![]() |
Algésiras : Dans mon histoire, un candélabre est une créature fantastique, sorte d'esprit issu du feu. Ces candélabres interfèrent dans le quotidien des principaux personnages du récit. Cette intervention de créatures fantastiques dans la vie des hommes, c'est ce qu'on appelle du fantastique contemporain … J'ai pris le nom de "candélabre" tout simplement parce que c'est un objet qui est au service du feu. Et cela sonnait bien ! Algésiras : Oui, j'aime bien la sonorité du mot. En parlant de fantastique contemporain, c'est vrai que celui-ci apparaît petit à petit. Au début de l'histoire, on est vraiment dans le monde de tous les jours, dans un monde même assez "professionnel", celui de la danse,.. Il y a une première vie de ton héros qui est racontée, l'irruption du fantastique se fait un peu par hasard au départ ?
Les Candélabres sont un peu des anges gardiens d'un autre type ? Algésiras : Ce n'est pas leur rôle dans l'histoire, même si c'est le rapport que Paul entretient avec l'une des créatures effectivement. Ils ont un rôle bien défini lié à leurs histoires mais ils ne sont pas "nés" pour ça, dirons-nous. Mais ils peuvent avoir des sentiments à un certain moment, comme c'est le cas dans l'histoire effectivement ! Algésiras : En fait, leurs origines font qu'ils ont forcément un comportement qui est calqué sur les humains. Sans expliquer d'où ils viennent, je tente de montrer qu'ils ne sont pas abstraits, même s'ils ne sont pas organiques. Ils ont pris l'apparence humaine pour une raison bien précise, que je ne citerai pas pour l'instant, et notamment pour tenter de se faire comprendre d'eux, même s'ils n'y parviennent pas toujours très bien. Algésiras : Les deux. D'abord par goût personnel. J'ai baigné dans la bande dessinée et la littérature fantastiques ; je voulais de toute façon faire une histoire fantastique. Maintenant, visuellement, il n'y a pas beaucoup d'éléments fantastiques dans ma bd. Il fallait donc que je trouve un élément qui soit directement associé au surnaturel pour le lecteur, mais qui soit également facilement identifiable, c'est pourquoi j'ai choisi le feu. Par le fantastique, il est également possible de faire passer des sentiments ou de mettre les personnages dans des situations inhabituelles qui les révèlent au niveau de leurs personnalités. Julien et Paul sont deux personnages importants dans l'histoire. Quel profil as-tu voulu leur donner dès le départ ? Algésiras : En fait, Julien
et Paul sont véritablement la base de l'histoire, avant tout le reste.
Je désirais créer des relations entre un personnage qui soit humain et
l'autre pas. Et tout le reste est venu par après : l'histoire des "Candélabres",
leurs naissances, l'idée du feu, des oiseaux,… Cela te permet aussi de parler d'amitié sur un mode intéressant ? Algésiras : En effet, mais je ne m'en serais de toute façon pas privée même sans l'élément fantastique. C'est quelque chose que je rajoute parce que cela fait partie de mon goût personnel. Disons que c'est plus facile à amener par le biais du fantastique. Quelque part, étant donné que Paul pense être le seul à voir les Candélabres, il se les approprie en quelque sorte, comme s'ils lui appartenaient… Ils ne sont pas malléables par lui, parce qu'ils ont leurs propres destins mais étant donné qu'ils ne sont vus qu'à travers les yeux de Paul, même le lecteur n'a aucune preuve de leur existence et qu'ils ne sont pas des bobards du début à la fin. Quelles sont tes sources dans la littérature entre autre qui t'ont guidée vers ce type de récit ? Algésiras : J'aurais un peu
de mal à citer des noms en particulier parce que j'en ai lu vraiment beaucoup.
