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C'est
de la modestie, ça.
Bernard Cosey : Non, ce n'est pas de la modestie. Non justement, je vais rééquilibrer ce que je viens de dire. D'un point de vue sentiments, Cécile ne me touche pas particulièrement, au contraire. Elle est plus plastique.
Pourtant ses femmes ne sont pas belles, en général, les femmes de Jean-Claude Denis. Bernard Cosey : Elles sont belles sans être parfaites. Esthétiquement elles ne sont pas parfaites. Bernard Cosey : Oui, eh bien moi j'en tombe amoureux, chaque fois qu'il dessine une femme. Alors si on fait les comparaisons, évidemment Cécile est beaucoup plus belle. Ce sont des choix, tout est possible. Les femmes en BD, c'est quelque chose d'important ? Bernard Cosey : Pas seulement en BD ! Bien entendu. Mais il n'y en a pas tant que ça, des héroïnes donc...
Vous n'avez pas envie d'avoir un autre personnage récurrent, …et qui pourrait être une femme, par exemple ? Bernard Cosey : Récurent ? C'est-à-dire... Lancer une nouvelle série. Bernard Cosey : Non, je me sens quand même plus à l'aise dans le « one-shot », qui permet de tout dire en une fois, donc c'est un challenge, c'est un pari, parce qu'on aura pas de deuxième chance, contrairement à la série où le prochain album sera peut-être mieux. Mais en même temps, ça ne convient pas du tout à ce que je cherche à faire parce que je ne suis pas intéressé à raconter des histoires de « héros ». Or la série, c'est fait pour les héros, qui, à chaque album, risquent leur vie,.. ce qui est très bien, moi j'aime bien lire ça. Mais enfin j'ai rien à dire en tant qu'auteur là. Ce n'est quand même pas la définition de Jonathan. Il n'était pas ça. Bernard Cosey : Absolument. Il est à cheval. C'est pour ça que c'est difficile. C'est pour ça que j'ai arrêté dix ans. Il est vraiment à cheval entre le héros et le personnage de one-shot. En fait, il assiste beaucoup à des choses tout en étant en partie acteur. Bernard Cosey : Oui. Ca, c'est son problème. C'est le problème que j'ai avec lui, c'est que ce n'est pas un héros. Donc, comment raconter une treizième ou une quatorzième histoire ? Que ce soit en littérature ou au cinéma, lorsqu'on parle d'un personnage, en principe tout est dit, on a un récit. Ca peut être en 60 pages ou en 600 mais on ne va pas faire 15 bouquins sur ce même personnage. Et j'ai un peu la même façon de concevoir mes personnages. Donc Jonathan... spécial ! C'est un peu un OVNI ?
Vous avez commencé par mettre beaucoup de vous dans vos BD. Est-ce qu'aujourd'hui vous avez l'impression de mettre toujours autant ? Bernard Cosey : Toujours autant mais d'une façon plus subtile, moins directe, moins « premier degré ». Pour vous protéger ? Bernard Cosey : Non mais pour me sentir plus libre de raconter ce que j'ai envie de raconter à propos de mes personnages parce que, lorsque j'ai créé Jonathan, je lui ai donné des caractéristiques physiques qui sont comparables aux miennes, du style même genre de cheveux, même genre d'yeux, mais c'est tout, ce n'est pas un autoportrait. Mais n'empêche que le lecteur l'a souvent pris comme un autoportrait avec l'éternelle question : est-ce autobiographique ? …Que je ne vous poserai pas. Bernard Cosey : J'y répondrai quand même (rire)...Donc ça devient un peu lourd parce que si par hasard... il y a un aspect presque de supercherie…. j'ai l'impression de me vanter. J'ai fait ci, j'ai fait ça… alors que ce n'est pas du tout le but. C'est un peu crispant. Donc ce n'est pas une autobiographie au premier degré, dans le sens que je n'ai pas vécu ce qu'il a vécu mais, oui, je parle de moi dans tous mes personnages, comme tout le monde, et c'est peut-être plus évident. Il y a une chose qui reste aussi de cette période-là, c'est la mise en page, qui était particulièrement différente de ce qu'on pouvait voir à ce moment-là, vraiment le traitement graphique des cases elles-mêmes mises en une seule planche qui elle-même était une oeuvre d'art, un dessin. Et puis il y avait ce qu'on pourrait appeler les B.O.. Vous n'étiez pas le seul à le faire, mais c'était une spécialité chez vous. C'est quelque chose qui a pris quelle importance à l'époque dans votre vie ? Bernard Cosey : Ah c'était très important. Cette musique qui était associée apparemment à la création, pas tellement à l'histoire, mais à la création. Vous avez eu des retours, des avis de lecteurs disant « J'ai découvert telle musique grâce à vous » ? Bernard Cosey : Oui, oui. Absolument. C'est un plaisir, ça, pour vous ?
Il ne l'a pas fait ? Bernard Cosey : Non. C'est une grande période quand même. Une période qui était d'une totale liberté. On parlait justement à l'instant de vos planches qui étaient quand même particulièrement différentes de ce qu'on voyait dans Tintin ; vous pouviez tout faire ? Bernard Cosey : Oui, il n'y a jamais eu de censure. De l'autocensure ? Bernard Cosey : Non, pas d'autocensure par rapport au public. Au début, j'avais des conseils de l'éditeur, du style « Mets un petit peu plus d'action, fais un peu plus comme cela, ce sera plus commercial. » Honnêtement, je n'ai pas écouté ses conseils parce que ça ne me paraissait pas intéressant. Et puis quand Tintin a commencé à marcher, alors l'éditeur a dit « Surtout ne change rien. » Puis je me suis empressé de changer, ou presque. Je ne crois pas à cette espèce de politique qui fait que, si on lui obéit, il n'y aura jamais rien de nouveau. On va tous faire de l'Astérix, on va tous faire du Schtroumpf. Je ne suis pas en train de critiquer Astérix et les Schtroumpfs, ils sont supers, mais il faut apporter du nouveau. Si on avait pensé comme ça, Uderzo et Goscinny seraient restés sur Oumpah Pah, qui se vendait bien, ce n'était pas un échec. Donc il faut faire ce qu'on a envie de faire. OK, merci. Bernard Cosey : Merci. Images Copyrights © Bernard Cosey - Editions Le
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