genève :
- Prix International de la Ville de Genève : L'Ascension du Haut Mal - David B. (L'Association)
- Prix Töpfer qui récompense le meilleur auteur Genevois : Guillaume Long : Comme un Poisson dans l'huile (Vertige Graphic)

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