C'est l'accumulation des lectures qui fait qu'il y a des choses qui se
dégagent au fur et à mesure. Par exemple pour le tome 1, une référence
évidente, Pour parler un peu du dessin, ce sont tes premières armes dans la BD professionnelle ? Tu as choisi un univers graphique ou c'était inné pour toi lorsque tu t'es mise à dessiner, c'est ce trait là qui était le tien ? Algésiras : Franchement, je n'ai pas choisi un style de dessin. Je ne sais pas comment faire autrement, tout simplement. Mais personnellement, c'est moins le dessin qui m'intéresse que de raconter des histoires… et le dessin, pour moi, est un moyen de raconter ces histoires. C'est un médium, un vecteur ?
Si je te suis bien, il est donc fort possible que dans quelques années, tu deviennes une scénariste uniquement ? Algésiras : Non, je ne compte pas abandonner le dessin mais je ne peux pas dessiner tout ce que j'ai envie de raconter, c'est impossible. Je suis déjà assez lente. Et puis, il y a certains thèmes qui seront peut-être mieux servis par d'autre dessinateur plus talentueux que moi. J'essaie donc de trouver des dessinateurs qui soient sur la même longueur d'onde que moi, c'est vraiment très dur ! Les jeunes dessinateurs ont des univers qui sont beaucoup plus proches de l'aventure classique… Et moi, j'aimerais trouver des dessinateurs qui aient envie de raconter des histoires intimistes. Algésiras : Personnellement, j'aime ça. Il y a des choses que je n'aime pas dessiner mais j'aime dessiner les rapports entre les personnages, c'est ce que je préfère. Le travail sur les regards entre autre ? Algésiras : Oui, les regards,
les personnages qui se touchent. Dans le tome trois, il y a beaucoup de
thèmes en rapport justement avec le touché, le regard. C'est quelque chose
qui ne m'ennuie pas personnellement mais je comprends très bien qu'un
dessinateur puisse s'ennuyer à ça et qu'il faille compléter avec un découpage
comprenant beaucoup de décors etc… Mais tu fais un dessin prêt pour la mise en couleur, avec très peu d'aplats noirs, de travail sur les ombres noires. Ton dessin est pratiquement transparent. Algésiras : C'est de la ligne claire. Tu n'as pas envie de passer à la couleur toi-même et de travailler davantage tes noirs et blancs pour qu'ils soient plus maîtrisés par toi ? Algésiras : J'aimerais beaucoup
faire une bande dessinée en noir et blanc en utilisant probablement des
lavis. Mais il est difficile de trouver à publier en noir et blanc. En
ce qui concerne la couleur, je pense que je le ferai à terme si Nadine
(Nadine Thomas : coloriste, ndlr) est d'accord. Sa pierre à l'édifice ! Algésiras : Oui. Algésiras : Je ne ressens
pas de différence dans le sens où je travaille pour moi, c'est-à-dire
; je dessine ce que j'aurais envie de lire. Je ne me pose pas la question
de savoir si je travaille pour tel ou tel public, mais il s'avère que
ça trouve une résonance auprès du public féminin, et ce, depuis le début
de la série. Ceci dit, des auteurs masculins trouvent également une résonance
auprès du public féminin, c'est une question de personnalité. D'autres
auteurs femmes vont également plaire au tout public. La bd reste tout de même très masculine ! Algésiras : Ils sont très frileux parce que la cible principale reste néanmoins les garçons ados. Chez Delcourt, il y a effectivement une ouverture qui porte davantage vers plein de publics différents. Je ne pense pas que j'aurais eu la moindre chance chez les autres éditeurs. Mais je trouve dommage que les éditeurs n'essaient pas de séduire ce public féminin, parce qu'il existe bel et bien. Un tout grand merci. Interview réalisée
par Thierry Bellefroid
Visitez le site d'Algésiras, découvrez des croquis, des inédits, des synopsis, etc... Gagnez l'une des séries complètes (3 albums) de la série...
Images Copyrights © Algésiras - Editions Delcourt 2002 |
© BD Paradisio 2002 - http://www.bdparadisio.com