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Comment s'est passée ta collaboration avec Laurent Hirn ? Vous avez l'impression d'avoir construit et fait évoluer cette série à deux ? Brunschwig : Lorsque j'ai présenté
le scénario du "Pouvoir" à Laurent, il l'a lu devant moi, et
sa première réaction a été de vouloir en savoir plus sur la série et sur
les personnages. La série l'intéressait avant tout, sans aucunement mettre son travail en avant. Son désir était de se mettre au service de personnages, de créer des gens forts, de leur donner l'émotion, la puissance psychologique auxquelles ils avaient droit. Il avait l'impression en lisant le scénario du "Pouvoir" qu'il avait enfin trouvé une série dans laquelle il pourrait développer cette dimension-là. Il n'a pas été trop effrayé par ton scénario de départ ? C'était une série ambitieuse… Brunschwig : Non pas du tout. En réalité, cela faisait 4-5 ans qu'il cherchait un scénario pour se lancer dans la bd. C'est un ami proche de Joseph Béhé, avec qui il avait fait les Arts-Deco de Strasbourg. En voyant le travail de Joseph, il avait vraiment envie de se lancer mais pas sur n'importe quel projet. Le "Pouvoir" représentant à 99% ce qu'il avait envie à la fois de dessiner et d'exprimer. Il s'y est lancé à corps perdu en se rendant compte que cela allait être dur, et il a vraiment donné le meilleur de lui-même ! Brunschwig : C'est sûr ! Par exemple,
si je puis replacer notre terrible histoire avec Guy.. (Delcourt, ndlr)..
(rires), il y a eu effectivement quelques flottements à la sortie du tome
4. Notamment parce qu'il n'y avait toujours pas de promotion pour le lancement
de l'album, cela faisait deux fois que Guy nous faisait un album "collé"
alors que tous ses albums sont habituellement cousus, alors que nous avions
choisi les éditions Delcourt notamment pour la qualité des albums, des
maquettes, de reliures, etc.. Mais on ne voulait pas ça. On assume la série depuis le début, C'est complètement ce qu'on avait envie de faire. On voulait arriver à cette fin, à exprimer des choses émotionnellement intéressantes pour les gens, dans le sens où, tout en restant de la BD grand public, ce n'est pas pompeux ; c'est un thriller où on s'attache aux personnages, on suit leur histoire, on soulève des questionnements importants sur la société, on pousse la logique des personnages jusqu'au bout, etc… Notre but était donc d'avoir un produit complet avec plusieurs niveaux de lecture où chacun trouvait un peu son compte, son plaisir, un enrichissement personnel éventuel, des éléments qui font travailler à la fois l'imaginaire et la conscience, … Et cela, on ne voulait certainement pas le bâcler et nous sommes contents de l'avoir fait. Ca va mieux avec Delcourt, maintenant ?
Pour revenir à la raison pour laquelle c'était tellement dur de terminer, c'est aussi qu'il a fallut qu'on envisage de quitter nos personnages. Ayant beaucoup réfléchi à ce qui s'était passé avant les événements du "Pouvoir des Innocents" : tout le passé des personnages que nous avions développé et l'encadrement de l'histoire du Pouvoir par ce passé, on n'a pas pu finir l'histoire sans se demander - maintenant que cette utopie était en place - que se passerait-il dans dix ans… ? En fait, on en est arrivé à des choses qui nous ont beaucoup titillés et donné l'envie, peut-être dans quelques temps, d'entamer un second cycle… Brunschwig : Ce n'est pas vraiment un problème de portes ouvertes. Mais comme rien n'est véritablement lié au présent, mais plutôt au passé, tu ne peux pas envisager brusquement un présent qui aurait des conséquences tout de suite… On a vraiment envie de donner le sentiment d'une échelle de temps, c'est-à-dire : donner le passé, ensuite le présent.. et surtout donner aux gens les clés pour imaginer ce qui pourrait se passer après, les laisser poursuivre l'histoire en esprit, et pour ceux qui veulent aller très loin : imaginer un avenir à New York avec Jessica à sa tête. Et nous, c'est ce qu'on a fait… Cela ne s'appellera plus le "Pouvoir des Innocents" mais il est possible qu'une série voit le jour dans quelques années qui s'appellera "Les enfants de Jessica" et qui racontera ce que sont devenus Joshua, Jessica, Amy, ... Brunschwig : Oui (rires). Perturbé dans le sens où c'est la première série qui se termine… Perturbant dans le sens d'avoir créé quelque chose où on se dit que demain, on n'attaque pas la suite… En plus, avec des personnages qu'on chérit vraiment, auxquels on s'est attaché. Lorsque l'on s'attache ainsi, ce n'est évidemment pas facile de les laisser du jour au lendemain. Lorsqu'on parle de Joshua ou de Providence avec Laurent, on ne parle pas de marionnettes de fiction, mais bien de personnages qui ont leur propre logique, qui pensent en dehors de nous.. Ils pourraient vivre des aventures sans même qu'on s'en mêle, quoi (rires). Tu penses que des personnages BD échappent à un moment à leurs auteurs, et peuvent avoir leur "propre vie" ? Brunschwig : Si quelqu'un a envie de le reprendre par exemple ? Aux Etats-Unis c'est rigolo de voir comment les personnages évoluent, en passant de mains en mains des divers auteurs. Ce n'est pas inintéressant et c'est dommage qu'on ne le fasse pas davantage en France. Brunschwig : C'est joliment dit, ça (rires).. Pour "Vauriens", c'est fini. Il sortira en avril ou en mai 2002. Quant à "L'esprit de Warren", on y travaille, mais je ne peux encore rien annoncer de précis pour l'instant… Et tes autres projets : "Urban Games", "Angus Powderhill"… ? Brunschwig : Il devrait y avoir un
"Urban
Games" dans le courant de l'année. Comme je l'avais annoncé, le dessin
est repris par Laurent Cagniat
et Laurent Hirn. Au mois de mai, on a une série avec Olivier Neuray
qui démarre chez Dupuis, dans la collection "Repérages" : Lloyd Singer
(dont
large explication en fin d'entretien avec Luc Brunschwig en janvier 2000).
Il était également question d'un projet avec Ralph Meyer. Brunschwig : Un projet qui est en projet… Ralph a beaucoup de travail pour l'instant, ce sera donc pour un peu plus tard. Par curiosité, à combien d'exemplaires a été tiré le "Sergent Logan" ? Brunschwig : 25.000 mille exemplaires. C'est pas mal ! Brunschwig : Il va falloir les vendre maintenant (rires).. Un tout grand merci. Interview et dossier réalisés par Catherine Henry
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