Fan de la première heure de Marie
Frisson, j'ai ouvert cet album avec une grande curiosité.
Qu'allait pouvoir faire Olivier Supiot "libéré" de la
BD enfantine, qui plus est dans un format de pages carrées qui
permet toutes les audaces et les découvertes visuelles ? Je n'ai
pas été déçu.
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Si on peut considérer qu'à l'heure actuelle, Olivier Supiot
a une manière absolument unique de traiter la couleur, il trouve
ici une histoire et un format à la mesure de son talent. Son dessin
explose (y compris dans le vrai sens du terme, aux pages 52-53
!) et passe avec bonheur de la rouille la plus triste aux éclats
de couleur pure. Quelque part, il rejoint le parti-pris chromatique
de Blain
sur le Réducteur
de Vitesse, mais en le poussant beaucoup plus loin.
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L'histoire, fantastique et onirique à la fois, est un véritable
écrin pour le dessin de Supiot. Pas étonnant, lorsqu'on sait à
quel point Eric Omond est sensible aux qualités graphiques de
"ses" dessinateurs. Ses débuts aux côtés de Yoann
sur "Toto
l'ornithorynque" l'ont suffisamment prouvé.
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Un tel amour du dessin demande presque une sorte d'humilité
dans le chef du scénariste dont l'histoire de capitaine de navire
à la dérive racontée ici ne tiendrait pas une minute en cinéma
ou en littérature. Fantômes et créatures du rêve se disputent
le bateau comme autant de métaphores de la vie et de la mort,
permettant au dessinateur de passer du morbide glacial à la féerie
la plus éclaboussante. Le genre de livre qui donne à la BD sa
raison d'être.
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Visuellement, il y a longtemps que je n'ai plus eu une telle
surprise à la lecture d'une bande dessinée. Supiot a le même sens
inné de la couleur pure et de la lumière qu'un Mattotti.
Son découpage est d'une intelligence parfaite. Et ses effets sont
saisissants. Il ne lui manque sans doute qu'un peu de bouteille
pour devenir un tout grand.
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